La lettre juridique n°432 du 17 mars 2011 : Pénal

[Textes] Loppsi 2 : présentation du volet de droit pénal

Réf. : Loi n° 2011-267, 14-03-2011, d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (N° Lexbase : L5066IPC)

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N7499BR8

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par Anne-Lise Lonné, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée

le 17 Mars 2011

A été publiée au journal officiel du 15 mars 2011, la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi 2), qui fixe les orientations de la politique de sécurité d'ici à 2013. Le texte est dense, puisqu'il compte pas moins de 142 articles (sachant qu'une dizaine d'articles a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 N° Lexbase : A2186G9T ; lire N° Lexbase : N7498BR7, pour le volet pénal et N° Lexbase : N7489BRS, pour le volet public). Les moyens sont importants puisque l'on rappellera qu'une enveloppe de 2,5 milliards d'euros est consacrée à la mise en oeuvre de cette loi. Les dispositions en matière pénale sont évidemment très nombreuses. Lexbase Hebdo - édition privée vous propose une présentation de ces dispositions déclinées selon six sections : la lutte contre la cybercriminalité, l'utilisation des nouvelles technologies, la protection des intérêts fondamentaux de la Nation, le renforcement de la lutte contre la criminalité et de l'efficacité des moyens de répression, et la sécurité quotidienne et prévention de la délinquance. Ne sont pas ici abordées les dispositions renforçant la lutte contre l'insécurité routière. 1. Lutte contre la cybercriminalité
  • Du délit d'usurpation d'identité

L'article 2 de la loi du 14 mars 2011 prévoit la création d'un délit d'usurpation d'identité, codifié à l'article 226-4-1 nouveau du Code pénal en vertu duquel le fait d'usurper l'identité d'un tiers ou de faire usage d'une ou plusieurs données de toute nature permettant de l'identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d'autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Cette infraction est punie des mêmes peines lorsqu'elle est commise sur un réseau de communication au public en ligne.

  • Obligation pour les fournisseurs d'accès à internet d'empêcher l'accès aux sites diffusant des images pédopornographiques

L'article 4 de la loi tend à compléter l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (N° Lexbase : L2600DZC) en instaurant, lorsque les nécessités de la lutte contre la diffusion des images ou des représentations de mineurs relevant de l'article 227-23 du Code pénal (N° Lexbase : L8751HWZ) le justifient, pour les fournisseurs d'accès à internet (FAI) une obligation d'empêcher l'accès aux sites diffusant des images pédopornographiques.

  • Extension du délit prévu à l'article 227-24 du Code pénal aux messages de nature "à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger"

L'article 5 de la Loppsi 2 étend l'incrimination prévue à l'article 227-24 du Code pénal (N° Lexbase : L8752HW3), qui punit la fabrication et la diffusion de messages à caractère violent ou pornographique lorsque ces messages sont susceptibles d'être vus ou perçus par un mineur, aux messages de nature "à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger".

Pour rappel, le délit est puni de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

2. Utilisation des nouvelles technologies

2.1. Identification d'une personne par ses empreintes génétiques

  • L'adaptation des sanctions pénales prévues en cas d'utilisation des procédés d'identification par empreintes génétiques sans respecter les conditions légales ou en dehors des cas

L'article 6 de la loi prévoit l'extension de la possibilité d'identifier une personne par ses empreintes génétiques prévue à l'article 16-11 du Code civil (N° Lexbase : L8778G8M) à la recherche de l'identité de personnes décédées.

Parallèlement, l'article 8 vient adapter les sanctions pénales prévues en cas d'utilisation des procédés d'identification par empreintes génétiques sans respecter les conditions légales ou en dehors des cas légaux, pour tenir compte de la création de ce nouveau cas d'identification par l'article 6 de la loi.

L'article 226-27 modifié du Code pénal punit ainsi d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait "de procéder à l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques à des fins médicales ou de recherche scientifique sans avoir recueilli son consentement dans les conditions prévues par l'article 16-11 du Code civil".

Par coordination avec les dispositions adoptées à l'article 5 du texte, qui prévoient la possibilité de recueillir, avec leur consentement, les empreintes génétiques de la parentèle d'une personne disparue, l'article 8 ajoute à cette incrimination le fait de procéder, sans son consentement, "au prélèvement de ses traces biologiques à titre d'ascendant, descendant ou collatéral aux fins de l'établissement, par ses empreintes génétiques, de l'identité d'une personne mentionnée au 3° du même article".

L'article 226-28 modifié du Code pénal concerne, quant à lui, le fait de rechercher l'identification par ses empreintes génétiques d'une personne en dehors des cas prévus à l'article 16-11 du Code civil (militaire décédé au cours d'une opération, recherche à des fins médicales ou scientifiques, ou mesure d'enquête ou d'instruction diligentée lors d'une procédure judiciaire) ou d'une procédure de vérification d'un acte de l'état civil entreprise par les autorités diplomatiques ou consulaires dans le cadre des dispositions de l'article L. 111-6 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L0444IDS).

Dans le même souci de coordination que pour l'article 226-27 du Code pénal, l'article 8 prévoit de punir des mêmes peines la recherche de l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques lorsqu'il ne s'agit pas d'un des nouveaux cas visés au 3° de l'article 16-11 du Code civil dans sa nouvelle rédaction.

  • Enregistrement au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) des traces biologiques recueillies pour l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques

L'article 9 de la loi du 14 mars 2011 a pour objet de permettre l'enregistrement au Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) des empreintes génétiques recueillies dans le cadre des nouvelles dispositions de l'article 16-11 du Code civil.

L'article 706-54 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7377IGC) est ainsi modifié afin de prévoir que le fichier contient les empreintes génétiques recueillies dans le cadre prévu par l'article 16-11 du Code civil pour l'identification des personnes décédées, et pas seulement les "empreintes génétiques issues des traces biologiques" recueillies dans ce cadre.

On relèvera que le texte adopté veille à renforcer les garanties nécessaires pour éviter l'utilisation des données enregistrées à une autre fin que celle pour laquelle elles ont été enregistrées. Alors que le projet de loi initial ne prévoyait un enregistrement distinct de celui des autres empreintes conservées dans le FNAEG que pour les empreintes génétiques des ascendants, descendants et collatéraux des personnes dont l'identification est recherchée, le Sénat a étendu le principe de cet enregistrement distinct à toutes les empreintes ou traces biologiques recueillies dans ce nouveau cadre.

Par ailleurs, le dispositif a été complété afin de prévoir que les empreintes ou traces conservées dans le cadre des nouvelles dispositions de l'article 16-11 du Code civil "sont effacées sur instruction du procureur de la République, agissant soit d'office, soit à la demande des intéressés, lorsqu'il est mis fin aux recherches d'identification qui ont justifié leur recueil".

2.2. Fichiers de police judiciaire

  • Modifications du cadre législatif des fichiers d'antécédents et des fichiers d'analyse sérielle

L'article 11 de la Loppsi 2 vient insérer dans le Code de procédure pénale un nouveau chapitre consacré aux fichiers de police judiciaire comportant deux sections. La première section est relative aux fichiers d'antécédents, la seconde aux fichiers d'analyse sérielle. Ces dispositions, qui créent les nouveaux articles 230-6 à 230-18 du Code de procédure pénale, codifient en les complétant pour partie les articles 21, 21-1 et le I de l'article 23 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, pour la sécurité intérieure (N° Lexbase : L9731A9B).

S'agissant des fichiers d'antécédents judiciaires, l'article 11 permet d'améliorer le contrôle de l'autorité judiciaire sur ces fichiers (STIC et JUDEX, bientôt remplacés par ARIANE). Ce texte prévoit l'instauration d'un magistrat référent chargé de suivre la mise en oeuvre et la mise à jour des fichiers d'antécédents judiciaires.

Par ailleurs, le texte adopté prévoit des garanties aux personnes susceptibles d'être inscrites dans ces traitements.

Le traitement des informations nominatives se fait sous le contrôle du procureur de la République qui peut demander qu'elles soient effacées, complétées ou rectifiées. La rectification pour requalification judiciaire est de droit, sans que la personne concernée n'ait à le demander.

Les décisions de relaxe, d'acquittement, de non-lieu ou de classement sans suite n'emportent pas les mêmes effets sur les informations nominatives contenues dans les fichiers :

- en cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, les données personnelles concernant les personnes mises en cause sont effacées sauf si le procureur de la République en prescrit le maintien auquel cas la décision fait l'objet d'une mention ;

- le principe est inversé pour les décisions de non lieu et, lorsqu'elles sont motivées par une insuffisance de charges, de classement sans suite : ces décisions font l'objet d'une mention sauf si le procureur de la République ordonne l'effacement des données personnelles. Mais, en tout état de cause, elles ne peuvent faire l'objet d'une consultation dans le cadre d'une enquête administrative.

Le procureur de la République doit se prononcer dans un délai d'un mois sur les suites qu'il convient de donner aux demandes d'effacement ou de rectification.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a complété le texte initial du projet de loi afin d'obliger le procureur de la République, lorsqu'il décide le maintien des données personnelles touchant une personne ayant bénéficié d'une décision d'acquittement ou de relaxe devenue définitive, à aviser la personne concernée.

De même, elle a prévu la transmission des décisions d'effacement ou de rectification des informations nominatives prises par le procureur de la République aux responsables de tous les traitements automatisés pour lesquels ces décisions ont des conséquences sur la durée de conservation des données personnelles.

Les fichiers d'analyse sérielle ont pour objet de "rassembler les preuves et d'identifier les auteurs, grâce à l'établissement de liens entre les individus, les événements ou les infractions, des crimes et délits présentant un caractère sériel". Leur cadre juridique a été fixé par la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales (N° Lexbase : L4971HDH).

En l'état du droit, ces traitements ne peuvent concerner que les crimes ou délits portant atteinte aux personnes passibles de plus de cinq ans d'emprisonnement ou portant atteinte aux biens et passibles de plus de sept ans d'emprisonnement. Le nouvel article 230-13 prévoit de déterminer un seuil de peine unique dont le quantum est fixé à cinq ans d'emprisonnement au moins.

Le magistrat référent prévu par le nouvel article 230-9 est également compétent pour la mise en oeuvre et la mise à jour des fichiers d'analyse sérielle.

L'article 11 prévoit également une extension des destinataires des informations contenues dans les fichiers. Actuellement, peuvent accéder aux fichiers les personnels spécialement habilités et individuellement désignés de police et de gendarmerie nationale ainsi que les magistrats du parquet et les magistrats instructeurs pour les recherches relatives aux infractions dont ils sont saisis. Le nouvel article 230-16 propose d'élargir cette liste aux agents des douanes spécialement habilités et individuellement désignés à l'occasion des enquêtes dans les différents domaines qui leur sont confiés par l'article 28-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0748IKW).

  • Création de logiciels de rapprochement judiciaire

L'article 14 de la Loppsi 2, qui crée de nouveaux articles 230-20 à 230-27 dans le Code de procédure pénale, autorise la création de logiciels de rapprochement judiciaire permettant aux enquêteurs d'opérer des rapprochements entre différentes affaires dont sont saisis les services de police judiciaire, afin d'améliorer le taux d'élucidation, notamment en matière de petite et de moyenne délinquance. Ces dispositions autorisent ainsi la mise en oeuvre, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, de logiciels d'aide à l'exploitation et au rapprochement d'informations sur les modes opératoires réunies par les services de police judiciaire au cours, d'une part, des enquêtes préliminaires, des enquêtes de flagrance ou des investigations exécutées sur commission rogatoire, d'autre part, des procédures de recherche des causes de la mort ou d'une disparition prévues par les articles 74 (N° Lexbase : L2348IEP) et 74-1 (N° Lexbase : L1637A7R) du Code de procédure pénale.

Le dispositif prévoit un certain nombre de garanties destinées à encadrer le recours aux logiciels de rapprochement, ayant trait, à la teneur des informations traitées, à la durée de conservation des données à caractère personnel révélées par l'exploitation des enquêtes et investigations, au contrôle du dispositif, et enfin aux utilisateurs des logiciels.

3. Protection des intérêts fondamentaux de la Nation

  • Protection des agents des services de renseignement

L'article 27 de la loi instaure un régime de protection juridique pour les agents de renseignement, leurs sources et leurs collaborateurs.

