La lettre juridique n°736 du 29 mars 2018 : Fiscalité du patrimoine

[Le point sur...] Les revenus de capitaux mobiliers

Lecture: 8 min

N3330BXM

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Le point sur...] Les revenus de capitaux mobiliers. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/45103951-le-point-sur-les-revenus-de-capitaux-mobiliers
Copier

par Fleur Chidaine, Avocate à la Cour

le 29 Mars 2018

Souvent renseignés automatiquement dans vos déclarations de revenus pour certains, plus difficiles à cerner pour d'autres, les revenus de capitaux mobiliers constituent les revenus résultant des placements financiers des contribuables.

En général, tous les revenus mobiliers perçus par des personnes physiques domiciliées en France sont soumis à l'impôt sur le revenu sauf exonération spécifique, au titre de l'année au cours de laquelle ils sont effectivement payés ou inscrits en compte.

I - Les dividendes

A. Distributions régulières

En principe, les bénéfices subissent une double taxation puisqu'ils sont en premier lieu taxés à l'impôt sur les sociétés au niveau de l'entreprise distributrice, puis au niveau des associés ou actionnaires à l'impôt personnel en cas de distribution. Les distributions régulières sont celles votées par les organes compétents par opposition avec les distributions irrégulières ou déguisées. Les sociétés dont les distributions sont imposables sont celles passibles de l'impôt sur les sociétés, essentiellement sociétés anonymes, sociétés par actions simplifiées, sociétés en commandite par actions et sociétés à responsabilité limitée, et les sociétés de personnes lorsqu'elles ont opté à l'impôt sur les sociétés.

1. Distributions visées par les textes

  • Dividendes et distributions liées : distributions les plus courantes, elles viennent des bénéfices de l'exercice ou des réserves et sont décidées par les assemblées d'associés ou autres, faites en espèce ou en nature (actions) ;
  • Distributions faisant suite à une modification du capital (1) : elles sont plus diverses et peuvent provenir :

- d'une réduction de capital : non imposée lorsqu'elle ne se traduit pas par une répartition du bénéfice au profit des associés, elle donne en revanche lieu à taxation lorsque la réduction occasionne une répartition de bénéfice et donc une attribution de sommes aux associés, sauf à ce que ces sommes puissent être qualifiées de remboursement d'apports ou de primes d'émission ;

- d'un rachat de parts bénéficiaires ou de fondateurs : ces sommes attribuées aux porteurs de parts bénéficiaires ou de fondateurs sont des revenus distribués lorsque le prix de rachat excède la valeur originaire. La remise gratuite d'actions par incorporation de réserves au capital en revanche ne sont pas imposables (2) ;

- d'un amortissement du capital : sauf exception, les sommes correspondantes à cette opération sont considérées comme des revenus distribués ;

- d'une capitalisation de réserves ou de bénéfices : seul le remboursement ultérieur des sommes résultant de l'incorporation de bénéfices ou de réserves au capital ou de l'attribution d'actions ou de parts sociales suite à ladite incorporation est imposable.

  • Boni de liquidation (3) : lorsqu'une société est dissoute, les associés peuvent reprendre en franchise d'impôt leurs apports initiaux. En revanche, les sommes qui excèdent ces apports dites boni de liquidation (apports - actif net) sont taxables en tant que revenus distribués.

2. Mode d'imposition

L'imposition s'effectue en deux temps : (i) prélèvement forfaitaire non libératoire et (ii) impôt sur le revenu l'année suivant le paiement sous déduction du prélèvement initial.

  • Prélèvement forfaitaire non libératoire (4) :

- revenus concernés : ensemble des revenus distribués à des personnes physiques fiscalement domiciliées en France, que les distributions soient régulières ou non. Sont en revanche exclus les revenus pris en compte pour déterminer le bénéfice des entreprises industrielles, commerciales, artisanales, agricoles ou non commerciales, revenus liés à un PEA, revenus distribués par les FCPR, FCPI, SCR, Suir. Noter que les foyers modestes peuvent requérir la dispense de ce prélèvement sous conditions ;

- liquidation et paiement : le prélèvement est calculé sur le montant brut des revenus, et s'élève donc à 12,8 %, déclaré par l'établissement payeur établi en France sur la déclaration n° 2777 accompagnée du paiement et déclaré et acquitté par le contribuable lui-même lorsque l'établissement payeur est établi hors de France au plus tard le 15 du mois suivant le paiement auprès du service des impôts des entreprises de son domicile ou, si l'établissement payeur est dans l'Union Européenne, acquitté par l'établissement payeur mandaté par le contribuable à la direction des impôts des non-résidents ou par le contribuable lui-même auprès de son service des impôts au plus tard le 15 du mois suivant le paiement.

