La lettre juridique n°353 du 4 juin 2009 : Sécurité sociale

[Textes] Indemnisation de l'activité partielle de longue durée, réactivation du "Trild"

Réf. : Décret n° 2009-478 du 29 avril 2009, relatif à l'activité partielle de longue durée (N° Lexbase : L1391IEA)

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N6390BKU

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"

le 07 Octobre 2010

A situation économique de crise, réponse de crise : après avoir réformé, fin 2008, le dispositif du chômage partiel, partenaires sociaux et pouvoir réglementaire viennent (1), début 2009, d'élargir les outils mis à la disposition des employeurs connaissant des difficultés économiques, destinés à préserver les emplois et les dissuader de prononcer des licenciements. Le décret n° 2009-478 du 29 avril 2009 met, ainsi, en place un nouveau dispositif, "l'activité partielle de longue durée", visant à permettre une meilleure indemnisation des salariés subissant une réduction d'activité en dessous de la durée légale du travail pendant une période de longue durée. La mesure, financée partiellement par l'Etat et par l'organisme gestionnaire du régime de l'assurance chômage, n'est ni originale, ni inédite, puisqu'elle reprend les grandes lignes de l'ancien dispositif du "temps réduit indemnisé de longue durée" ("Trild") inutilisé par les entreprises et non financé par l'Etat depuis 1996, mais encore présent dans le Code du travail (C. trav., art. L. 5122-2, 2° N° Lexbase : L2043H9K et art. D. 5122-43 N° Lexbase : L1427IEL à D. 5122-50). Lancé en 1993 (2), le "temps réduit indemnisé de longue durée" (3) permettait à une entreprise de surmonter des difficultés économiques passagères (baisse prolongée des commandes, trésorerie défaillante...). L'idée était d'éviter des licenciements en réduisant la masse salariale pendant une période allant de douze à dix-huit mois. Le temps de travail des salariés était réduit et leur salaire aussi. La baisse de salaire était partiellement compensée par l'Etat et le régime d'assurance-chômage. Or, la convention passée entre l'Etat et l'Unedic pour faire fonctionner le "Trild" expirait le 31 décembre 1996 et n'a pas été renouvelée.

L'une des explications avancées pour comprendre l'arrêt du financement par les pouvoirs publics du "Trild" tient à la difficile articulation avec le chômage partiel, dispositif concurrent et reposant sur les mêmes principes et modalités. Ces analyses, défendues par les économistes (4), sont-elles encore pertinentes alors même que la conjoncture économique est différente ? Après avoir synthétisé le régime du dispositif mis en place par le décret n° 2009-478 (I), il peut être utile de mettre ce nouveau dispositif en perspective, en le confrontant avec les autres mesures destinées à éviter les licenciements (II).

I - Prévention des licenciements économiques par l'indemnisation de l'activité partielle de longue durée

A - Conditions et mise en place de l'indemnisation de l'activité partielle de longue durée

1 - Conclusion d'une convention

  • Conclusion d'une convention

Les conventions d'activité partielle (C. trav., art. D. 5122-43) sont conclues entre une organisation professionnelle ou interprofessionnelle ou une entreprise et le ministre chargé de l'Emploi ou le préfet ou, par délégation de celui-ci, par le directeur départemental du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle (C. trav., art. D. 5122-45, nouv. N° Lexbase : L1402IEN).

Au titre du "Trild", il était exigé que des conventions soient conclues entre l'entreprise et le ministre chargé de l'Emploi ou le préfet ou, par délégation de celui-ci, par le directeur départemental du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle (C. trav., art. D. 5122-45, anc. N° Lexbase : L2768IAR). Elles étaient soumises aux règles de consultation, prévues par l'article R. 5111-5 du Code du travail (N° Lexbase : L3009IAP), selon lesquelles les conventions mentionnées à l'article R. 5111-1 (N° Lexbase : L3020IA4), à l'exception de celles conclues à l'occasion d'un projet de licenciement de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, sont soumises, avant leur conclusion, pour avis : 1° à la commission permanente du Conseil national de l'Emploi lorsqu'elles relèvent de la compétence du ministre chargé de l'Emploi ; 2° au comité de coordination régional de l'Emploi et de la Formation professionnelle lorsqu'elles relèvent de la compétence du préfet de région ; 3° à la commission départementale de l'Emploi et de l'Insertion lorsqu'elles relèvent de la compétence du préfet.