Ce texte autorise, notamment l'usage d'une identité d'emprunt par les agents des services de renseignement et vise à protéger l'identité de ces agents dans le cadre des procédures judiciaires.

Un nouvel article 413-13 introduit dans le Code pénal prévoit ainsi l'incrimination de la révélation d'une identité d'emprunt ou de l'identité réelle de l'agent de renseignement.

A noter que le Sénat a jugé préférable de ne pas pénaliser la simple "désignation" d'une personne comme appartenant aux services de renseignement. Il lui a semblé préférable de viser la "révélation" de toute information susceptible de conduire, directement ou indirectement, à l'identification réelle ou supposée d'une personne comme source ou collaborateur occasionnel d'un service spécialisé de renseignement.

4. Renforcement de la lutte contre la criminalité et de l'efficacité des moyens de répression

  • Nouvelle technique d'investigation contre les auteurs de messages faisant l'apologie d'actes terroristes sur internet

L'article 34 de la loi du 14 mars 2011 vise à étendre aux actes de provocation au terrorisme ou d'apologie d'actes terroristes le champ d'une forme d'investigation nouvelle, introduite par la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007, relative à la prévention de la délinquance (N° Lexbase : L6035HU3). Cette loi avait inséré dans le Code de procédure pénale les articles 706-35-1 (N° Lexbase : L8665HWT) et 706-47-3 (N° Lexbase : L8671HW3) autorisant la mise en oeuvre d'une nouvelle forme d'investigation pour certaines infractions commises par un moyen de communication électronique. Plus récemment, l'article 59 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010, relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne (N° Lexbase : L0282IKN), a mis en place un dispositif analogue de "cyberpatrouilles" pour constater les infractions commises à l'occasion de paris ou de jeux d'argent ou de hasard en ligne et en rechercher les auteurs.

S'inspirant de ces deux modèles, l'article 34 de la loi introduit un nouvel article 706-25-2 au sein du Code de procédure pénale qui vise les infractions mentionnées au sixième alinéa de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (N° Lexbase : L7589AIW), et punit de cinq ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, notamment par tout moyen de communication au public par voie électronique, de provoquer directement aux actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du Code pénal ou d'en faire l'apologie.

Dans le but de constater une telle infraction lorsqu'elle est commise par un moyen de communication électronique, les officiers ou agents de police judiciaire affectés dans un service spécialisé à cet effet pourront procéder à un certain nombre d'actes sans être pénalement responsables, à la condition expresse que ces actes ne constituent pas une incitation à commettre ces infractions. Ces actes sont les suivants : participer sous un pseudonyme aux échanges électroniques ; être en contact par un moyen de communication électronique avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ;extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur ces personnes.

  • Allongement de la durée des interceptions téléphoniques pour les infractions relevant de la criminalité organisée et possibilité de réaliser des écoutes pour une durée d'un mois renouvelable une fois

L'article 35 de la loi modifie l'article 706-95 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5776DYL) afin de prévoir l'allongement de la durée des interceptions téléphoniques pour les infractions relevant de la criminalité organisée et la possibilité de réaliser des écoutes pour une durée d'un mois renouvelable une fois.

  • Possibilité de recourir à la captation à distance de données informatiques dans les affaires de criminalité organisée

L'article 36 de la Loppsi 2, qui insère de nouveaux articles 706-102-1 à 706-102-9 dans le Code de procédure pénale, crée la possibilité de recourir à la captation à distance de données informatiques dans les affaires de criminalité organisée.

Le dispositif est basé sur une double autorisation : une autorisation de principe subordonnée, sur le fond, aux "nécessités de l'information" et, sur la forme, à une ordonnance motivée du juge d'instruction. Par ailleurs, des autorisations spéciales sont nécessaires afin de mettre en place le dispositif de captation dans un véhicule ou dans un lieu privé à l'insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l'occupant des lieux ou de toute personne titulaire d'un droit sur celui-ci.

S'agissant des délais, les décisions du juge d'instruction tendant à la mise en place d'un dispositif de captation ne peuvent être prises que pour une durée maximale de quatre mois.

La captation est interdite dans le véhicule, le bureau ou le domicile d'un parlementaire, d'un avocat ou d'un magistrat, dans les locaux d'une entreprise de presse ou de communication audiovisuelle ainsi que dans le cabinet d'un médecin, d'un notaire, d'un avoué ou d'un huissier.

