Le Quotidien du 8 juin 2021 : Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Non-assujettissement à la TVA d’une commune exploitant une piscine municipale : appréciation de la condition de distorsion de concurrence

Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 28 mai 2021, n° 442378, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A48684TH)

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[Brèves] Non-assujettissement à la TVA d’une commune exploitant une piscine municipale : appréciation de la condition de distorsion de concurrence. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/68919337-breves-nonassujettissement-a-la-tva-dune-commune-exploitant-une-piscine-municipale-appreciation-de-l
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par Marie-Claire Sgarra

le 07 Juin 2021

► Le non-assujettissement d’une commune à la TVA pour l'exploitation d’une piscine dont elle est propriétaire n'est pas susceptible de créer de distorsion de concurrence ni avec un opérateur privé autonome, ni avec un organisme public bénéficiant du même régime pour des activités similaires.

Les faits :

  • une commune exploite une piscine, située sur son territoire, dont elle est propriétaire et dont les principaux équipements sont constitués d'un bassin olympique et d'un bassin couvert, tous deux destinés à la natation ;
  • la commune demande à l'administration fiscale de lui rembourser la somme correspondant à l'excédent de la TVA qu'elle a supportée à raison des dépenses acquittées pour les besoins de cette activité sur le montant de la taxe à collecter lors de la facturation des prestations rendues aux usagers de la piscine ;
  • demande rejetée par l'administration ;
  • la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier avait fait droit à la restitution sollicitée (CAA Marseille, 16 juin 2020, n° 19MA00485 N° Lexbase : A96063PH).

🔎 Principe. Le non-assujettissement à la TVA prévue en faveur des personnes morales de droit public énumérées au paragraphe 1 de l'article 13 de la « Directive TVA », qui déroge à la règle générale de l'assujettissement de toute activité de nature économique, est subordonné à deux conditions cumulatives (CGI, art. 256 N° Lexbase : L6260LUE) tenant :

  • d'une part, à ce que l'activité soit exercée par un organisme agissant en tant qu'autorité publique et ;
  • d'autre part, à ce que le non-assujettissement ne conduise pas à des distorsions de concurrence d'une certaine importance.

📌 Solution du Conseil d’État

✔ En premier lieu, la condition selon laquelle l'activité économique est réalisée par l'organisme public en tant qu'autorité publique est remplie, selon la jurisprudence de la Cour de justice, lorsque l'activité en cause est exercée dans le cadre du régime juridique particulier aux personnes morales de droit public.

✔ En second lieu, par un arrêt du 16 septembre 2008 (CJUE, 16 septembre 2008, aff. C-288/07, Commissioners of Her Majesty's Revenue & Customs c/ Isle of Wight Council N° Lexbase : A3602EAN), la Cour de justice a jugé que les distorsions de concurrence d'une certaine importance auxquelles conduirait le non-assujettissement des organismes de droit public agissant en tant qu'autorités publiques doivent être évaluées par rapport à l'activité en cause, en tant que telle, indépendamment de la question de savoir si ces organismes font face ou non à une concurrence au niveau du marché local sur lequel ils accomplissent cette activité, ainsi que par rapport non seulement à la concurrence actuelle, mais également à la concurrence potentielle, pour autant que la possibilité pour un opérateur privé d'entrer sur le marché pertinent soit réelle, et non purement hypothétique.

La CJUE a précisé par la suite (CJUE, 19 janvier 2017, aff. C-344/15, National Roads Authority N° Lexbase : A2078S9T) que les distorsions de concurrence d'une certaine importance doivent être évaluées en tenant compte des circonstances économiques et que la seule présence d'opérateurs privés sur un marché, sans la prise en compte des éléments de fait, des indices objectifs et de l'analyse de ce marché, ne saurait démontrer ni l'existence d'une concurrence actuelle ou potentielle ni celle d'une distorsion de concurrence d'une certaine importance.

Pour juger que la commune ne devait pas être assujettie à la TVA à raison de l'exploitation de la piscine dont elle est propriétaire, la cour administrative d'appel s'est fondée :

  • sur ce que cette exploitation était destinée principalement à l'activité sportive et éducative ;
  • sur ce qu'il était constant que la commune exploitait la seule piscine ouverte pendant la totalité de l'année située sur le territoire de la communauté de communes de Castelnaudary Lauragais Audois et ;
  • sur ce qu'il ne résultait pas de l'instruction que l'absence d'assujettissement entraînerait une distorsion dans les conditions de concurrence avec la piscine municipale située à une distance d'un peu plus de vingt kilomètres ou empêcherait la création d'une activité économique concurrente.

👉 En statuant ainsi, sans rechercher si l'absence d'assujettissement de la commune au titre de l'exploitation de la piscine en cause serait susceptible, indépendamment même de l'obstacle qu'elle pourrait constituer pour l'émergence d'un tel acteur, d'entraîner une distorsion de concurrence avec un exploitant souhaitant offrir sur le marché pertinent des prestations dans des conditions similaires, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

💡 Le Conseil d’État a rendu un arrêt dans le même sens, en matière de restauration scolaire (CE 8° et 3° ch.-r., 28 mai 2021, n° 441739, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A48674TG).

 

 

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