Réf. : Cass. civ. 1, 17 février 2021, n° 19-18.819, FS-P (N° Lexbase : A62034H9)
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N6600BY4
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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)
le 03 Mars 2021
► La personne qui se livre à des opérations visées par l’article L. 211-1 du Code du tourisme (N° Lexbase : L6675LHP) est exonérée de sa responsabilité de plein droit dès lors, notamment qu’elle est en mesure, de démontrer que le fait, imprévisible et insurmontable, d’un tiers est à l’origine de l’inexécution ou de la mauvaise exécution du contrat ; est cassé l’arrêt d’appel ayant condamné l’organisateur sans avoir caractérisé en quoi le fait du tiers était prévisible et aurait pu être évité.
Contexte et faits. Depuis la loi du 13 juillet 1992, le législateur fait peser sur l’agence de voyages une responsabilité de plein droit, reprise par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 (N° Lexbase : L5745IEI) et trouvant son siège dans l’article L. 211-16 du Code du tourisme (N° Lexbase : L7370LQZ). Néanmoins, cette disposition a été réécrite par l’ordonnance n° 2017-1717 du 20 décembre 2017, portant transposition de la Directive 2015/2302 (N° Lexbase : L6579LH7). Si la responsabilité de plein droit demeure, les causes d’exonération ont été élargies. En effet, désormais, « toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l’article L. 211-1 » est exonérée de sa responsabilité si elle rapporte la preuve « que le dommage est imputable soit au voyageur, soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables », alors que par le passé, le fait du tiers était exonératoire à la condition que ce fait soit « imprévisible et insurmontable ». C’est autour de cette condition, dorénavant abrogée, que se concentrait la difficulté tranchée par l’arrêt rendu le 17 février 2021. En l’espèce, un particulier ayant fait une chute pendant son sommeil au cours de la première nuit de croisière, assigna tant son cocontractant que l’organisateur de la croisière, qui furent tous deux condamnés. Les juges du fond considérèrent que le comportement du particulier « ne pouvait être qualifié d’imprévisible et d’insurmontable, une chute étant toujours possible ». L’organisateur forma un pourvoi en cassation, lequel visait à démontrer le caractère imprévisible et insurmontable de ce fait, et ainsi à l’exonérer de sa responsabilité.
Solution. La première chambre civile de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 211-16 du Code du tourisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, pour défaut de base légale, reprochant à la cour d’appel de ne pas avoir caractérisé « en quoi la chute survenue dans de telles circonstances était prévisible et aurait pu être évitée par la société (organisant la croisière) ». En reprochant à la cour d’appel d’avoir condamné l’organisateur sans avoir démontré le caractère prévisible et surmontable de la chute ayant causé le préjudice, la Cour de cassation impose aux juges du fond de s’assurer que le fait en cause ne remplit pas les conditions pour constituer une cause exonératoire (comp. Cass. civ. 1, 15 mai 2015, n° 14-17.957, F-D N° Lexbase : A8587NHI). Une telle recherche sera, en revanche, sans objet sous l’empire du droit issu de l’ordonnance du 20 décembre 2017.
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