Les opérations de mise en place du dispositif de captation ainsi que les opérations de captation des données informatiques font l'objet d'un procès-verbal dressé par le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui. Ces procès-verbaux mentionnent la date et l'heure auxquelles l'opération a commencé et celles auxquelles elle s'est terminée. Les enregistrements sont placés sous scellés fermés.

  • Peines minimales applicables aux auteurs de violences volontaires aggravées :

L'article 37, issu d'un amendement adopté par le Sénat, insère un nouvel article 132-19-2 dans le Code de procédure pénale qui a pour but d'étendre aux primo-délinquants ayant commis des violences aggravées, le dispositif des "pleines planchers", qui ne sont à l'heure actuelle applicables qu'en cas de récidive. Le seuil est de 18 mois, si le délit est puni de sept ans d'emprisonnement, et de deux ans, si le délit est puni de dix ans d'emprisonnement.

Le II de l'article 37 qui prévoyait d'étendre aux mineurs l'application de peines minimales "plancher", applicables aux primo-délinquants, a été censuré par le Conseil constitutionnel qui a jugé ces dispositions contraires aux exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs.

  • Allongement de la durée de période de sûreté pour les auteurs de meurtre ou d'assassinat à l'encontre des personnes dépositaires de l'autorité publique

Actuellement, aux termes de l'article 132-23 du Code pénal (N° Lexbase : L3750HGY), la période de sûreté peut être portée par décision spéciale de la cour d'assises ou du tribunal jusqu'aux deux tiers de la peine ou, s'il s'agit d'une condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, jusqu'à 22 ans.

Toutefois, en vertu des articles 221-3 (N° Lexbase : L2148AMI) et 221-4 (N° Lexbase : L7211IMZ) du même code, lorsque le meurtre ou l'assassinat est précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie, et que la victime est un mineur de 15 ans, la cour d'assises peut, par décision spéciale, soit porter la période de sûreté jusqu'à 30 ans, soit, si elle prononce la réclusion criminelle à perpétuité, décider qu'aucun aménagement de peine ne pourra être accordé au condamné.

Le caractère incompressible de la peine connaît cependant un tempérament (C. pr. pén., art 720-4 N° Lexbase : L5647DYS). Lorsque la période de sûreté couvre la totalité d'une réclusion criminelle à perpétuité, le tribunal de l'application des peines peut accorder, après une expertise réalisée par un collège de trois experts médicaux, une mesure d'aménagement de peine si le condamné a subi une incarcération d'une durée au moins égale à trente ans.

L'article 38 de la loi du 14 mars 2011 prévoit désormais l'application des dispositions particulières des articles 221-3 et 221-4 du Code pénal aux meurtres ou assassinats commis à l'encontre d'un "magistrat, d'un fonctionnaire de la police nationale, d'un militaire de la gendarmerie, d'un membre du personnel de l'administration pénitentiaire ou de tout autre personne dépositaire de l'autorité publique, à l'occasion de l'exercice ou en raison de ses fonctions".

  • Extension du champ d'application de la surveillance judiciaire et d'un placement sous surveillance électronique mobile aux personnes condamnées à une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure ou égale à cinq ans en état de nouvelle récidive

Depuis la loi n° 2010-242 du 10 mars 2010 tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle (N° Lexbase : L6994IG7), le tribunal de l'application des peines peut, s'agissant d'une personne qui a été condamnée à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à sept ans pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, sur réquisitions du procureur de la République, ordonner à titre de mesure de sûreté et aux seules fins de prévenir une récidive dont le risque paraît élevé, qu'elle sera placée sous surveillance judiciaire dès sa libération et pendant une durée qui ne peut excéder celle correspondant au crédit de réduction de peine et aux réductions de peines supplémentaires dont elle a bénéficié et qui n'ont pas fait l'objet d'une décision de retrait. Le risque de récidive doit être constaté par une expertise médicale ordonnée par le juge de l'application des peines. En cas d'inobservation par le condamné des obligations et interdictions qui lui ont été imposées, ce magistrat peut retirer tout ou partie de la durée des réductions de peine dont a bénéficié le condamné et ordonner sa réincarcération. L'ensemble de ces dispositions ne sont pas applicables si la personne a été condamnée à un suivi socio-judiciaire ou si elle fait l'objet d'une libération conditionnelle (C. pr. pén., art. 723-29 et s. N° Lexbase : L7498IGS).