  • Durée de la convention

La convention d'activité partielle pour les salariés subissant une réduction d'activité en dessous de la durée légale pendant une période de longue durée (C. trav., art. L. 5122-2, 2° N° Lexbase : L2043H9K) peut être conclue pour une période de trois mois minimum renouvelable sans que la durée totale puisse excéder douze mois (C. trav., art. D. 5122-43, nouv. N° Lexbase : L1427IEL).

Le régime juridique du "Trild" prévoyait (C. trav., art. D. 5122-43 N° Lexbase : L2774IAY) qu'une convention de temps réduit indemnisé de longue durée pouvait être conclue pour une période de douze à dix-huit mois. Aucune demande de renouvellement n'était recevable dans les six mois suivant l'expiration de la convention initiale.

2 - Information des représentants du personnel

Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, était consulté, préalablement à la conclusion de la convention portant sur le "Trild", sur les motifs économiques du recours au temps réduit indemnisé de longue durée, sur les catégories professionnelles et les activités de l'entreprise intéressées par ce dernier, ainsi que sur le niveau et les modalités de mise en oeuvre des réductions d'horaire (C. trav., art. D. 5122-44, anc. N° Lexbase : L2771IAU).

Le nouveau dispositif d'indemnisation de l'activité partielle de longue durée prévoit une même consultation des représentants du personnel, exactement dans les mêmes termes (C. trav., art. D 5122-44, nouv. N° Lexbase : L1410IEX).

3 - Exigence de contreparties à la charge de l'employeur

Tout d'abord, la convention d'activité partielle, mentionnée à l'article D. 5122-43 du Code du travail, prévoit qu'en contrepartie des allocations complémentaires de réduction d'activité versées par l'Etat et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, l'employeur s'engage à maintenir dans l'emploi les salariés subissant une réduction d'activité pendant une période égale au double de la durée de la convention courant à compter de sa signature, soit six à vingt-quatre mois.

L'employeur rembourse à l'Etat les sommes perçues au titre de l'allocation complémentaire de réduction d'activité prévue dans la convention d'activité partielle pour chaque salarié subissant une réduction d'activité et dont le contrat est rompu au cours de la période égale au double de la durée de la convention courant à compter de sa signature (période fixée au premier alinéa de l'article D. 5122-51 du Code du travail N° Lexbase : L1401IEM) pour l'une des causes énoncées à l'article L. 1233-3 du même code (N° Lexbase : L8772IA7), ou dans les conditions définies par les articles L. 1237-4 (N° Lexbase : L1394H9I) et L. 1237-9 (N° Lexbase : L1407H9Y), dès lors que ce départ s'inscrit dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, ou par les articles L. 1237-5 (N° Lexbase : L2959ICL) à L. 1237-8. L'Etat reverse les sommes ainsi recouvrées à l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage pour les heures indemnisées au-delà de la cinquantième heure (C. trav., art. D. 5122-51 N° Lexbase : L1401IEM).

Ensuite, l'employeur s'engage, également, à proposer à chaque salarié bénéficiaire de la convention un entretien individuel, en vue, notamment, d'examiner les actions de formation ou de bilan qui pourrait être engagées dans la période d'activité partielle.

L'exigence de contreparties imposées aux employeurs bénéficiaires d'aides à l'emploi s'inscrit dans un mouvement de fond, dont les traits les plus marquants ont été la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008, généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion (art. 16 N° Lexbase : L9715IBG) (5) et la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, en faveur des revenus du travail (art. 25 et art. 26 N° Lexbase : L9777IBQ) (6).

B - Régime de l'indemnisation de l'activité partielle de longue durée

1 Calcul

L'indemnisation assurée dans le cadre des conventions de temps réduit indemnisé de longue durée prenait la forme d'indemnités horaires égales à 50 % de la rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés, prévue à l'article L. 3141-22 du Code du travail (N° Lexbase : L3940IBK), ramenée à un taux horaire sur la base de l'horaire de travail habituellement pratiqué dans l'établissement. Ces indemnités ne pouvaient être inférieures à l'indemnité horaire minimale prévue par l'accord interprofessionnel du 21 février 1968, relatif au chômage partiel ou à des stipulations conventionnelles plus favorables en la matière (C. trav., art. D. 5122-46, anc. N° Lexbase : L2765IAN).

