La lettre juridique n°826 du 4 juin 2020 : Fiscalité des particuliers

[Brèves] Régime fiscal applicable à l’indemnité transactionnelle versée par le joueur d’un jeu de hasard à celui qui a trouvé le ticket gagnant sur la voie publique

Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 27 mai 2020, n° 434067, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A56503M9)

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par Marie-Claire Sgarra

le 03 Juin 2020

L’indemnité transactionnelle versée à une personne ayant trouvé un ticket gagnant du loto sur la voie publique ne constitue pas un revenu imposable.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt en date du 27 mai 2020 (CE 8° et 3° ch.-r., 27 mai 2020, n° 434067, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A56503M9).

En l’espèce, la requérante a trouvé sur la voie publique le reçu d'une combinaison gagnante de premier rang du jeu de hasard. Elle s'est présentée à la Française des jeux qui l'a informée qu'elle ne verserait le gain de 163 millions d'euros qu'au vu d'un accord entre elle et le joueur ayant validé ce ticket. Par un protocole transactionnel la requérante a renoncé « à toute instance et action en revendication du gain » et a remis le reçu au joueur, en contrepartie d'une indemnité d'un montant de douze millions d'euros.

A l'issue d'un examen de leur situation fiscale personnelle, la requérante et son mari ont été assujettis au titre de l'année 2011 à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi qu'à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus à raison de l'imposition entre leurs mains de cette somme dans la catégorie des plus-values de cession de biens meubles, sur le fondement de l'article 150 UA du Code général des impôts (N° Lexbase : L9065LN3). Le tribunal administratif de Paris fait droit à la demande de décharge des impositions. La cour administrative de Paris confirme le jugement (CAA de Paris, 27 juin 2019, n° 18PA02470 N° Lexbase : A4120ZIG).

Pour rappel, aux termes de l’article 150 UA du Code général des impôts, « sous réserve des dispositions de l'article 150 VI (N° Lexbase : L1020IZS) et de celles qui sont propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens, par des personnes physiques, domiciliées en France au sens de l'article 4 B (N° Lexbase : L6146LU8), ou des sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 (N° Lexbase : L1176ITQ) à 8 quinquies (N° Lexbase : L1043HL9) dont le siège est situé en France, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V (N° Lexbase : L1883HN3) à 150 VH (N° Lexbase : L0458IHG) ».

La cour administrative d’appel de Paris a jugé que cet accord n’avait pas le caractère d’un acte par lequel l’intéressé a cédé à titre onéreux le reçu ou les droits attachés à ce reçu. A raison selon le Conseil d’Etat. La cour administrative d’appel rappelle à ce titre les dispositions du règlement de jeu de l’Euro millions qui s’oppose à ce que la personne en possession du reçu soit considérée comme son propriétaire. Par ailleurs aux termes de l’article 2255 du Code civil (N° Lexbase : L7201IAX), « la possession est la détention ou la jouissance d'une chose ou d'un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mêmes, ou par un autre qui la tient ou qui l'exerce en notre nom ». Ainsi, la possession d'un bien n'est pas une prérogative juridique mais un pouvoir de fait sur ce bien.

Pour le ministre de l’Action et des comptes publics, l'indemnité perçue par la requérante constitue la contrepartie d'une prestation de service rendue par elle au joueur, imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Sur ce point la cour administrative d’appel juge que la somme litigieuse, bien qu'elle rémunère un service consistant à lui restituer le reçu et à renoncer à toute action ultérieure en revendication du gain, ne pouvait être imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux dès lors que le profit en cause était par nature insusceptible de se renouveler. Raisonnement validé par le Conseil d’Etat.

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