L'article 40 de la loi du 14 mars 2011 élargit le champ de ces dispositions afin de permettre également de placer sous surveillance judiciaire une personne qui a été condamnée à une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure ou égale à cinq ans pour un crime ou un délit commis une nouvelle fois en état de récidive légale (c'est-à-dire commis pour une troisième fois). Ces personnes peuvent notamment être, désormais, placées sous surveillance électronique mobile (application de l'article 723-30 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7382IGI).

Lors de l'examen du texte en seconde lecture, la commission des lois de l'Assemblée nationale a souhaité compléter dans le même sens les dispositions relatives au placement sous surveillance électronique mobile des personnes condamnées à une peine de suivi socio-judiciaire (qui est une peine complémentaire, à la différence de la surveillance judiciaire qui est une modalité d'exécution de la peine). Alors qu'un tel placement n'était à l'heure actuelle possible que lorsque la personne majeure a été condamnée à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à sept et dont une expertise médicale a constaté la dangerosité, il peut désormais l'être également lorsque la personne a été condamnée pour un crime ou un délit commis une nouvelle fois en état de récidive légale, d'une durée égale ou supérieure à cinq ans.

5. Sécurité quotidienne et prévention de la délinquance

  • Aggravation des peines encourues en cas de vol commis à l'encontre de personnes vulnérables et de cambriolage

L'article 47 de la Loppsi, qui résulte d'un amendement inséré par la commission des lois de l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, tend à aggraver les peines encourues en cas de vol commis à l'encontre d'une personne vulnérable et en cas de cambriolage.

1. Les vols commis à l'encontre de personnes vulnérables

A l'heure actuelle, lorsque la victime est une personne particulièrement vulnérable, en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, et que cette vulnérabilité est apparente ou connue de l'auteur de l'infraction, le vol est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, en l'absence de circonstance aggravante supplémentaire (C. pén., art. 311-4 du Code pénal N° Lexbase : L6107IGB).

L'article 311-5 du Code pénal (N° Lexbase : L1776AMQ) punit quant à lui de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende le vol précédé, accompagné ou suivi de violences sur autrui ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant huit jours au plus.

L'article 47 de la loi tend à élever les peines encourues lorsque le vol est commis sur une personne vulnérable : désormais, une telle infraction, qui figure à l'article 311-5 du Code pénal, est punie de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende.

2. Les cambriolages

A l'heure actuelle, le cambriolage, défini juridiquement comme un vol "commis dans un local d'habitation ou dans un lieu utilisé ou destiné à l'entrepôt de fonds, valeurs, marchandises ou matériels, en pénétrant dans les lieux par ruse, effraction ou escalade", est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, en l'absence de circonstance aggravante supplémentaire (C. pén., art. 311-4).

En revanche, lorsqu'il est accompli sans ruse, effraction ni escalade (par exemple, lorsque la porte du domicile était ouverte), le cambriolage est assimilé à un vol "simple".

L'article 47 de la loi modifie les articles 311-4 et 311-5 du Code pénal afin d'opérer une distinction entre les cambriolages opérés sans ruse, effraction ni escalade, et ceux opérés dans de telles circonstances : dans le premier cas, le vol commis dans un local d'habitation ou dans un lieu utilisé ou destiné à l'entrepôt de fonds, valeurs, marchandises ou matériels sans recours à un stratagème particulier pour pénétrer dans les lieux est désormais puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, tandis que le vol commis dans ces mêmes lieux en pénétrant dans les lieux par ruse, effraction ou escalade est quant à lui puni de sept ans d'emprisonnement, en application de dispositions insérées à l'article 311-5 du Code pénal.

Par ailleurs, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende en cas de cumul de deux circonstances prévues à l'article 311-5, ou lorsque le vol commis dans les conditions visées à l'article 311-5 du Code pénal l'est également dans l'une des circonstances prévues par l'article 311-4 du Code pénal.

Ainsi, par exemple, un cambriolage commis sans effraction à l'encontre d'une personne vulnérable serait désormais puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende.

3. Peine complémentaire d'interdiction de séjour

Enfin, l'article 311-14, 5° du Code pénal (N° Lexbase : L2478IBE) est modifié afin de prévoir que les personnes reconnues coupables d'un vol commis dans les conditions prévues à l'article 311-5 du Code pénal peuvent être également condamnées à une interdiction de séjour.

La peine d'interdiction de séjour, dont le régime est défini par l'article 131-31 du Code pénal (N° Lexbase : L2042AML), emporte défense de paraître dans certains lieux déterminés par la juridiction. Elle comporte également des mesures de surveillance et d'assistance. En matière délictuelle, elle est prononcée pour une durée de cinq ans au plus.

  • Report du point de départ de la prescription pour certaines infractions commises à l'encontre d'une personne vulnérable

L'article 48 de la loi du 14 mars 2011 tend à expliciter dans la loi les principes applicables en matière de prescription des délits commis contre des personnes vulnérables.

En matière de délits, la prescription de l'action publique est de trois ans révolus (C. pr. pén., art. 8 N° Lexbase : L2877HIE). La seule exception à ce principe concerne certains délits particulièrement graves commis contre des mineurs (violences graves, agressions sexuelles, prostitution, etc.), pour lesquels le délai de prescription a été porté à dix ou vingt ans selon le délit, le délai ne commençant à courir, en outre, qu'à partir de la majorité de la victime.

Toutefois, s'agissant des infractions occultes ou dissimulées, la jurisprudence considère que le point de départ du délai de prescription ne court qu'à partir du jour où l'infraction est révélée.

L'article 48 modifie l'article 8 du Code de procédure pénale afin d'inscrire cette jurisprudence dans la loi pour certains délits strictement énumérés (abus de l'état d'ignorance ou de faiblesse, de vol, d'escroquerie, abus de confiance, de recel mais également détournement de gage) commis contre une personne vulnérable.

A noter que la modification, dans le même sens, des dispositions relatives à la prescription des crimes se traduisant par la disparition d'un enfant, n'a finalement pas été retenue.

  • Entrave aux débats d'une assemblée parlementaire ou de l'assemblée délibérante d'une collectivité territoriale

L'article 49 de la loi étend le champ du délit d'entrave à l'exercice des libertés d'expression, du travail, d'association, de réunion ou de manifestation, prévu à l'article 431-1 du Code pénal, aux faits d'entrave au déroulement des débats d'une assemblée parlementaire ou d'un organe délibérant d'une collectivité territoriale.

  • Délit de distribution d'argent à des fins publicitaires sur la voie publique

L'article 50 de la loi, qui résulte d'un amendement du Gouvernement inséré dans le projet de loi par la commission des lois de l'Assemblée nationale, crée deux nouveaux articles 431-29 et 431-30 dans le Code pénal instaurant un délit de distribution d'argent à des fins publicitaires sur la voie publique.

Le nouvel article 431-29 distingue deux hypothèses :

- la distribution sur la voie publique, à des fins publicitaires, de pièces de monnaie ou de billets de banque ayant cours légal, d'une part, qui est punie de six mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. Cette dernière peine peut toutefois être portée au double des sommes ayant été distribuées ;

- le fait d'annoncer publiquement, par tout moyen, qu'il sera procédé sur la voie publique, à des fins publicitaires, à la distribution de pièces de monnaie ou de billets de banque ayant cours légal, d'autre part, qui est puni de trois mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

Le nouvel article 431-30 dispose quant à lui que les personnes morales reconnues coupables de l'une de ces infractions encourent une amende d'un montant cinq fois supérieur à celle encourue par les personnes physiques (conformément au principe posé à l'article 131-38 du Code pénal) ainsi que l'affichage ou la diffusion de la décision de condamnation dans la presse écrite ou sur internet.

  • Correctionnalisation de l'infraction de "vente à la sauvette" et création d'un délit d'exploitation de la vente à la sauvette

Les articles 51 et 52 de la Loppsi 2, insérés par la commission des lois de l'Assemblée, tendent à mieux prévenir le phénomène des "ventes à la sauvette" en élevant au rang de délit l'infraction de vente à la sauvette et en créant un délit d'exploitation de vente à la sauvette.