Désormais, depuis le 1er mai 2009, l'indemnisation assurée dans le cadre des conventions d'activité partielle prend la forme d'indemnités horaires au moins égales à 75 % de la rémunération brute servant d'assiette au calcul de l'indemnité de congés payés prévue à l'article L. 3141-22, ramenée à un montant horaire sur la base de la durée légale du travail applicable dans l'entreprise ou, lorsqu'elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat de travail. Ces indemnités ne peuvent être inférieures à la rémunération mensuelle minimale définie par l'article L. 3232-3 du Code du travail (N° Lexbase : L0857H9M ; C. trav., art. D. 5122-46, nouv. N° Lexbase : L1409IEW).

2 - Financement de l'Etat

Le montant de la participation forfaitaire de l'Etat au financement des allocations complémentaires versées en cas de réduction d'activité de longue durée au titre d'une convention d'activité partielle mentionnée à l'article D. 5122-43 du Code du travail (N° Lexbase : L1427IEL) est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de l'Emploi et du ministre chargé du Budget. Le montant et les modalités de la participation de l'organisme gestionnaire du régime de l'assurance chômage sont fixés par convention conclue entre l'Etat et cet organisme. Les participations de l'Etat et de cet organisme sont versées à l'entreprise sur la base du nombre d'heures effectivement chômées au titre de la convention d'activité partielle (C. trav., art. D. 5122-49, nouv. N° Lexbase : L1433IES).

II - Les autres dispositifs récents de prévention ou d'accompagnement des licenciés économiques

Depuis plus de deux décennies, l'Etat et les partenaires sociaux ont beaucoup investi le terrain des licenciements économiques, en mettant en place des dispositifs ciblés, dédiés, soit aux salariés menacés par un licenciement ou en cours de licenciement, soit aux employeurs, pour les encourager à ne pas licencier (par ex., chômage partiel, "Trild"...). Tous ces dispositifs, qui ont suscités de nombreuses réactions doctrinales (7), posent de multiples questions, relatives à leur évaluation, leur rapport coût/gain (pour l'emploi), le suivi des salariés bénéficiaires, leur cohérence et leur articulation avec d'autres mesures. Précisément, le dispositif mis en place par le pouvoir réglementaire avec le décret n° 2009-478 appartient à cet ensemble assez riche de dispositifs dédiés aux entreprises, dont l'objet est d'éviter le licenciement, alors même qu'elles connaissent des difficultés économiques sérieuses. L'aide financière apportée à l'entreprise implique que, par définition, le contrat de travail n'est pas rompu, mais simplement suspendu. Il en va différemment des mesures telles que la convention de reclassement personnalisé, le congé de reclassement, le contrat de transition professionnelle, qui s'inscrivent à une étape différente, puisque la rupture du contrat de travail est décidée, l'objectif étant d'en atténuer les conséquences pour le salarié, en termes d'employabilité.

Donc, ne sont mentionnés ni la convention de reclassement personnalisé, ni le contrat de transition professionnelle, puisque, par hypothèse, le salarié est alors licencié, l'employeur, les partenaires sociaux et l'Etat s'efforçant d'aménager une période ("transition professionnelle") pendant laquelle le salarié va optimiser ses chances de retrouver un emploi.

Pour mémoire, il faut rappeler que la convention de reclassement personnalisé (8) a été signée le 19 février 2009 par trois organisations représentatives d'employeurs (Medef, CGPME et Upa) et par cinq organisations représentatives de salariés (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT-FO et CGT). La convention du 19 février 2009, relative à la convention de reclassement personnalisé, met en place de nouvelles règles : le délai de réflexion pour accepter ou refuser la convention de reclassement personnalisé est porté de 14 à 21 jours ; la durée de la convention de reclassement personnalisé est, désormais, de 12 mois (contre 8 mois auparavant) ; le montant de l'allocation spécifique est fixé à 80 % du salaire brut antérieur les 8 premiers mois, puis à 70 % les 4 derniers mois (anciennes règles : 80 % les 3 premiers mois, puis 70 % les 5 derniers mois).

