La possibilité conférée à une autorité administrative indépendante investie d'un pouvoir de sanction de se saisir de son propre mouvement d'affaires qui entrent dans le domaine de compétence qui lui est attribué n'est pas, en soi, contraire à l'exigence d'équité dans le procès énoncée par les stipulations de l'article 6 de la CESDH (
N° Lexbase : L7558AIR) ; toutefois, ce pouvoir doit être suffisamment encadré pour ne pas donner à penser que les membres de la formation disciplinaire tiennent les faits visés par la décision d'ouverture de la procédure ou la notification ultérieure des griefs comme d'ores et déjà établis ou leur caractère répréhensible au regard des règles ou principes à appliquer comme d'ores et déjà reconnu, en méconnaissance du principe d'impartialité rappelé par l'article 6 précité ; cet encadrement est insuffisant dans le cas de l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, au regard de l'étendue des pouvoirs dont elle dispose, couvrant à la fois le contrôle des organismes relevant du Code des assurances ou du Code de la mutualité, la décision d'ouvrir une procédure disciplinaire et de définir les griefs reprochés, l'instruction de la procédure et le prononcé des sanctions disciplinaires ; eu égard à l'insuffisance des garanties dont la procédure est entourée, la circonstance que les mêmes personnes se prononcent sur la décision de poursuivre, d'une part, et sur la sanction, d'autre part, est de nature à faire naître un doute objectivement justifié sur l'impartialité de cette autorité. Telles sont les précisions fournies par le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 22 décembre 2011 (CE 9° et 10° s-s-r., 22 décembre 2011, n° 323612, mentionné dans les tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A8104H8N). En l'espèce, à la suite d'un contrôle réalisé à compter du 4 mai 2006, l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles avait, lors de sa séance du 23 juillet 2008, décidé d'ouvrir une procédure disciplinaire à l'encontre d'une union mutualiste, pour entrave au contrôle ; le président de l'Autorité avait notifié cette décision par lettre du 31 juillet 2008 ; cette procédure disciplinaire s'était achevée par la décision de l'Autorité de prononcer, lors de sa séance du 8 octobre 2008, une sanction d'avertissement à l'encontre de l'union. Mais, ainsi que le relèvent les Hauts juges, il résultait de l'instruction que cinq des sept membres du collège de l'Autorité ayant siégé le 8 octobre 2008 avaient également participé à la délibération du 23 juillet 2008, qui avait décidé l'ouverture de la procédure disciplinaire. Dès lors, l'union mutualiste était fondée à soutenir que la procédure suivie devant l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles avait méconnu l'exigence d'impartialité rappelée par l'article 6 de la CESDH et que la décision du 8 octobre 2008 devait, dès lors, être annulée.
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