Tout d'abord, l'article 51 qui crée de nouveaux articles 446-1 à 446-4 dans le Code pénal tend à correctionnaliser l'infraction de vente à la sauvette, qui est désormais punie de six mois d'emprisonnement et d'une amende de 3 750 euros. Lorsqu'elle est accompagnée de voies de fait ou de menaces ou lorsqu'elle est commise en réunion, cette infraction est punie d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 15 000 euros. Les personnes physiques reconnues coupables de "vente à la sauvette" dans ces conditions peuvent voir confisquée ou détruite la chose qui est l'instrument ou le produit de l'infraction. Enfin, les personnes morales encourent quant à elles une amende d'un montant cinq fois supérieur à l'amende encourue par les personnes physiques ainsi que l'ensemble des peines prévues à l'article 131-39 du Code pénal (N° Lexbase : L7261IMU).

L'article 52 de la loi crée, ensuite, s'inspirant des dispositions relatives au proxénétisme et à l'exploitation de la mendicité, un délit d'exploitation de la vente à la sauvette, qui est défini comme "le fait par quiconque d'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de l'inciter à commettre l'une des infractions [de vente à la sauvette visées par l'article 446-1 nouveau du Code pénal], ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle commette l'une de ces infractions ou continue de le faire, afin d'en tirer profit de quelque manière que ce soit", et qui est prévu aux articles 225-12-8 à 225-12-10 nouveaux du Code pénal.

Est assimilé à l'exploitation de la vente à la sauvette le fait de recevoir des subsides d'une personne se livrant de façon habituelle à la vente à la sauvette.

Est également assimilé à l'exploitation de la sauvette le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en exerçant une influence de fait, permanente ou non, sur une ou plusieurs personnes se livrant de façon habituelle à la vente à la sauvette, ou en étant en relation habituelle avec cette ou ces dernières.

L'exploitation de la vente à la sauvette est punie de trois ans d'emprisonnement et d'une amende de 45 000 euros.

Ces peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende lorsque l'exploitation est commise à l'égard d'un mineur ; à l'égard d'une personne vulnérable ; à l'égard de plusieurs personnes ; à l'égard d'une personne qui a été incitée à se livrer à la vente à la sauvette soit hors du territoire de la République soit à son arrivée sur le territoire de la République ; par un ascendant du vendeur à la sauvette, ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ; avec l'emploi de la contrainte, de violences ou de manoeuvres dolosives sur cette personne, sur sa famille ou sur une personne étant en relation habituelle avec elle ; par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteurs ou de complices, sans qu'elles constituent une bande organisée.

Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1 500 000 euros d'amende lorsque l'exploitation de la vente à la sauvette est commise en bande organisée.

Les personnes reconnues coupables d'exploitation de vente à la sauvette dans les conditions précitées encourent également un certain nombre de peines complémentaires, énumérées à l'article 225-20 du Code pénal (N° Lexbase : L2496IB3).

Enfin, les personnes de nationalité étrangère reconnues coupables d'exploitation de la vente à la sauvette peuvent être condamnées à une interdiction du territoire français, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus.

  • Possibilité pour les enquêteurs de pénétrer dans un domicile pour l'exécution d'une demande d'extradition ou d'un mandat d'arrêt européen

L'article 54 de la loi du 14 mars 2011 a pour but de permettre aux agents chargés de l'exécution d'une demande d'extradition ou d'un mandat d'arrêt européen de pénétrer aux heures légales dans un domicile afin d'appréhender la personne concernée.

A l'heure actuelle, l'article 134 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L5541DYU) autorise l'agent chargé de l'exécution d'un mandat d'amener, d'un mandat d'arrêt ou d'un mandat de recherche à s'introduire au domicile d'un citoyen entre six heures et vingt-et-une heures. Dans ce cas, cet agent peut se faire accompagner d'une force suffisante pour que la personne ne puisse se soustraire à la loi.

L'article 54 vient compléter le premier alinéa de l'article 134 afin d'étendre expressément ces dispositions à l'exécution des demandes d'extradition et des mandats d'arrêt européens, en vue d'éviter tout risque d'interprétation restrictive de la loi.

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