Toujours pour mémoire, il faut, enfin, mentionner le contrat de transition professionnelle, réservé aux salariés licenciés pour motif économique, ayant adhéré à une convention de reclassement personnalisée à compter du 19 décembre 2008 dans les entreprises de moins de 1 000 salariés. Il propose un parcours de transition professionnelle comprenant des mesures d'accompagnement, des périodes de formation ou de travail au sein d'entreprises ou d'organismes publics, à des bénéficiaires qui perçoivent également une allocation de transition professionnelle égale à 80 % de leur ancien salaire brut (décret n° 2009-236 du 27 février 2009 N° Lexbase : L9731ICE, modifiant le décret n° 2006-440 du 14 avril 2006 N° Lexbase : L0979HI4, pris pour l'application de l'ordonnance n° 2006-433 du 13 avril 2006 N° Lexbase : L0646HIR, relative au contrat de transition professionnelle).

A - Indemnisation du chômage partiel

De toutes les mesures financées par l'Etat dédiées aux employeurs et destinées à éviter les licenciements, le dispositif du chômage présente le plus de points communs avec le nouveau dispositif mis en place par le décret n° 2009-478. D'ailleurs, dans le Code du travail, les deux mesures figurent dans le même chapitre.

Lorsqu'une entreprise réduit son activité au-dessous de l'horaire légal ou arrête momentanément tout ou partie de son activité et qu'elle n'entend pas rompre les contrats de travail qui la lient à ses salariés, elle peut avoir recours au chômage partiel. En cas d'arrêt total momentané d'activité ou de chômage partiel total, les salariés peuvent être indemnisés pendant 42 jours. Au-delà de cette durée, si la suspension d'activité se prolonge, le salarié est considéré comme étant à la recherche d'un emploi, bien qu'il n'ait pas fait l'objet d'une mesure de licenciement. Sous certaines conditions, il bénéficiera de l'allocation d'aide au retour à l'emploi de l'assurance chômage pour une durée maximale de 182 jours. Au 1er janvier 2009, les règles d'indemnisation relative au chômage partiel ont été modifiées (9). La durée de la suspension d'activité imputable à la fermeture d'un établissement permettant au salarié de percevoir l'allocation de chômage partiel est passée de quatre à six semaines. Le taux d'indemnisation du chômage partiel passe de 50 à 60 % (l'Accord national interprofessionnel du 21 février 1968 étant modifié par l'avenant du 15 décembre 2008). L'indemnité horaire minimale augmente de 4,42 à 6,84 euros. Le montant de l'allocation spécifique de chômage partiel est revalorisé de 1,40 euro pour les entreprises de moins de 250 salariés et de 1,20 euro pour les plus de 250 salariés. Ainsi, le taux horaire de l'allocation spécifique de chômage partiel pour les entreprises de moins de 250 salariés passe de 2,44 à 3,84 euros et pour les plus de 250 salariés, de 2,13 à 3,33 euros.

Ces nouveaux taux sont applicables rétroactivement à compter du 1er janvier 2009. Le contingent annuel d'heures de chômage partiel est fixé, par salarié, à 800 heures pour l'ensemble des branches professionnelles et à 1 000 heures pour les industries textiles, automobiles et leurs sous-traitants qui réalisent avec elle au moins 50 % de leur chiffre d'affaires, ainsi que pour le commerce de véhicules automobiles.

B - Convention de préretraite de branche dite "Cats"

L'aide de l'Etat au profit des entreprises en phase de restructuration, visant spécifiquement la population salariée proche de l'âge de la retraite, a connu un développement récent, en direction de certaines entreprises, relevant d'un accord de branche (10). La préretraite de branche, autrement désignée sous l'appellation "Cats" (cessation d'activité de certains travailleurs salariés), reprend les grandes lignes du régime juridique de la préretraite ASFNE : même montant d'allocation versée au salarié (montant minimum, fixé par l'Accord national et montant maximum fixé à 65 % du salaire de référence pour la part du salaire n'excédant pas le plafond, et 50 % du salaire de référence pour la part du salaire comprise entre une et deux fois ce plafond), même procédure de conventionnement avec la DDTEFP, même logique d'engagements de l'entreprise, dont le non-respect entraîne des sanctions (C. trav., art. R. 5123-30 N° Lexbase : L2674IAB et R. 5123-33 N° Lexbase : L2665IAX).

