Réf. : CA Amiens, 28 juillet 2020, n° 19/05355 (N° Lexbase : A81993R4)
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N4302BYY
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par Marie Le Guerroué
le 09 Septembre 2020
►N’empiète pas sur le périmètre du droit le cabinet technique d’évaluation du préjudice qui assiste sur le plan technique aux opérations d'expertises initiées par un assureur, afin d'obtenir une évaluation au plus près du préjudice en lien avec les garanties souscrites au contrat (CA Amiens, 28 juillet 2020, n° 19/05355 N° Lexbase : A81993R4).
Procédure. Une société avait confié à un cabinet de conseil la mission de l'assister dans l'évaluation du préjudice consécutif à un incendie afin d'obtenir une indemnisation exacte et conforme aux termes du contrat d'assurance. Elle affirme, devant la cour, que le contrat passé est nul au visa de l'article 1108 ancien du Code civil (N° Lexbase : L8972K3P) (C. civ., art. 1128 nouveau) au motif qu'il prévoit l'accomplissement par le cabinet d'une activité de conseil juridique et d'assistance, en contrepartie de laquelle des honoraires sont versés, exclusivement réservée à certaines personnes disposant de certaines qualités et compétences dans les termes de l'article 54 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) telles que les avocats. Qualités et compétences dont ne dispose pas cette société. Elle affirme que cette nullité exclut, par conséquent, toute demande en paiement.
Réponse de la cour. La cour rappelle qu’aux termes de l'article 1108 ancien du Code civil, applicable à l'espèce en raison de la date de signature du contrat dont la validité est contestée, quatre conditions sont essentielles à la validité d'une convention : le consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité à contracter, un objet certain, une cause licite.
Le contrat d’assistance prévoyait que le cabinet avait « un rôle d'assistance aux démarches, calcul des dommages et réclamation d'indemnité avec étude du ou des contrats et des garanties principales et annexes, étude des recours éventuels. Mesure d'urgence éventuelle en cas de sinistre grave, suivi de dossier jusqu'à sa résolution (versement de l'indemnité éventuelle). La société tiendra régulièrement informé le demandeur des actions faites, à faire ou en cours. La société n'engagera pas d'action, de compromis ou d'accord définitif sans l'information et l'acceptation du demandeur ». Il ressort donc de ce contrat passé quelques jours après le sinistre, que la société a confié au cabinet la mission de l'assister dans l'évaluation du préjudice consécutif à l'incendie afin d'obtenir une indemnisation exacte et conforme aux termes du contrat d'assurance voir une avance sur indemnisation. Il s'agit d'une mission d'assistance à des expertises techniques permettant l'évaluation du préjudice matériel exact tenant aux démarches afin de discuter les montants d'indemnisation avec l'assureur et d'envisager le cas échéant un contentieux au besoin si la proposition d'indemnisation était insuffisante.
Ce type de sinistre (incendie d'un bâtiment) donne lieu avant indemnisation par l'assureur à des expertises techniques destinées à déterminer la nature des travaux à réaliser et leur coût poste par poste, imposant de recueillir des devis auprès de diverses entreprises du bâtiment ou autres. C'est d'ailleurs l'assureur qui mandate des experts pour réaliser ce travail et il est important pour le sinistré de pouvoir s'adjoindre les services d'un technicien lors de ce type d'opération pour éviter la partialité des techniciens mandatés par l'assureur.
Il ne s'agissait donc pas pour le cabinet de donner des conseils et consultations juridiques à la société mais de l'assister sur le plan technique aux opérations d'expertises initiées par l'assureur, afin d'obtenir une évaluation au plus près du préjudice en lien avec les garanties souscrites au contrat. La cour conclut qu’il est établi que la mission confiée n'a pas empiété le périmètre du droit et plus particulièrement le champ d'intervention des avocats, que la cause du contrat était licite et qu'il n'y a pas lieu de prononcer la nullité du contrat. Le jugement est confirmé en ce qu'il a statué en ce sens par des motifs que la cour adopte (v., ETUDE : Les personnes habilitées de droit à délivrer un conseil ou à rédiger un acte juridique, in l’Ouvrage « La profession d’avocat » N° Lexbase : E36533RQ).
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