Le Quotidien du 5 novembre 2019 : Pénal

[Brèves] Fraude fiscale et peines : inapplicabilité du principe de proportionnalité, motivation de la peine d’emprisonnement sans sursis et légalité de la peine complémentaire

Réf. : Cass. crim., 23 octobre 2019, n° 18-85.088, F-P+B+I (N° Lexbase : A0884ZSK)

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[Brèves] Fraude fiscale et peines : inapplicabilité du principe de proportionnalité, motivation de la peine d’emprisonnement sans sursis et légalité de la peine complémentaire. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/54428938-breves-fraude-fiscale-et-peines-inapplicabilite-du-principe-de-proportionnalite-motivation-de-la-pei
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par June Perot

le 05 Novembre 2019

► Le principe de proportionnalité du cumul des sanctions pénales et fiscales ne s’applique pas au prononcé de sanctions à l’encontre du prévenu, dirigeant de société, lorsque celle-ci est la redevable légale de l’impôt ; la solidarité fiscale prévue à l’article 1745 du Code général des impôts (N° Lexbase : L1736HNM), qui constitue une garantie pour le recouvrement de la créance du Trésor public, ne constitue pas une peine au sens de l’article 8 de la Déclaration de 1789 (N° Lexbase : L4798AQR) de sorte que le principe de proportionnalité sus-énoncé n’est pas applicable ;

la Haute juridiction prononce toutefois la cassation de l’arrêt en raison de la méconnaissance de l’article 132-19 du Code pénal (N° Lexbase : L5060K8W) relatif à la motivation de la peine d’emprisonnement sans sursis et de l’article 111-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2104AMU) relatif à la légalité de la peine (en l’espèce, a été prononcé une peine définitive d’interdiction d’exercer toute profession commerciale).

C’est ainsi que statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 23 octobre 2019 (Cass. crim., 23 octobre 2019, n° 18-85.088, F-P+B+I N° Lexbase : A0884ZSK).

Résumé des faits. Le directeur salarié d’une société de droit suisse spécialisée dans le négoce de matériel de jardinage (par ailleurs actionnaire unique de celle-ci) a été poursuivi du chef de fraude fiscale et délit comptable. Le tribunal correctionnel l’a déclaré coupable des faits reprochés et l’a condamné à un an d’emprisonnement, 30 000 euros d’amende, l’interdiction définitive d’exercer toute profession commerciale et la confiscation des objets saisis. L’administration fiscale a été reçue en sa constitution de partie civile, et les premiers juges ont dit que le prévenu sera tenu solidairement avec la société du paiement des impôts fraudés et des pénalités y afférentes. En cause d’appel, le prévenu a fait valoir, à l’appui d’une demande de relaxe, que la société, qui a formé une réclamation contentieuse, a fait l’objet de pénalités fiscales au taux de 80 %, soit le taux maximal de celles applicables, et qu’il convient de faire application de la réserve émise par le Conseil constitutionnel portant sur la proportionnalité du cumul des sanctions pénales et fiscales (Cons. const., 24 juin 2016, deux arrêts, n° 2016-545 QPC N° Lexbase : A0909RU9 et n° 2016-546 QPC N° Lexbase : A0910RUA). Condamné en appel, il a alors formé un pourvoi articulé en plusieurs moyens.

Principe de proportionnalité de la peine. S’agissant de ce principe, la Haute juridiction rejette le pourvoi. Elle considère en effet que le principe ne trouve pas à s’appliquer ici dès lors que le prévenu n’est pas le redevable légal de l’impôt et que la solidarité fiscale n’est pas une peine (lire les obs., S. Detraz, Fraude fiscale : cumul des sanctions et absence d’identité de personnes, Lexbase Pénal, novembre 2019).

Motivation de la peine. Pour condamner le directeur a une peine d’un an d’emprisonnement, la cour d’appel énonce que le jugement sera confirmé sauf à assortir partiellement la peine d’emprisonnement prononcée d’un sursis alors que seule une peine d’emprisonnement en partie ferme paraît en mesure de signifier au prévenu la gravité de ses agissements au regard de l’ampleur de la fraude et de son caractère élaboré.

La Haute juridiction considère qu’en prononçant ainsi, par des motifs contradictoires et sans s’expliquer sur les éléments de la personnalité du prévenu qu’elle a pris en considération pour fonder sa décision et sans constater que le prévenu, représenté et non comparant devant elle, n’avait fait produire aucun élément de nature à justifier de sa situation, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de l’article 132-19 du Code pénal. Il résulte en effet de ce texte que le juge qui prononce une peine d’emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l’infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction.

Légalité de la peine. En cause d’appel, le directeur a été condamné à une interdiction définitive d’exercer toute profession commerciale. La Haute cour considère qu’en prononçant ainsi une peine complémentaire d’une durée supérieure à celle prévue par l’article 1750 du Code général des impôts (N° Lexbase : L3324IQ8), dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, l’interdiction ne pouvant être prononcée que pour une durée maximale de trois ans, la cour d’appel a méconnu l’article 111-3 du Code pénal et le principe de la légalité de la peine (v. déjà : Cass. crim., 29 mai 2019, n° 18-81.013, F-P+B+I N° Lexbase : A1112ZDK ; cf. l’Ouvrage «Droit pénal général, C. Claverie-Rousset, La légalité des sanctions N° Lexbase : E3073GA3).

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