La lettre juridique n°886 du 2 décembre 2021 : Droit rural

[Brèves] Litiges en matière de relations commerciales agricoles : la médiation obligatoire ne fait pas obstacle à une procédure d’urgence !

Réf. : Cass. civ. 1, 24 novembre 2021, n° 20-15.789, FS-B (N° Lexbase : A78297CX)

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 01 Décembre 2021

En cas de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent, les dispositions de l'article L. 631-28 du Code rural et de la pêche maritime instituant une procédure de médiation obligatoire et préalable ne font pas obstacle à la saisine du juge des référés.

Faits et procédure. Le litige opposait une société coopérative agricole (SCA) spécialisée dans l'achat, l'abattage et la découpe de porc, et sa filiale, qui fabriquait de la charcuterie, à une société qui préparait et vendait des produits alimentaires ; les sociétés étaient en relations d'affaires depuis 2011. Le 8 juillet 2019, la société qui vendait les produits alimentaires avait assigné la coopérative et sa filiale devant le juge des référés aux fins de voir constater la rupture brutale des relations commerciales et ordonner leur poursuite pour une durée de douze mois avec obligation de renégocier de bonne foi les prix. Les sociétés assignées avaient opposé, en l'absence de médiation préalable, l'irrecevabilité des demandes de la société les ayant assignées.

Procédure de médiation obligatoire (C. rur., art. L. 631-28). L'alinéa premier de l’article L. 631-28 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L6237L8I) prévoit, en effet, que « Tout litige entre professionnels relatif à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat ou d'un accord-cadre mentionné à l'article L. 631-24 ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit, préalablement à toute saisine du juge, faire l'objet d'une procédure de médiation par le médiateur des relations commerciales agricoles et, en cas d'échec de la médiation, d'une saisine du comité de règlement des différends commerciaux agricoles mentionné à l'article L. 631-28-1, sauf si le contrat prévoit un autre dispositif de médiation ou en cas de recours à l'arbitrage et sauf pour certaines filières, dont la liste est définie par décret, pour lesquelles des modes alternatifs de règlement des différends ont été mis en place. »

Procédure d’urgence/trouble manifestement illicite. Ainsi que l’indique la Cour de cassation dans le présent arrêt, en cas de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent, les dispositions de l'article L. 631-28 du Code rural et de la pêche maritime instituant une procédure de médiation obligatoire et préalable ne font pas obstacle à la saisine du juge des référés. C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel de Paris (CA Paris, 1, 3, 12 février 2020, n° 19/14608 N° Lexbase : A60373EC) avait retenu que ces dispositions ne privaient pas la société en cause de la faculté de saisir le juge des référés sur le fondement de l'article 873, alinéa 1er, du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0850H4A).

Ainsi que l’avait relevé la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 12 février 2002, en l'absence d'un quelconque préavis de rupture, et alors même que les relations commerciales existaient entre les parties depuis 2011 et que la grille tarifaire adoptée par les parties avait été très récemment actualisée le 9 mai 2019 avec effet au 1er juin 2019, la rupture partielle brutale de la relation commerciale établie se trouve caractérisée. Dès lors qu'il n'était pas discuté que la société coopérative était le fournisseur exclusif de la société demanderesse, les conditions de la rupture ont été constitutives d'un trouble manifestement illicite et ont été de nature à causer à la société un dommage imminent. Le juge des référés n’avait ainsi fait qu'user du pouvoir que lui confère l'article 873, alinéa 1er, du Code de procédure civile, lorsqu'il a adopté, comme mesure conservatoire, la poursuite des effets du contrat aux conditions acceptées par la victime de la rupture brutale.

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