En l'absence de consensus scientifique, le défaut d'un vaccin et le lien de causalité entre celui-ci et une maladie peuvent être prouvés par un faisceau d'indices graves, précis et concordants, tels que la proximité temporelle entre l'administration d'un vaccin et la survenance d'une maladie, l'absence d'antécédents médicaux personnels et familiaux de la personne vaccinée ainsi que l'existence d'un nombre significatif de cas répertoriés de survenance de cette maladie à la suite de telles administrations.
Il n'est en revanche pas possible pour le législateur national ni pour les juridictions nationales d'instituer un mode de preuve par présomptions qui permettrait d'établir automatiquement l'existence d'un lien de causalité dès lors que certains indices concrets prédéterminés seraient réunis. En effet, un tel mode de preuve aurait pour conséquence de porter atteinte à la règle relative à la charge de la preuve prévue par la Directive. Telle est la solution énoncée par la CJUE dans un arrêt rendu le 21 juin 2017 (CJUE, 21 juin 2017, aff. C-621/15
N° Lexbase : A1281WKN ; décision de renvoi de la Cour de cassation : Cass. civ. 1, 12 novembre 2015 n° 14-18.118
N° Lexbase : A4812NW7).
Dans cette affaire, M. X s'était vu administrer un vaccin contre l'hépatite B. M. X a commencé à présenter divers troubles ayant conduit, en novembre 2000, au diagnostic de la sclérose en plaques. M. X est décédé en 2011. Dès 2006, sa famille et lui ont introduit une action en justice contre le laboratoire fabricant pour obtenir réparation du préjudice de M. X. Saisie de l'affaire, la cour d'appel a notamment considéré qu'il n'existait pas de consensus scientifique en faveur de l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination contre l'hépatite B et la survenance de la sclérose en plaques. Jugeant qu'un tel lien de causalité n'avait pas été démontré, elle a rejeté le recours. Saisie d'un pourvoi contre l'arrêt d'appel, la Cour de cassation a demandé à la CJUE si, malgré l'absence d'un consensus scientifique et compte tenu du fait que, selon la Directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux (
N° Lexbase : L9620AUT), il appartient à la victime de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité, le juge peut se baser sur des indices graves, précis et concordants pour établir le défaut d'un vaccin et le lien de causalité entre le vaccin et la maladie. Dans son arrêt de ce jour, la Cour estime comme compatible avec la Directive un régime probatoire qui autorise le juge, en l'absence de preuves certaines et irréfutables, à conclure au défaut d'un vaccin et à l'existence d'un lien causal entre celui-ci et une maladie sur la base d'un faisceau d'indices graves, précis et concordants, dès lors que ce faisceau d'indices lui permet de considérer, avec un degré suffisamment élevé de probabilité, qu'une telle conclusion correspond à la réalité (cf. l’Ouvrage "Droit médical" N° Lexbase : E0410ERM).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable