Réf. : Cass. soc., 18 novembre 2009, n° 09-65.639, Société Herta, F-P+B (N° Lexbase : A1737EPZ)
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par Philippe Clément, Avocat Associé Fromont, Briens & Associés
le 07 Octobre 2010
Résumé La loi du 20 août 2008 (1) ayant conféré aux organisations syndicales non représentatives dans une entreprise la faculté d'y créer une section syndicale et d'y désigner un représentant de la section, l'organe interne de l'organisation habilité à désigner des représentants syndicaux dans les entreprises est, tant que les statuts ne l'ont pas expressément exclu, habilité à désigner un représentant de section syndicale. |
"chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1 (N° Lexbase : L3761IBW), une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement de cinquante salariés ou plus peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement".
Le syndicat non représentatif doit disposer d'une section syndicale, ce qui implique qu'il remplisse les conditions posées par la loi pour la constitution d'une telle section, à savoir, notamment, l'existence préalable de plusieurs adhérents dans l'entreprise ou l'établissement.
L'article L. 2142-1 dispose, en effet : "dès lors qu'ils ont plusieurs adhérents dans l'entreprise ou l'établissement [...]".
Comme de nombreux commentateurs l'ont relevé, il s'agit là d'une exigence nouvelle, puisque préalablement à la nouvelle loi, la jurisprudence considérait que l'existence d'une section syndicale était établie par la seule désignation d'un délégué syndical.
Au regard de la jurisprudence, nous pouvons considérer que, sauf stipulation contraire des statuts, une union de syndicats à laquelle la loi reconnaît la même capacité civile qu'aux syndicats eux-mêmes, peut exercer les droits conférés à ceux-ci (2).
La Cour de cassation a indiqué récemment qu'une union pouvait désigner un représentant de section syndicale (3), cette possibilité étant, toutefois, conditionnée par le fait que ladite union remplisse les conditions prévues par la loi.
Il convient, à ce stade, de revenir sur les éléments distinctifs entre une union de syndicats, d'une part, et un syndicat professionnel, d'autre part.
- Selon l'article L. 2131-1 du Code du travail (N° Lexbase : L2109H9Y), "les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l'étude et la défense des droits ainsi que les intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu'individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts".
- L'article L. 2131-2 (N° Lexbase : L2110H9Z), quant à lui, dispose que "les syndicats ou associations professionnelles de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des métiers connexes, concourant à l'établissement de produits déterminés ou la même profession libérale, peuvent se constituer librement".
Il résulte de ces textes que seul un professionnel, personne physique, peut être membre d'un syndicat.
- Les dispositions des article L. 2133-1 (N° Lexbase : L2129H9Q), chapitre 2 et chapitre 3 du titre troisième du Code du travail régissent le statut juridique des unions de syndicats.
Ainsi, l'article L. 2133-2 du Code du travail (N° Lexbase : L2131H9S) prévoit que "les unions de syndicats sont soumises aux dispositions des articles L. 2131-1 (N° Lexbase : L2109H9Y), L. 2131-3 (N° Lexbase : L2112H94) à L. 2131-5, L. 2141-1 (N° Lexbase : L6059IAN) et L. 2141-2 (N° Lexbase : L2147H9E). Elles font connaître le nom et le siège social des syndicats qui la composent. Leurs statuts déterminent les règles selon lesquelles les syndicats adhérents à l'union sont représentés dans le conseil d'administration et dans les assemblées générales".
Il résulte de ce texte que les unions de syndicats ne peuvent avoir comme adhérents que des syndicats, personnes morales, et non des personnes physiques.
Enfin, l'article L. 2143-3 du Code du travail (N° Lexbase : L3719IBD) reconnaît aux unions de syndicats les mêmes droits que ceux conférés aux syndicats professionnels et cela exclusivement par le titre troisième du Code du travail, à savoir "Statut juridique, ressources et moyens".
Dans l'arrêt du 8 juillet 2009 (4), ainsi que dans l'arrêt du 18 novembre 2009, la Cour de cassation prend soin de relever que l'union syndicale avait plusieurs adhérents dans l'entreprise.
Ce constat soulève une autre interrogation, à savoir la conformité des statuts dudit syndicat au regard des dispositions légales.
En effet, une union de syndicats peut-elle prévoir la possibilité d'adhésion de personnes physiques dans le cadre de ses statuts ?
A priori, au regard des dispositions légales, la réponse doit être négative.
Un tel raisonnement aurait pour conséquence de permettre le non-respect de certaines dispositions issues de la nouvelle loi.
Ainsi, par exemple, un syndicat d'entreprise qui ne compterait qu'un an d'ancienneté (ne pouvant pas, de ce fait, désigner de représentant de section syndicale) pourrait alors le faire indirectement par le biais de son union d'appartenance, si cette dernière existe depuis plus de deux ans...
Les positions des tribunaux d'instance sur cette question sont très partagées.
Plusieurs tribunaux d'instance, notamment, Rambouillet (16 décembre 2008), Lyon (22 juillet 2009), Saint-Denis (24 juillet 2009), Martigues (8 septembre 2009) relèvent que, dès lors que l'union ou la fédération sont composées exclusivement de syndicats, elles ne peuvent en aucun cas justifier d'adhérents personnes physiques.
D'autre considèrent, comme le tribunal d'instance de Versailles (17 novembre 2009) que les unions peuvent justifier d'adhérents, soit directement, soit par l'intermédiaire des syndicats qui leur sont affiliés.
La Cour de cassation devrait se prononcer prochainement sur cette question, sachant que si la justification de l'adhésion indirecte était admise, cela ne manquerait pas de soulever de nombreuses difficultés pratiques (preuve et décompte des adhérents indirects, preuve de l'adhésion du syndicat à l'union, ancienneté de deux ans, etc.).
Décision Cass. soc., 18 novembre 2009, n° 09-65.639, Société Herta, F-P+B (N° Lexbase : A1737EPZ) TI Illkirch Graffenstaden, contentieux des élections professionnelles, 16 mars 2009 Texte visé : loi n° 2008-789 du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (N° Lexbase : L7392IAZ) Mots clés : union syndicale ; représentant de la section syndicale ; désignation Lien base : (N° Lexbase : E1826ETS) |
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