La lettre juridique n°838 du 1 octobre 2020 :

[Brèves] Bénéfice de subrogation : faute du créancier qui ne s’est pas opposé à l’absorption de la société dont les titres étaient nantis

Réf. : Cass. com., 23 septembre 2020, n° 19-13.378, F-P+B (N° Lexbase : A06553W8)

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par Vincent Téchené

le 30 Septembre 2020

► Constitue le fait fautif exclusivement imputable au créancier à l’origine de la perte d’un droit préférentiel, le fait pour la banque créancière, bénéficiaire d’un cautionnement et d’un nantissement de parts sociales, de ne pas avoir mis en œuvre le droit d’opposition au projet de fusion-absorption, de la société dont les titres étaient nantis par la débitrice principale, que lui confère l’article L. 236-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L6364AIK).

Faits et procédure. Une banque a consenti à une société (la débitrice) un prêt destiné à l’acquisition des parts d’une autre société (la cible), garanti par un cautionnement et le nantissement des titres acquis. Suivant une opération de fusion-absorption du 30 juin 2010, la débitrice a absorbé la société cible. La débitrice ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a déclaré sa créance, qui a été admise à titre chirographaire, au motif que l’assiette du nantissement avait disparu à la suite de l’absorption.

La banque a alors assigné en paiement la caution, qui a demandé sa décharge sur le fondement de l’article 2314 du Code civil (N° Lexbase : L1373HIP). L’arrêt d’appel (CA Rennes, 8 janvier 2019, n° 16/03073 N° Lexbase : A5756YSY) ayant rejeté ses demandes contre la caution, la banque a formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle énonce que, après avoir relevé que l’absorption de société dont les titres étaient nantis par la débitrice avait eu pour effet de réduire à néant le nantissement inscrit par la banque sur les parts sociales, la cour d’appel retient que la banque aurait pu protéger ses intérêts en mettant en œuvre le droit d’opposition au projet de fusion-absorption que lui conférait l’article L. 236-14 du code de commerce. Ainsi, si elle avait été plus vigilante, la banque aurait pu demander soit le remboursement immédiat du solde de sa créance, soit la constitution de nouvelles garanties destinées à remplacer celle dont elle disposait jusqu’alors.

Par conséquent, ayant ainsi fait ressortir que la caution établissait le fait fautif exclusivement imputable au créancier, quels qu'aient pu être les résultats de sa démarche, à l’origine de la perte d’un droit préférentiel conférant au créancier un avantage particulier pour le recouvrement de sa créance, puis constaté que la banque ne justifiait ni de l’incapacité de la société absorbante, au moment de la fusion-absorption, à solder le prêt litigieux, ni de l’impossibilité de cette société de constituer d’autres garanties, de sorte qu’elle ne démontrait pas l’absence de préjudice engendré pour la caution par sa carence, la cour d’appel, qui n’a pas inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision.

Pour aller plus loin, v. ÉTUDE : L'extinction du cautionnement en raison d'une faute du créancier : le bénéfice de subrogation, Les fautes du créancier déchargeant la caution, in Droit des sûretés (N° Lexbase : E7585E9S).

 

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