  • Imposition définitive : comme indiqué ci-avant, les contribuables sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % ou, en cas d'option, à l'impôt sur le revenu au barème progressif :

- un abattement de 40 % (5) s'applique en cas d'option pour l'impôt sur le revenu global sur le montant brut des dividendes et revenus assimilés, que la distribution vienne d'une société française ou étrangère soumise à l'IS ou équivalent, du moment que le contribuable est résident fiscal français. Cet abattement s'applique à l'ensemble des revenus distribués dès lors que cette distribution s'adresse à des associés pris en cette qualité, cela concerne donc non seulement les dividendes mais également le boni de liquidation ou encore tout ou partie du remboursement lié à une réduction de capital. En revanche, n'en bénéficient pas les revenus distribués à titre d'avances, prêts ou acomptes aux associés, bénéfices ou revenus de l'article 123 bis du Code Général des Impôts (N° Lexbase : L8449LHE) (entreprises soumises à un régime fiscal privilégié) et dividendes distribués provenant des SIIC ou Sppicav ;

- prélèvement forfaitaire unique : le prélèvement étant un acompte, il est imputable sur l'impôt sur le revenu au titre de l'année au titre de laquelle il a été opéré et l'excédent restituable.

B. Autres distributions

Outre les distributions précitées dites juridiques, d'autres distributions restent imposables en droit fiscal français à l'impôt sur le revenu (prélèvement à la source non libératoire, prélèvement forfaitaire unique ou barème progressif sans abattement de 40 %).

1. Distributions visées

  • Bénéfices réputés désinvestis : les bénéfices ou produits non mis en réserve ou incorporés au capital sont considérés comme des revenus distribués (6)
  • Distributions non prélevées sur les bénéfices (7) : les sommes ou valeurs mises à disposition des associés, même si elles ne sont pas prélevées sur les bénéfices, peuvent être considérés comme des revenus distribués.

2. Cas particuliers

  • Rehaussements de bénéfices : en cas de contrôles fiscaux, les rehaussements de revenus liés à des infractions se traduisant par des désinvestissements des sommes rapportés aux résultats sont des revenus distribués (i.e. recettes dissimulés appréhendés par les associés ou rémunérations excessives). Les sommes réintégrées correspondantes sont donc imposables au niveau de leurs bénéficiaires et majorées de 25 % (8).
  • Rémunérations et distributions occultes (9) : les charges comptabilisées rémunérant des prestations dont le fournisseur n'est pas identifié sont des rémunérations occultes. Les dissimulations de recettes ou prises en charge par la société de dépenses incombant personnellement aux associés et non à la société sont des distributions occultes. Dans les deux cas, les sociétés ne sont pas en mesure de les déduire et elles sont imposées au niveau des associés.
  • Dépenses somptuaires (10) : les dépenses liées à la chasse, la pêche, la navigation de plaisance et résidences de plaisance ne sont, par principe, pas des charges déductibles et sont considérées au niveau des associés comme des revenus distribués et imposés sur 125 % de leur montant. Elles deviennent distributions occultes si les sociétés n'en ont pas déclaré les bénéficiaires dans leurs déclarations.
  • Distributions indirectes (11) : les sommes versées aux associés de la société représentant des rémunérations de prêts, d'un service ou d'une fonction sont légales tant qu'elles sont admises en déduction de l'assiette de la société. Dans les autres cas elles sont considérées comme des revenus distribués (i.e. rémunérations excessives de dirigeants).
  • Avances, prêts ou acomptes aux associés (12) : les sommes mises à disposition des associés par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés sont des revenus distribués tant que l'associé n'est pas à même de prouver le contraire.

C. Cas des bénéficiaires non-résidents

Une retenue à la source s'applique aux revenus distribués par des sociétés françaises à des non-résidents (13) sauf exonération spécifique (i.e. régime des sociétés mères, distributions à certains organismes de placement collectifs). Cette retenue peut néanmoins être supprimée par la convention bilatérale signée par la France s'appliquant le cas échéant. Une retenue s'applique également aux revenus payés dans un ETNC.

