Réf. : CJUE, gde ch., 15 mars 2022, aff. C-302/20 N° Lexbase : A48437QG
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par Vincent Téchené
le 23 Mars 2022
► La divulgation par un journaliste d’une information privilégiée portant sur la publication prochaine d’un article relayant des rumeurs concernant des sociétés cotées en Bourse est licite lorsqu’elle est nécessaire pour mener à bien une activité de journalisme et respecte le principe de proportionnalité.
Faits et procédure. Un journaliste a publié sur le site internet d’un journal deux articles relayant des rumeurs de dépôt d’offres publiques d’achat sur les titres de Hermès (par LVMH) et de Maurel & Prom. Les prix indiqués dépassaient largement les cours de ces titres sur Euronext. Cette publication a fait augmenter considérablement les cours de ces titres. Peu avant la publication des articles, des ordres d’achat ont été passés sur les titres en question par certains résidents britanniques, qui les ont vendus une fois cette publication intervenue. Le journaliste s’est vu infliger par l’Autorité des marchés financiers (AMF, décision du 24 octobre 2018, sanction N° Lexbase : L6147LMM) une sanction pécuniaire d’un montant de 40 000 euros parce qu’il aurait fait part de la publication prochaine de ses articles à ces résidents britanniques et leur aurait ainsi communiqué des « informations privilégiées ».
Saisie d’un recours en annulation de cette décision, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 5-7, 9 juillet 2020, n° 18/28497 N° Lexbase : A76887LC) a interrogé la Cour de justice à titre préjudiciel sur l’interprétation des dispositions du droit de l’Union sur les opérations d’initiés (Règlement n° 596/2014, du 16 avril 2014, sur les abus de marchés N° Lexbase : L4814I3P) :
Décision. Selon la Cour de justice, une information portant sur la publication prochaine d’un article de presse relayant une rumeur de marché concernant un émetteur d’instruments financiers est susceptible de constituer une information « à caractère précis » et, donc, de relever de la notion d’« information privilégiée », lorsqu’elle fait notamment mention du prix auquel seraient achetés les titres, du nom du journaliste ayant signé l’article ainsi que de l’organe de presse en assurant la publication.
Toutefois, elle précise que la communication d’informations privilégiées à des fins journalistiques peut être justifiée, en vertu du droit de l’Union, au titre de la liberté de la presse et de la liberté d’expression. Les fins journalistiques peuvent englober des travaux d’investigation préparatoires à la publication réalisés par un journaliste pour vérifier la véracité des rumeurs. En revanche, la divulgation d’une information privilégiée par un journaliste n’est licite que lorsqu’elle est considérée comme nécessaire à l’exercice de sa profession et comme respectant le principe de proportionnalité.
Doivent ainsi être examinées par la juridiction nationale les questions suivantes :
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