Mais la préretraite de branche, mise en oeuvre dans certains secteurs d'activités (métallurgie, papiers-cartons...) se distingue de la convention de préretraite ASFNE sur plusieurs points. Le financement de l'Etat est soumis à certaines conditions : la conclusion d'un accord national professionnel (C. trav., art. R. 5123-22 N° Lexbase : L2695IA3 à R. 5123-24) ; la consultation préalable des représentants du personnel (C. trav., art. R. 5123-25 N° Lexbase : L2686IAQ) et la conclusion d'une convention avec l'Etat (C. trav., art. R. 5123-26 N° Lexbase : L2684IAN à R. 5123-28). Le financement de l'Etat est organisé selon un barème progressif, en fonction de l'âge d'adhésion au dispositif, afin de décourager les départs en préretraite à des âges précoces (55 ou 56 ans) (C. trav., art. R. 5123-32 N° Lexbase : L2668IA3).

Quant aux salariés, ils doivent répondre à certains traits spécifiques, au regard de leur âge (âge entre 57 ans et moins de 65 ans, mais l'adhésion au dispositif est ouverte dès 55 ans) et de la pénibilité de leur activité professionnelle (15 ans de travail à la chaîne, C. trav., art. R. 5123-29 N° Lexbase : L5381ICB). Le bénéficiaire d'une convention de préretraite de branche reste salarié de l'entreprise, son contrat est suspendu (11). Contrairement aux autres formules de préretraite totale, la préretraite de branche n'interdit pas complètement au salarié d'exercer une activité professionnelle, car il a été aménagé une possibilité de reprise d'activité auprès de l'employeur, la prise en charge partielle par l'Etat de l'allocation versée au salarié étant alors provisoirement suspendue (12).

C - Congé de conversion

A la différence de la convention de conversion, la convention de congé de conversion (autrement désignée plus simplement par l'expression "congé de conversion") emporte suspension et non rupture du contrat de travail, pour une durée de quatre à dix mois (13). L'objet du congé de conversion est de permettre aux entreprises de faire bénéficier les salariés dont le licenciement est envisagé d'un congé pour suivre des actions destinées à favoriser leur reclassement. D'une durée comprise entre quatre et dix mois, le congé de conversion doit permettre aux salariés de suivre les actions prévues dans le programme de reclassement établi par l'entreprise : session "évaluation-orientation", formation aux techniques de recherche d'emploi, actions de remise à niveau, action d'adaptation à un emploi, formation qualifiante. Pendant ces actions de formation, le salarié perçoit une allocation de conversion d'au moins 65 % de sa rémunération brute moyenne des 12 derniers mois (soit moins que l'allocation versée au titre de la convention de conversion) et à 85 % du SMIC (C. trav., R. 5123-2 N° Lexbase : L2748IAZ). L'Etat participe au financement de l'allocation de conversion avec un taux maximal de prise en charge de 50 %. Il peut, également, financer une partie du coût des actions réalisées dans le cadre du programme de reclassement établi par l'entreprise. La mesure est extrêmement peu utilisée.

D - Conventions de formation ou d'adaptation professionnelle

Les conventions de formation et d'adaptation du Fonds national de l'emploi peuvent être mobilisées au titre de la conversion (dans un contexte de licenciement économique ou, en amont, lorsque les menaces sur l'emploi sont identifiées), de l'accompagnement des réductions de l'horaire de travail (chômage partiel, aide au passage à temps partiel, réduction collective du temps de travail), ou du recrutement (C. trav., art. L. 5123-2 N° Lexbase : L2054H9X et art. R. 5123-5 N° Lexbase : L2741IAR à R. 5123-8). La formation dure entre quarante heures et trois ans, l'Etat prenant en charge les frais de fonctionnement du stage, et/ou la rémunération versée aux salariés pendant la formation. La prise en charge dépend d'un certain nombre de critères (taille de l'entreprise, situation économique et financière). Selon les travaux menés par les statisticiens, les entreprises sollicitent très peu cette mesure, notamment, parce qu'elle reste peu attractive.

E - Convention d'aide au passage à temps partiel

En vue d'éviter des licenciements économiques, les entreprises peuvent passer avec l'Etat une convention d'aide au passage à temps partiel prévoyant le versement d'allocations en faveur des salariés dont l'emploi à temps plein est transformé avec leur accord, en emploi à temps partiel (C. trav., art. L. 5123-2, 4° N° Lexbase : L2054H9X, R. 5123-40 N° Lexbase : L2648IAC et R. 5123-41 N° Lexbase : L2645IA9). Le passage à temps partiel s'entend comme la réduction du temps de travail d'au moins un cinquième de la durée légale du travail, même si la réduction du temps de travail du salarié est inférieure à un cinquième de l'horaire conventionnel. Le salarié adhérent doit avoir au moins un an d'ancienneté dans l'entreprise et doit avoir travaillé à temps complet l'année précédant son adhésion. L'allocation est versée durant deux ans. Elle est égale à 40 % de la perte brute horaire de rémunération pour la première année et à 20 % pour la seconde. Le taux de participation de l'Etat au financement de l'allocation est modulable en fonction de la situation financière de l'entreprise, de sa taille, de la qualité du plan de sauvegarde de l'emploi, et des garanties complémentaires offertes aux bénéficiaires. Les taux évoluent entre 20 % et 50 %, le taux pouvant être porté à 80 % pour les entreprises de moins de cent salariés. Les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire sont exonérées de leur contribution.

Cette mesure, instaurée par la loi quinquennale sur l'emploi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, a rencontré un succès assez faible, en raison de la concurrence avec d'autres aides de l'Etat, qui ont le même objet, l'accompagnement des restructurations par l'aménagement du temps de travail. En 2001, la mesure a encore perdu de son importance : 110 conventions d'aide au passage à temps partiel du Fonds National de l'Emploi ont entraîné l'adhésion de 307 personnes (14).