  • Revenus soumis à retenue à la source : la retenue s'applique dès lors qu'une société française relevant du régime des sociétés de capitaux verse (i) des revenus distribués ou (ii) des jetons de présence à des personnes physiques ou morales établies hors de France.
  • Exonérations : ne sont pas soumis à cette retenue un certain nombre de revenus, notamment les dividendes dans le régime des sociétés mères et filiales, les produits d'actions et parts sociales distribués par des sociétés françaises à des organisations internationales, Etats souverains ou banques centrales, les distributions à des sociétés de capital-risque, ou les revenus distribués à certains organismes de placement collectifs.
  • Liquidation et paiement de la retenue : le taux de la retenue est fixé à 12,8 % et est opérée normalement par la personne établie en France qui assure le paiement des revenus au moment de leur versement. La retenue peut être effectuée par les personnes morales établies hors de France dans l'Union Européenne qui assurent le paiement de produits de sociétés françaises cotées sur un marché réglementé sous conditions (14).

II - Les produits de placements à revenu fixe

Sont inclus dans cette catégorie de revenus les revenus des placements dits à risque. Ils se retrouvent au sein de plusieurs catégories telles que les obligations et autres titres d'emprunt négociables, les créances, dépôts, cautionnements et comptes courants, bons de caisse, bons de capitalisation. En général le taux de rémunération est fixé au moment de l'investissement et est invariable sur toute la durée du placement.

Tableau récapitulatif des prélèvements opérés sur dividendes

Dividendes perçus en 2017 Dividendes perçus en 2018
En 2017, prélèvement forfaitaire non libératoire de 21 % En 2018,
  • Imposition au barème progressif après abattement de 40 %
  • Imputation du prélèvement forfaitaire non libératoire de 21 %
  • Restitution en cas d'excédent
En 2018, prélèvement forfaitaire non libératoire de 12,8 % En 2019,
  • Prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % ou option globale pour le barème progressif après abattement de 40 %
  • Imputation du prélèvement forfaitaire non libératoire de 12,8 %
  • Restitution en cas d'excédent

Tableau récapitulatif des prélèvements opérés sur les produits de placement à revenu fixe

Produits perçus en 2017 Produits perçus en 2018
En 2017, prélèvement forfaitaire non libératoire de 24 % En 2018,
  • Imposition au barème progressif ou sur option taux forfaitaire de 24 %
  • Imputation du prélèvement forfaitaire non libératoire
  • Restitution en cas d'excédent
En 2018, prélèvement forfaitaire non libératoire de 12,8 % En 2019,
  • Prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % ou, sur option globale, imposition au barème progressif
  • Imputation du prélèvement forfaitaire non libératoire
  • Restitution en cas d'excédent

(1) CGI, art. 112, 1 (N° Lexbase : L5412I3T).
(2) CGI, art. 111, b (N° Lexbase : L2066HL4).
(3) CGI, art. 112, 3°.
(4) CGI, art. 117 quater (N° Lexbase : L9364LHB).
(5) CGI, art. 158, 3-2 à 4 (N° Lexbase : L9347LHN).
(6) CGI, art. 109, 1-1° (N° Lexbase : L2060HLU).
(7) CGI, art. 109, 1-2°.
(8) CGI, art. 158, 7-2°.
(9) CGI, art. 111, c.
(10) CGI, art. 111, e.
(11) CGI, art. 112, 4°.
(12) CGI, art. 111, a.
(13) CGI, arts 119 bis, 2 (N° Lexbase : L9363LHA) et 187 (N° Lexbase : L9342LHH).
(14) CGI, art. 1672, 2 à 4 (N° Lexbase : L1336LGL).
(15) CGI, art. 125 A (N° Lexbase : L9357LHZ).
(16) CGI, art. 125 A, III.
(17) CGI, art. 118 (N° Lexbase : L2103HLH).
(18) CGI, art. 119 (N° Lexbase : L2105HLK).
(19) CGI, arts 124 à 125-00 A.
(20) BOI-RPPM-RCM-20-10-20-70 n°10 (N° Lexbase : X4913ALK).
(21) CGI, art. 1678 bis (N° Lexbase : L0290IWN).
(22) BOI-RPPM-RCM-40-40 n°20 (N° Lexbase : X6975ALW).

newsid:463330

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus