Réf. : Cass. com., 20 octobre 2021, n° 20-10.710, F-B (N° Lexbase : A524849A)
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par Vincent Téchené
le 29 Octobre 2021
► Le dessaisissement ne concernant que l'administration et la disposition des biens du débiteur en liquidation judiciaire, ce dernier a qualité pour intenter seul une action en divorce ou y défendre, cette action, attachée à sa personne, incluant alors la fixation de la prestation compensatoire mise à sa charge ;
En outre, le liquidateur, qui entend rendre inopposable à la procédure l'abandon, à titre de prestation compensatoire, d'un bien personnel du débiteur marié sous le régime de la séparation des biens qui a été décidé par le juge du divorce, doit exercer une tierce-opposition contre cette disposition du jugement de divorce.
Faits et procédure. Deux époux mariés sous le régime de la séparation de biens ont acquis en indivision un immeuble. Le mari a été mis en liquidation judiciaire le 13 mars 2008. Le divorce ayant été prononcé par un jugement du 9 septembre 2010, un arrêt du 14 septembre 2011, rectifié le 14 novembre 2012, infirmant sur ce point le jugement de divorce, a accordé à l’ex-épouse une prestation compensatoire en capital de 95 000 euros, sous la forme de l'abandon par le mari de sa part indivise dans l'immeuble précité. Le liquidateur n'était pas partie à cette instance.
Faisant valoir que les dispositions patrimoniales de cet arrêt étaient inopposables à la procédure collective, le liquidateur a assigné l’ex-épouse pour obtenir le partage de l'indivision et, préalablement, la vente aux enchères de l'immeuble indivis.
La cour d’appel ayant fait droit aux demandes du liquidateur, l’ex-épouse a formé un pourvoi en cassation.
Décision. La Cour de cassation, énonçant le principe précité, censure l’arrêt d’appel.
En effet, elle relève que pour déclarer inopposable à la liquidation judiciaire le transfert de propriété, ordonné à titre de prestation compensatoire le 14 septembre 2011, et prescrire la vente aux enchères de l'immeuble, l'arrêt retient que les implications financières de l'action en divorce n'échappent pas au dessaisissement et en déduit que le liquidateur aurait dû être appelé à la procédure de divorce.
La Haute juridiction casse donc l’arrêt d’appel : en statuant, ainsi alors qu'il incombait au liquidateur de former tierce-opposition au jugement de divorce pour faire déclarer inopposable à la liquidation judiciaire la disposition de ce jugement ayant décidé l'abandon de la part du débiteur dans l'immeuble acquis par les époux en indivision, la cour d'appel a violé l’article L. 641-9, I, du Code de commerce (N° Lexbase : L7329IZH).
Précisions. La Cour de cassation opère ici un rappel. Elle avait jugé identiquement, le 16 janvier 2019, que le débiteur en liquidation a qualité pour intenter seul une action en divorce ou y défendre, car cette action, qui inclut la fixation de la prestation compensatoire mise à sa charge, est attachée à sa personne. La Cour avait également retenu que cette action est sans préjudice de l'exercice par le liquidateur d'une tierce-opposition contre cette disposition du jugement de divorce, qui entend rendre inopposable à la procédure collective l'abandon en pleine propriété d'un bien propre appartenant au débiteur décidé par le juge du divorce à titre de prestation compensatoire (Cass. com., 16 janvier 2019, n° 17-16.334, F-P+B N° Lexbase : A6723YT8 ; Ch. Lebel, Lexbase Affaires, février 2019, n° 583 N° Lexbase : N7631BXW).
Concrètement, dès lors que les modalités patrimoniales du divorce sont susceptibles d’être préjudiciables à la collectivité des créanciers du débiteur divorcé, le liquidateur peut, et doit, exercer une tierce-opposition au jugement de divorce. Dans ces conditions, son action est limitée aux effets patrimoniaux du divorce.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les effets du prononcé de la liquidation judiciaire, Les droits attachés à la personne du débiteur, in Entreprises en difficulté, (dir. P-M. Le Corre), Lexbase (N° Lexbase : E3973EUP). |
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