Une réglementation nationale permettant la révocation d'un membre d'un comité de direction, sans restriction, pour cause de grossesse ou pour une cause fondée, essentiellement, sur cet état, est illicite. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 11 novembre 2010 (CJUE, 11 novembre 2010, aff. C-232/09
N° Lexbase : A4175GGQ).
Dans cette affaire, la société Y a nommé, par décision du 21 décembre 2006, Mme X, la requérante, en tant que membre unique de son comité de direction. Le 23 juillet 2007, l'assemblée des associés a décidé de révoquer Mme X de ses fonctions de membre du comité de direction. Estimant avoir été illégalement révoquée de ses fonctions, Mme X a engagé un recours devant le tribunal d'arrondissement du centre de la ville de Riga contre la société Y, le 31 août 2007. Pour elle, sa révocation était intervenue en violation du Code du travail letton, relatif à l'interdiction de licenciement des travailleuses enceintes, dès lors qu'elle était dans sa onzième semaine de grossesse au moment du licenciement. Le recours ayant été rejeté tant en première instance qu'en appel, Mme X a introduit un pourvoi en cassation devant la juridiction de renvoi, l'"Augstakas Tiesas Senats". Cette dernière juridiction a alors décidé de surseoir à statuer et a posé à la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles afin de savoir, si un membre d'un organe d'une société de capitaux doit être considéré comme un "
travailleur" au sens du droit communautaire, et si l'article 224 du Code de commerce letton, permettant la révocation d'un membre du comité de direction d'une société de capitaux sans prise en compte notamment de l'état de grossesse de ce membre, n'est pas incompatible avec l'article 10 de la Directive 92/85/CEE du 19 octobre 1992 (
N° Lexbase : L7504AUH). Pour la Cour, "
un membre d'un comité de direction d'une société de capitaux, fournissant des prestations à cette dernière et faisant partie intégrante de celle-ci, doit être considéré comme ayant la qualité de travailleur aux fins de la Directive 92/85/CEE". En outre, "
la révocation d'un membre d'un comité de direction d'une société de capitaux sans restriction [...]
pour cause de grossesse ou pour une cause fondée essentiellement sur cet état ne peut concerner que les femmes et constitue, dès lors, une discrimination directe fondée sur le sexe, contraire à la Directive 76/207/CEE du 9 février 1976 (
N° Lexbase : L9232AUH)
, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles et les conditions de travail" (sur l'étendue de l'interdiction générale de licencier une femme enceinte, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3332ETL).
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