La lettre juridique n°847 du 10 décembre 2020 : Contrôle fiscal

[Brèves] Possibilité pour le contribuable de renverser une présomption d’activité occulte en faisant valoir qu’il a fait une erreur : cas d’un contribuable ayant satisfait à ses obligations fiscales dans un autre État

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 27 novembre 2020, n° 428898, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A214238T)

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[Brèves] Possibilité pour le contribuable de renverser une présomption d’activité occulte en faisant valoir qu’il a fait une erreur : cas d’un contribuable ayant satisfait à ses obligations fiscales dans un autre État. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/62147241-breves-possibilite-pour-le-contribuable-de-renverser-une-presomption-dactivite-occulte-en-faisant-va
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par Marie-Claire Sgarra

le 09 Décembre 2020

Dans le cas où un contribuable n'a ni déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenues de souscrire, ni fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, son activité est réputée occulte s'il n'est pas en mesure d'établir qu'il a commis une erreur justifiant qu'il ne se soit acquitté d'aucune de ses obligations déclaratives ;

S'agissant d'un contribuable qui fait valoir qu'il a satisfait à l'ensemble de ses obligations fiscales dans un État autre que la France, la justification de l'erreur commise doit être appréciée en tenant compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du niveau d'imposition dans cet autre État et des modalités d'échange d'informations entre les administrations fiscales des deux États.

Les faits. Le requérant qui exploite à titre individuel une entreprise de droit polonais exerce en France, depuis 2005, une activité dans le secteur du bâtiment. À ce titre, il a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle, à l'issue duquel l'administration fiscale a estimé qu'il exerçait une activité occulte en France. Après avoir évalué d'office ses bénéfices industriels et commerciaux au titre des années de 2005 à 2010, elle lui a réclamé des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties des pénalités, au titre des mêmes années, ainsi que, par voie de taxation d'office, un rappel de TVA. Le tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande de décharge des impositions en litige. La cour administrative d'appel de Lyon, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur d'un dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de son appel contre ce jugement (CAA Lyon, 17 janvier 2019, n° 16LY01260 N° Lexbase : A8258YWR).

Solution du Conseil d’État. Ici, le contribuable a exercé depuis 2005 et jusqu'en 2011 une activité d'entrepreneur exclusivement en France, pour laquelle il n'a déposé aucune déclaration d'activité auprès d'un centre de formalités des entreprises ou d'un greffe de tribunal de grande instance, ni aucune déclaration en matière de bénéfices professionnels ou de taxe sur la valeur ajoutée auprès de l'administration fiscale, alors qu'il existait une importante différence de niveau d'imposition entre la France et la Pologne.

Pour juger que le requérant ne pouvait être regardé comme ayant commis une erreur en déclarant en Pologne les revenus de son activité individuelle réalisée en France, la cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit en comparant le montant d'impôt sur le revenu acquitté en Pologne par le contribuable et le montant mis à sa charge par l'administration française.

Les jurisprudences antérieures :

Le Conseil d’État a dans un arrêt du 7 décembre 2015, précisé les conditions d’application de la majoration pour activité occulte. En effet, il a ainsi jugé que le contribuable peut échapper à des pénalités lorsqu’il établit que c’est par erreur qu’il n’a pas déposé dans les délais légaux les déclarations fiscales qu’il était tenu de souscrire et n’a pas fait connaître son activité à un CFE ou au greffe du tribunal de commerce (CE Plénière, 7 décembre 2015, n° 368227, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0405NZZ).

Lire sur cet arrêt, C. Louit, Établissement stable et pénalité de 80 % pour activité occulte : une avancée de la jurisprudence du Conseil d'État, Lexbase Fiscal, janvier 2016, n° 639 (N° Lexbase : N0825BWH).

Plus tard, le Conseil d’État transposera cette jurisprudence, dans un arrêt du 21 juin 2018, en jugeant que le délai de reprise ne peut être invoqué lorsque le contribuable établit qu’il a commis une erreur justifiant que les obligations déclaratives n’ont pu être honorées (CE 10° et 9° ch.-r., 21 juin 2018, n° 411195, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8763XTQ).

Lire sur cet arrêt, É. Crépey, Précisions sur la fiscalité applicable aux gains tirés de la pratique habituelle du poker – Conclusions du Rapporteur public, Lexbase Fiscal, septembre 2018, n° 754 (N° Lexbase : N5500BXY).

Le Conseil d’État a confirmé que le contribuable peut s’opposer tant à la majoration de 80 %, qu’au délai spécial de reprise de dix ans en cas d’activité occulte, s’il établit qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit acquitté d’aucune de ses obligations déclaratives (CE 9° et 10° ch.-r., 18 mars 2019, n° 410573, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1771Y4D).

Lire sur cet arrêt, V. Truyens, Délai de reprise spécial : appréciation du caractère occulte d’une activité, Lexbase Fiscal, avril 2019, n° 780 (N° Lexbase : N8586BXB).

Enfin, dans un arrêt du 4 décembre 2019, le Conseil d’État a admis que « le contribuable établissait que l’absence de souscription de déclaration devait être regardée comme une erreur justifiant qu’il ne se soit pas acquitté de ses obligations dès lors que ce n’est que postérieurement aux années d’imposition en litige que la jurisprudence et l’administration fiscale ont expressément estimé que de tels gains étaient, dans certaines conditions, imposables à l’impôt sur le revenu » (CE 9° et 10° ch.-r., 4 décembre 2019, n° 420488, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9649Z47).

 

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