La lettre juridique n°826 du 4 juin 2020 : Responsabilité

[Brèves] Atteinte à la vie privée : absence de divulgation de SMS malveillants en dehors de la sphère familiale ne faisant pas obstacle à la caractérisation de l’atteinte

Réf. : Cass. civ. 1, 20 mai 2020, n° 19-20.522, FS-D (N° Lexbase : A05493MB)

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par Manon Rouanne

le 03 Juin 2020

► Caractérise une atteinte au droit de chacun au respect de sa vie privée et familiale consacré à l’article 9 du Code civil (N° Lexbase : L3304ABY) de nature à engager la responsabilité civile délictuelle de celui qui en est l’auteur, les menaces et dénigrements résultant de l’envoi de messages malveillants ayant pour résultat de troubler la tranquillité de celui qui en est destinataire même si ces derniers n’ont pas fait l’objet d’une divulgation extérieure à la sphère familiale.

Telle est l’interprétation extensive du domaine de la protection de la vie privée et familiale par le Code civil consacrée par la première chambre civile dans un arrêt en date du 20 mai 2020 (Cass. civ. 1, 20 mai 2020, n° 19-20.522, FS-D N° Lexbase : A05493MB ; sur les limites à la qualification d’atteinte à la vie privée, v. notamment : Cass. civ. 1, 3 avril 2002, n° 99-19.852 N° Lexbase : A4527AYC, Cass. civ. 2, 19 février 2004, n° 02-11.122, F-P+B N° Lexbase : A3202DB9, Cass. civ. 1, 23 avril 2003, n° 01-01.851, FS-P N° Lexbase : A5089BMG).

Résumé des faits. En l’espèce, dans le cadre d’un conflit familial, le destinataire de nombreux messages malveillants adressés par son beau-frère, se prévalant du préjudice consistant dans une atteinte à sa vie privée résultant du trouble porté à sa tranquillité du fait des menaces et dénigrements dont il est l’objet, a engagé, à l’encontre de l’auteur de ces messages, sur le fondement de l’article 9 du Code civil, une action en indemnisation de ce préjudice.

A hauteur de cassation. La juridiction de première instance ayant rejeté l’engagement de la responsabilité du l’auteur des messages menaçants pour défaut de caractérisation d’une atteinte à la vie privée au sens du Code civil au motif que les messages litigieux ne revêtait qu’un caractère purement privé sans divulgation extérieure à la sphère familiale, le destinataire des messages a contesté la position des premiers juges devant la Cour de cassation en alléguant, comme moyen au pourvoi, qu'une immixtion arbitraire dans la vie d'autrui constitue, par elle-même, une atteinte à la vie privée, nonobstant le fait qu'elle intervienne au sein d'une sphère familiale et qu'elle ne fasse pas l’objet d'une divulgation hors de cette sphère.

Décision. Par une appréciation souple de la qualification d’atteinte à la vie privée au sens de l’article 9 du Code civil protégeant le droit de chacun au respect de sa vie privée, la Cour de cassation fait droit à l’argumentaire développé par le demandeur au pourvoi et casse, ainsi, le jugement rendu en affirmant que l’absence de divulgation des messages comportant des menaces et des dénigrements en dehors de la sphère familiale, ne suffit pas à écarter l’atteinte à la vie privée.

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