Réf. : Cass. soc., 16 mars 2021, n° 19-21.063, F-P (N° Lexbase : A88364LT)
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par Charlotte Moronval
le 24 Mars 2021
► Une salariée se prétendant victime de discrimination en raison de son sexe est en droit de demander en référé, sous astreinte par jour de retard, des informations non anonymisées concernant la position actuelle, le coefficient actuel, le salaire actuel, le coefficient d’embauche, la date d’embauche et le salaire d’embauche de 10 salariés hommes embauchés au même moment et à une position comparable à la sienne, sans que la société ait à leur demander leur autorisation préalable.
Faits et procédure. Une salariée se prétendant victime de discrimination en raison de son sexe demande en référé la transmission, par son employeur, de documents concernant dix hommes non anonymes, actuellement salariés au sein de la société et embauchés en qualité de technicien d'atelier niveau IV, échelon 1, coefficient 255 et contenant les informations suivantes : la position actuelle, le coefficient actuel, le salaire actuel, le coefficient d'embauche, la date d'embauche et le salaire d'embauche.
Elle obtient gain de cause devant la formation de référé de la juridiction prud’homale qui condamne l’employeur à payer à la salariée une somme provisionnelle au titre de la liquidation de l'astreinte, lui ordonne de lui remettre les documents, et dit qu'à défaut, à partir d’une certaine date, la remise de ces documents sera assortie d'une astreinte définitive par jour de retard et se réserve le droit de liquider cette astreinte.
Pour débouter la salariée de sa demande tendant à ce que l’employeur soit condamné à lui verser une certaine somme au titre de la liquidation de l'astreinte provisoire, la cour d’appel (CA Grenoble, 11 juin 2019, n° 18/04544 N° Lexbase : A2832ZEM) retient que le bulletin de paie d'un salarié comprend des données personnelles telles que l'âge, le salaire, l'adresse personnelle, la domiciliation bancaire, l'existence d'arrêts de travail pour maladie ou encore de saisies sur leur rémunération et que, dans ces conditions, l’employeur était légitime, préalablement à toute communication de leurs données personnelles à la salariée, à rechercher l'autorisation de ses salariés.
La salariée forme un pourvoi en cassation.
La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel.
En se déterminant comme elle l’a fait, sans rechercher si la communication des informations non anonymisées n'était pas nécessaire à l'exercice du droit à la preuve de la discrimination alléguée et proportionnée au but poursuivi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 6, §1, de la Convention EDH (N° Lexbase : L7558AIR).
Pour en savoir plus. A rappr. Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 17-19.523, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A5510379), S. Bouchene et F. Clouzeau, Droit de la preuve et possibilité pour l’employeur de produire devant le juge prud’homal des moyens de preuve illicites, Lexbase Social, janvier 2021, n° 850 (N° Lexbase : N6014BYE). V. également ETUDE : L’instance prud’homale, L'administration de la preuve lors d'un procès prud'homal, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E6441ZKR). |
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