Réf. : CEDH, 13 juillet 2021, Req. 50705/11, 11340/12, 26221/12, 71694/12, 44845/15, 17238/16 et 63214/16, Todorov et autres c. Bulgarie [Disponible en anglais]
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N8370BYN
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par Adélaïde Léon
le 28 Juillet 2021
► Dans le cadre de la confiscation, par les autorités nationales, des produits du crime, un équilibre doit être trouvé entre l’intérêt général et la protection de la propriété ; une législation nationale permettant aux autorités de confisquer certains biens considérés comme des produits du crime est susceptible de créer un déséquilibre en faveur de l’État lorsqu’elle dispose d’un large champ d’application ; ce déséquilibre doit être contrebalancé par, notamment, l’obligation de démontrer certains liens avec une criminalité réelle dans la provenance des biens à confisquer.
Rappel de la procédure. Dans différentes affaires, des requérants ont été condamnés par des tribunaux bulgares pour diverses infractions, parmi lesquelles abattage illégal de bois, privation de liberté, tentative d'extorsion, détournement de fonds aggravé, détention d'armes à feu, vol qualifié, falsification de documents aggravée, détention illégale de stupéfiants et fraude fiscale. Toutes ces personnes ont été condamnées en vertu d’une loi de 2005, sur les produits du crime, permettant aux autorités de confisquer certains biens considérés comme des produits du crime.
Après une enquête de la Commission pour la découverte des produits du crime, qui a examiné, entre autres, leurs revenus et leurs dépenses au cours de la période concernée, des biens appartenant aux requérants ont été confisqués par l’État, puis les tribunaux nationaux ont conclu que les dépenses des intéressés au cours de la période examinée avaient largement dépassé leurs revenus légaux et que les autres actifs acquis étaient les produits du crime.
Les décisions ont été confirmées par les juridictions supérieures.
Motifs de la requête. Les requérants ont introduit une requête devant la Cour européenne des droits de l’Homme se plaignant de divers aspects de la procédure de confiscation.
Décision. La Cour constate tout d’abord que la confiscation était légale, car fondée sur la loi sur les produits du crime, et que la saisie d’avoirs obtenus par la criminalité est conforme à l’intérêt général. Toutefois, la Cour rappelle qu’un juste équilibre doit être trouvé entre l’intérêt général et la protection des droits fondamentaux parmi lesquels figure la protection de la propriété (Protocole additionnel n° 1, art. 1 N° Lexbase : L1625AZ9).
Selon la Cour, le large champ d’application de la loi applicable en l’espèce est susceptible de faire pencher la balance en faveur de l’État. Un déséquilibre qui, selon la Haute juridiction, doit être contrebalancé par, notamment, l’obligation de démontrer certains liens avec une criminalité réelle dans la provenance des biens à confisquer. La Cour affirme qu’il appartient aux juridictions internes de déterminer si une telle compensation a eu lieu. Toutefois, la Cour devient compétente lorsqu’il est démontré que le raisonnement des juridictions a été arbitraire ou manifestement déraisonnable.
En l’espèce, dans les affaires Todorov et autres (n° 50705/11), Gaich (n° 11340/12), Barov (n° 26221/12) et Zhekovi (n° 71694/12), la Cour juge que la confiscation des biens a été disproportionnée, entraînant une violation de la Convention, en raison de l’absence de garanties suffisantes pour parvenir au juste équilibre requis pour garantir le droit de propriété des requérants. La Cour pointe notamment :
En revanche, dans les affaires Rusev (n° 44845/15), Katsarov (n° 17238/16) et Dimitrov (n° 63214/16), la Cour estime que les juridictions internes ont examiné les éléments en détail et ont donné aux requérants la possibilité de présenter des arguments et ont présenté une motivation suffisante. Dès lors, la Cour estime que la confiscation n’a pas été disproportionnée.
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