(1) Lire, Focus sur le nouveau dispositif du chômage partiel : une solution efficace à la crise ? - Questions à Maître Michèle Bauer, avocate au barreau de Bordeaux, Lexbase Hebdo n° 351 du 20 mai 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N4409BKI).
(2) Loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993, relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle (N° Lexbase : L7486AI4).
(3) Lecohu, Le temps réduit indemnisé de longue durée, Dr. soc., 1994 p. 186.
(4) M. Béraud, Le chômage partiel, un dispositif de protection de l'emploi, comparaison dans quatre pays européens, Travail et Emploi, 1994, n° 61, p. 4-22 ; M. Béraud, G. Lefèvre, N. Sidhoum, Le recours des entreprises au chômage partiel, La Documentation française, 1994 ; B. Bruhnes, La flexibilité du travail : réflexions sur les modèles européens, Dr. soc., 1989, p. 251 ; M. Bunel, L'utilisation des modes de flexibilité par les établissements français, Travail et Emploi, 2006, n° 106, p. 7 ; O. Calavrezo, R. Duhautois et E. Walkowiak, Le chômage partiel, quelles tendances ?, Document de travail, CEE, n° 68, septembre 2006 ; Chouvel, Durée du travail et conjoncture : problématique et impact du chômage partiel, Premières Synthèses, Dares, n° 82, février 1995 ; M. Lallement, G. Lefèvre, Le recours des entreprises françaises et allemandes au chômage partiel, Premières Synthèses, Dares, n° 131, avril 1996 ; M. Lallement, G. Lefèvre, Le chômage partiel en France et en Allemagne, Premières Synthèses, Dares, n° 118.5, décembre 1995 ; V. Le Corre, Les heures supplémentaires, le chômage partiel et la modulation du temps de travail - Trois modes d'ajustement au volume d'activité des entreprises, Premières Synthèses, Dares, n° 30.2, 1998 ; H. Mosley, Les dispositifs de chômage partiel en France, en Allemagne, en Italie et en Espagne : de l'intervention cyclique à l'intervention structurelle, Observatoire de l'Emploi, Politiques, n° 52, 1995, MISEP, Bruxelles ; H. Valdelièvre, Forte baisse du recours au chômage partiel en 2004, Premières Synthèses, Dares, n° 0.2, décembre 2005.
(5) Désormais, les collectivités territoriales peuvent subordonner les aides qu'elles accordent aux entreprises à l'engagement de celles-ci en matière de créations d'emplois, notamment, à temps plein.
(6) La loi créée deux nouvelles obligations à la charge de ces entreprises : respect de l'obligation de négociation annuelle sur les salaires, à défaut de quoi le montant de la réduction "Fillon" est diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année et de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive (art. 26) ; et fixation du salaire conventionnel au niveau du Smic. La loi conditionne les principaux allégements de cotisations sociales patronales dont peuvent bénéficier les entreprises (notamment : réduction générale de cotisations, exonérations applicables dans les ZRR, ZFU, ZRU et BER), au respect, pour celles qui y sont tenues, de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires. Ainsi, si l'employeur n'a pas rempli, au cours d'une année civile, son obligation de négocier sur les salaires, le montant de ces allégements et exonérations sera diminué de 10 % au titre des rémunérations versées cette même année ; ce montant sera diminué de 100 % lorsque l'employeur ne remplit pas cette obligation pour la troisième année consécutive. Cette disposition est applicable depuis le 1er janvier 2009. La loi tend, également, à inciter les branches à porter leur salaire minimum conventionnel à un niveau au moins égal au Smic en réduisant, dans le cas contraire, l'allègement général de cotisations, dit "allègement Fillon", dont bénéfice les entreprises des branches concernées. Cette disposition entrera en vigueur à compter d'une date fixée par décret, au plus tard le 1er janvier 2011 ou, au-delà de cette date, dans les conditions fixées par la loi (art. 27).
(7) P.-H. Antonmattéi, Négocier les restructurations après la loi du 18 janvier 2005, Dr. soc., 2006, p. 295 ; J.-P. Aubert, R. Beaujolin-Bellet, Les acteurs de l'entreprise face aux restructurations : une délicate mutation, Travail et Emploi, 2004, n° 100, p. 99 ; D. Balmary, Rapport de l'instance d'évaluation de la politique de l'emploi et recours à des opérateurs externes, Commissariat général du Plan, février 2004 ; R. Beaujolin-Bellet, Anticipation et accompagnement des restructurations d'entreprises : dispositifs, pratiques, évaluations, rapport pour la Dares, février 2006 ; H. Bertrand, J.-L. Lamoureux, L. Vermel, La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les PME, Travail et Emploi, 1993, n° 57 bis, p. 67 ; O. Blanchard, J. Tirole, Protection de l'emploi et procédures de licenciement, Paris, La Doc. fr., Les rapports du Conseil d'analyse économique, 2003, n° 44 ; F. Bruggeman, Restructurations et licenciements, Dr. soc., 2004, p. 852 ; F. Bruggeman, M. Lapotre, D. Paucard, P. Thobois, Plans sociaux : conception, suivi, évaluation, rapport d'étude pour la Dares, 2002 ; F. Bruggeman, D. Paucard, P.-Y. Verkindt, Restructuration et expertises, Dr. soc., 2006, p. 334-340 ; P. Cahuc, F. Kramarz, De la précarité à la mobilité : vers une Sécurité sociale professionnelle, collection Rapports officiels, La Doc. Fr., 2005 ; T. Colin, R. Rouyer, La loi sur les plans sociaux face à une logique gestionnaire : une portée limitée, Travail et Emploi, 1996, n° 69, p. 5.
(8) Circ. Unédic n° 2009-13 du 6 mai 2009, Convention du 19 février 2009, relative à la CRP (N° Lexbase : L1954IE4).
(9) Lire nos obs., Le régime du chômage partiel profondément réformé, Lexbase Hebdo n° 339 du 26 février 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N5835BIX) ; J. Daniel, Le recours au chômage partiel, JCP éd. S, 2009, n° 1121 ; L'indemnisation du chômage partiel, JCP éd. S, 2009, n° 1132 ; P. Lokiec, Le chômage partiel, pour une autre approche, Dr. soc., 2009, p. 393.
(10) C. trav., art. L. 5123-6 (N° Lexbase : L2063H9B) et art. R. 5123-22 (N° Lexbase : L2695IA3) à R 5123-39 ; décret n° 2000-105 du 9 février 2000, relatif à la cessation d'activité de certains travailleurs salariés et modifiant le Code du travail (N° Lexbase : L0308A9B) ; arrêté du 9 février 2000, pris pour l'application de l'article R. 322-7-2 du Code du travail (N° Lexbase : L7734AIB) ; circ. DGEFP n° 2000-23 du 10 octobre 2000, concernant le dispositif de cessation d'activité de certains travailleurs salariés (Cats) mise en place par le décret n° 2000-105 du 9 février 2000 (N° Lexbase : L0388A9A).
(11) Circ. DGEFP n° 2000-23, préc., fiche n° 2.
(12) Circ. DGEFP n° 2000-23, préc., fiche n° 1, point 2.2.
(13) C. trav., art. R. 5111-2, 4°, art. R. 5123-2.
(14) O. Brégier, Les dispositifs publics d'accompagnement des restructurations en 2001, Dares, 1ères informations, 1ères synthèses, janvier 2003, n° 05.1.

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