Le Quotidien du 12 février 2019 : Avocats/Procédure

[Brèves] Evaluation des parts sociales de l'avocat retrayant : quid des parts d’une SCI faisant partie des actifs d’une liquidation judiciaire ?

Réf. : CA Rennes, 29 janvier 2019, n° 18/05410 (N° Lexbase : A3928YUZ)

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par Marie Le Guerroué

le 06 Février 2019

► Le Bâtonnier est compétent pour connaître de la demande d’évaluation des parts sociales même si celles-ci font partie des actifs d’une liquidation judiciaire ; en revanche, le texte dérogatoire de l’article 21 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) permettant, au Bâtonnier de procéder à la désignation d’un expert pour l’évaluation de ces parts est d’interprétation stricte et ne désigne que les sociétés structures d'exercice de la profession et non toute société au sein de laquelle les associés sont avocats, telle une société civile immobilière. 

 

Tels sont les deux enseignements de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes le 29 janvier 2019 (CA Rennes, 29 janvier 2019, n° 18/05410 N° Lexbase : A3928YUZ).

 

Une société civile immobilière avait été constituée entre deux avocats. Cette société avait acquis un immeuble et l'avait donné à bail à une Selarl d'avocats constitué, notamment, des deux avocats. En raison de dissensions entre les associés de la Selarl, un médiateur, avait été désigné. Sous son égide, un protocole d'accord avait été conclu, aux termes duquel il avait notamment été convenu le retrait de plusieurs associés dont l’un des avocats précités et le rachat par le second des parts détenues par le premier dans la Selarl mais également dans les sociétés civiles immobilières moyennant, à chaque fois, le prix de 1 euro sous réserve de l'obtention de la mainlevée de tous les engagements financiers et de caution consenties par les différentes parties de manière à ce qu'elles ne puissent jamais être inquiétées ni recherchées à ce titre par les banques ou autre créanciers. Cette mainlevée des engagements, expressément mentionnée comme constituant une "condition déterminante" de la cession des parts, visait tant les cautions de prêts ou de découvert bancaire que le ou les billets de trésorerie.

Le tribunal de grande instance de Quimper avait, plus tard, prononcé la liquidation judiciaire de la Selarl et celle d'un des avocats (premier) et désigné un mandataire. En l'absence de mainlevée des engagements financiers et de cautions, le Bâtonnier de Quimper avait prononcé la résolution du protocole et, en conséquence, celle de l'acte de cession, au profit du second avocat, des parts de la société civil immobilière. Le mandataire avait saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Quimper aux fins d'évaluation des parts que le premier avocat détenait dans le capital de la SCI et d' en ordonner le rachat de ces parts. Le mandataire avait interjeté appel de la décision du Bâtonnier.
 

  • Sur la compétence du Bâtonnier

 

L'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 dispose que "'tout différend entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel est, en l'absence de conciliation, soumis à l'arbitrage du Bâtonnier qui, le cas échéant, procède à la désignation d'un expert pour l'évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d'avocats'"

Le mandataire soutenait que seul le juge commissaire pouvait connaître de la demande comme ayant compétence exclusive pour ordonner la cession d'un actif dépendant d'une procédure de liquidation judiciaire. La cour estime, au contraire, que c’est à bon droit, que le Bâtonnier a retenu que la mise en œuvre des dispositions de l'article 1860 du Code civil (N° Lexbase : L2057ABS) entraînait de plein droit le remboursement des droits sociaux sans qu'il soit, par voie de conséquence, nécessaire de requérir une autorisation judiciaire et plus précisément celle du juge commissaire.

L'exception d'incompétence soulevée au profit du juge commissaire a donc été, pour la cour d’appel, rejetée à juste titre. 

 

  • Sur le remboursement des droits sociaux du premier avocat


Pour la cour, le principe du remboursement des droits sociaux du premier avocat étant acquis du fait de sa liquidation judiciaire, le Bâtonnier avait pu en prendre acte et décider de la perte de la qualité d'associé une fois le remboursement des droits effectué, en l'occurrence entre les mains du mandataire.

En revanche, le Bâtonnier en se fondant sur les dispositions de l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971, nonobstant l'absence d'accord entre les parties quant à la valeur des droits sociaux litigieux, avait, sans juger utile de procéder à la désignation d'un expert, estimé ceux-ci à la somme de 1 euro. Si la cour constate que cet article déroge au principe de l'article 1843-4 du Code civil (N° Lexbase : L8956I34) auquel renvoie l'article 1860, elle précise aussi que la dérogation qu'il instaure est limitée aux seules sociétés d'avocats. Pour la cour, le texte dérogatoire étant d'interprétation stricte, l’expression ne vise que les sociétés, structures d'exercice de la profession (SCP, Selarl,...) pour lesquelles le Bâtonnier a, de par sa fonction, une expertise particulière, et non toute société au sein de laquelle les associés sont avocats, telle une société civile immobilière, peu important le fait que le local acquis par ce truchement ait été loué, à un moment donné, à la société d'exercice. Il s'en suit que le Bâtonnier ne pouvait, faute d'accord entre les parties, arrêter la valeur des parts du premier avocat à la somme d'un euro sans évaluation d'un expert préalablement désigné à cet effet. La cour renvoie donc les parties à saisir le président du TGI de Quimper pour procéder à la désignation de l’expert (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E1765E7I et N° Lexbase : E7262E9T).

 

 

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