Le Quotidien du 17 mai 2022 : Responsabilité

[Brèves] Responsabilité de l’entreprise gardienne d’un chantier insuffisamment sécurisé en cas de pluralité d’intervenants sur le chantier ?

Réf. : CA Chambéry, 2e ch., 31 mars 2022, n° 19/02203 N° Lexbase : A72457RR

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 16 Mai 2022

► Le gardien de la chose se définit comme celui qui dispose des pouvoirs de contrôle d'usage et de direction de la chose dommageable ; la garde est alternative et non cumulative ;
► en cas de pluralité d’intervenants sur un chantier, seule doit être déclarée responsable de la chute de la victime dans un trou d’un mètre de profondeur, l’entreprise qui avait, au moment de l'accident, la garde du chantier litigieux, chantier qu'elle a insuffisamment sécurisé.

C'est en ce sens que s'est prononcée la cour d'appel de Chambéry dans un arrêt rendu le 31 mars 2022. En l’espèce, une femme avait été victime d'un accident, en chutant dans un trou d'un mètre de profondeur, dont la présence était due à des travaux de voirie et réseaux divers.

Après qu’il ait été relevé que le trou, chose inerte, qui occupait une position anormale, devait être considéré comme la chose dommageable au sens des dispositions de l'article 1384, alinéa 1er ancien du Code civil, relatif à la responsabilité du fait des choses, la question s’est notamment posée de la détermination de l’entreprise responsable alors qu’il existait plusieurs intervenants sur ce chantier. En effet, les travaux litigieux avaient été réalisés dans le cadre d'un contrat conclu entre la SA Orange et la SAS Eiffage Telecom Sud-Est qui avait sous-traité la partie génie civil des travaux à la SAS Eiffage Energie Rhône-Alpes et la partie câblage à la SARL PCE Services.

La cour d’appel de Chambéry rappelle qu’il est constant en jurisprudence que le gardien de la chose se définit comme celui qui dispose des pouvoirs de contrôle d'usage et de direction de la chose dommageable. Il est tout aussi constant que la garde est alternative et non cumulative.

En l'espèce la cour relève que :

  • la société Orange, maître de l'ouvrage, avait confié les travaux à la société Fiffage Energie Systèmes Telecom Sud-Est (qualifié d'entrepreneur) lui transférant ainsi la garde des chantiers à venir comme le stipulait d'ailleurs l'article 7.7 de la convention, selon lequel l'organisation et le financement des Prestations et Travaux était de la pleine responsabilité de l'entrepreneur qui devrait respecter les règles de l'art ;
  • la société Eiffage Energie Systèmes Telecom Sud-Est avait, à son tour, confié à la société Eiffage Energie Systèmes - Infra Rhône-Alpes et à la SARL PCE Services la réalisation des travaux par des contrats de sous-traitance selon lesquels le sous-traitant était seul responsable des accidents ou dommages résultant de l'exécution de ses travaux ou du fait de ses agents ou personnels tant envers l'entrepreneur principal qu'envers les tiers (article 2-3 in fine, pièces société Orange n°2 et 3) ;
  • au moment de l'accident, seule la SARL PCE Services, chargée du câblage, était présente et travaillait sur le chantier litigieux comme cela résultait de deux témoignages qui précisaient que les ouvriers tiraient des câbles et installaient la fibre, ainsi que des déclarations de la société elle-même ;
  • selon les témoignages c’étaient les ouvriers présents qui avaient « ouvert les regards » ou encore « enlevé les plaques métalliques » créant ainsi le trou dans lequel la victime est tombée ;
  • la SARL PCE Services reconnaissait elle-même dans un courrier adressé à une compagnie d'assurance et daté du 15 janvier 2015 que les éléments de sécurité qu'elle imposait à ses employés pour protéger les « chambres » étaient une planche rouge recouvrant le trou, des cônes de protection aux quatre coins et un parc de protection garde-fou ; elle affirmait dans le même courrier que « tous les éléments de sécurité étaient installés » ;
  • si les témoins de l'accident évoquaient la présence de petits cônes autour du trou et la victime mentionnait la présence d'une planche rouge, aucun ne disait que des garde-fous étaient en place ; au contraire, les deux témoins précisent avoir vu que l'installation était dangereuse et disaient l'avoir signalé aux ouvriers qui n'avaient pas donné suite à leurs avertissements.

Selon les conseillers d’appel de Chambéry, il résultait de l'ensemble de ce qui précède que seule la SARL PCE Services avait, au moment de l'accident, la garde du chantier litigieux, chantier qu'elle avait insuffisamment sécurisé. À ce titre c'est vainement que la société QBE Europe SA/NV invoquait l'article 11 des dispositions du contrat de sous-traitance. En effet cette clause ne concernait que le partage des dépenses entre l'entrepreneur et le sous-traitant et uniquement s'agissant de postes qui n'étaient pas en lien avec l'accident et concernaient, par exemple, les bureaux de chantier et leurs fluides ou encore l'éclairage, le chauffage ou la surveillance des locaux communs.

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