Réf. : CJUE, 25-03-2021, aff. C-907/19, Q-GmbH (N° Lexbase : A69774MD)
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par Marie-Claire Sgarra
le 03 Mai 2021
► L’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) prévue par la Directive TVA (Directive (CE) n° 2006/112 du Conseil du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée N° Lexbase : L7664HTZ) ne s’applique pas aux prestations effectuées par un assujetti, qui comprennent la fourniture d’un produit d’assurance à une société d’assurances et, à titre accessoire, le placement de ce produit pour le compte de cette société ainsi que la gestion des contrats d’assurance conclus, dans le cas où la juridiction de renvoi qualifierait ces prestations de prestation unique au regard de la TVA.
Les faits :
⇒ une société allemande développe, commercialise et place des produits d’assurance. Dans le cadre de ses activités, cette société a conclu un contrat de services avec un assureur, la société F ;
⇒ ces services faisaient l’objet d’une rémunération versée par l’assureur à la société allemande, prenant la forme d’une commission de courtage ;
⇒ la société allemande a soumis sa déclaration de taxe sur le chiffre d’affaires pour l’exercice 2011 aux autorités fiscales allemandes. Dans cette déclaration, elle a demandé à être exonérée de la TVA pour l’ensemble de ses prestations ;
⇒ dans son avis d’imposition, le bureau des impôts n’a pas fait droit à sa demande et a constaté l’existence de plusieurs prestations distinctes, parmi lesquelles seule l’activité d’intermédiation en assurance était exonérée ;
⇒ la société a introduit un recours contre cet avis d’imposition devant la juridiction de première instance compétente en matière fiscale, puis, a contesté la décision rendue par celle-ci devant la Cour fédérale des finances.
🖊️Question préjudicielle : Est-on en présence d’un service afférent aux opérations d’assurance et de réassurance, fourni en exonération d’impôt par les courtiers et intermédiaires d’assurance, au sens de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la Directive n° 2006/112, lorsqu’un assujetti qui exerce une activité d’intermédiaire pour une société d’assurances fournit de plus à cette dernière le produit d’assurance placé ?
📌 Solution de la CJUE.
Les États membres exonèrent, d’une part, « les opérations d’assurance et de réassurance » et, d’autre part, « les prestations de services afférentes à ces opérations effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance ».
✔ Les opérations d’assurance se caractérisent, de façon généralement admise, par le fait que l’assureur se charge, moyennant le paiement préalable d’une prime, de procurer à l’assuré, en cas de réalisation du risque couvert, la prestation convenue lors de la conclusion du contrat. Elles impliquent par nature l’existence d’une relation contractuelle entre le prestataire du service d’assurance et la personne dont les risques sont couverts par l’assurance, à savoir l’assuré.
👉 La prestation fournie par la société, consistant dans l’octroi d’une licence pour l’utilisation d’un produit d’assurance ne saurait être qualifiée d’opération d’assurance, dès lors que le concédant n’est lié contractuellement qu’à l’assureur qui exploite, conformément au contrat de licence, le produit en question.
✔ En ce qui concerne les « prestations de services afférentes à [des] opérations [d’assurance] effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance », leur exonération est soumise au respect de deux conditions cumulatives. En effet, ces prestations doivent être « afférentes » à des opérations d’assurance et être « effectuées par les courtiers et les intermédiaires d’assurance ».
En premier lieu, le prestataire doit être en relation avec l’assureur et avec l’assuré, cette relation pouvant être uniquement indirecte si le prestataire est un sous-traitant du courtier ou de l’intermédiaire. En second lieu, son activité doit recouvrir des aspects essentiels de la fonction d’intermédiaire d’assurance, tels que la recherche de prospects et la mise en relation de ceux-ci avec l’assureur, en vue de la conclusion de contrats d’assurance.
S’agissant de l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance par la société, il y a lieu de constater, sous réserve des vérifications qui incombent à la juridiction de renvoi, que ni l’un ni l’autre de ces critères ne sont remplis.
👉 Il s’ensuit que l’activité exercée par la société, consistant dans l’octroi de licences pour l’utilisation d’un produit d’assurance, ne saurait être qualifiée de prestation effectuée par les courtiers et les intermédiaires d’assurance, au sens de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la Directive 2006/112.
Partant, si les services fournis par Q formaient une prestation unique, celle-ci ne saurait être exonérée de la TVA en application de cette disposition, dès lors que la prestation principale ne relève pas de du champ d’application de celle-ci. Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la Directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que l’exonération de la TVA qu’il prévoit ne s’applique pas aux prestations effectuées par un assujetti, qui comprennent la fourniture d’un produit d’assurance à une société d’assurances et, à titre accessoire, le placement de ce produit pour le compte de cette société ainsi que la gestion des contrats d’assurance conclus, dans le cas où la juridiction de renvoi qualifierait ces prestations de prestation unique au regard de la TVA. |
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