La lettre juridique n°352 du 28 mai 2009 : Famille et personnes

[Evénement] Etat des lieux du droit de la filiation après la réforme par l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, portant réforme de la filiation, ratifiée le 16 janvier 2009

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[Evénement] Etat des lieux du droit de la filiation après la réforme par l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, portant réforme de la filiation, ratifiée le 16 janvier 2009. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3211760-evenement-etat-des-lieux-du-droit-de-la-filiation-apres-la-reforme-par-lordonnance-n-2005759-du-4-ju
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par Anne Lebescond - Journaliste juridique

le 07 Octobre 2010

"On est toujours l'enfant de quelqu'un, mais l'enfant de qui ?". Ces propos ont introduit l'atelier portant sur la filiation après la réforme, animé par Dominique Piwnica, avocat au Barreau de Paris, et Frédérique Bozzi, chargée de mission auprès du premier président de la cour d'appel de Paris. Cette formation était proposée dans le cadre des cinquièmes Etats généraux du droit de la famille, organisés par le Conseil national des Barreaux et qui se sont tenus les 14 et 15 mai 2009. Les intervenantes ont exposé les différents pans d'une réforme de simplification et d'harmonisation du droit de la filiation -dont le point phare tient à la suppression des notions de filiation légitime et de filiation naturelle-. Cette réforme a été initiée par l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 (1) et récemment entérinée par la loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009 (2). Le texte législatif ratifie l'ordonnance plusieurs années après son entrée en vigueur (le 1er juillet 2006) et introduit des dispositions nouvelles, la plupart substantielles, entraînant une situation originale dans laquelle trois régimes bien distincts gouvernent les procédures en cours (celui existant avant le 1er juillet 2006, celui prévu par l'ordonnance de 2005 et, enfin, celui introduit par la loi promulguée début 2009). Cette complexité requiert la plus grande prudence de la part des praticiens, dont la responsabilité sera engagée s'ils se méprennent sur les règles applicables. Nul n'est, en effet, à l'abri d'une erreur, d'autant que la majorité des contentieux présente des aspects internationaux. Démêler les règles internes applicables n'est, ainsi, pas suffisant (I), encore faut-il appréhender la filiation sous l'angle du droit international privé (II).

I - La filiation en droit interne

L'article 310-1 du Code civil (N° Lexbase : L8852G9Q), relatif aux modes d'établissements de la filiation distingue le cas de la filiation légalement établie en dehors d'un contentieux (A), de celle établie dans un tel cadre (B).

A - Mode d'établissement non contentieux de la filiation

L'article 310-1 envisage trois cas d'établissement de la filiation en dehors de tout contentieux : l'effet de la loi (1), la reconnaissance volontaire (2) et la possession d'état constatée par un acte de notoriété (3).

1 - La filiation établie par l'effet d'une loi : le maintien de la présomption de paternité

Si la loi a supprimé la distinction entre filiation légitime et filiation naturelle, elle a, en revanche, maintenu l'interdiction de l'établissement de la filiation incestueuse prévue à l'article 310-2 du Code civil (N° Lexbase : L8853G9R). En pareil cas, dès lors que "la filiation est déjà établie à l'égard de l'un, il est interdit d'établir la filiation à l'égard de l'autre par quelque moyen que ce soit".

Hors ce cas particulier, l'ordonnance du 4 juillet 2005 fixe un régime unifié de la filiation, quel que soit le "cadre" dans lequel l'enfant a été conçu. Ainsi que le rappelle Dominique Piwnica cette suppression est la suite logique des arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l'Homme (3), fustigeant la discrimination résultant des deux statuts, fondée sur aucune justification objective raisonnable. Pour autant, le texte a conservé la spécificité propre à la filiation légitime : la présomption de paternité (pater is est), fixée à l'article 312 du Code civil (N° Lexbase : L8883G9U). Le texte pose le principe selon lequel "l'enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari" (4).

La loi du 16 janvier 2009 aménage cette présomption de façon chronologique (C. civ., art. 313 N° Lexbase : L5813ICB) ; la présomption de paternité sera écartée :
- lorsque l'acte de naissance de l'enfant ne désigne pas le mari en qualité de père ;
- ou, lorsque l'enfant est conçu pendant une période de séparation légale.

La présomption sera, toutefois, rétablie :
- de plein droit, si l'enfant a la possession d'état à l'égard du mari et s'il n'a pas une filiation paternelle déjà établie à l'égard d'un tiers (C. civ., art. 314 N° Lexbase : L5826ICR) ;
- en justice (C. civ., art. 315 N° Lexbase : L5828ICT), l'action étant ouverte aux époux, durant la minorité de l'enfant, et à celui-ci, pendant les dix années qui suivent sa majorité.

Le mari pourra, également, reconnaître l'enfant (C. civ., art. 315), sous réserve que celui-ci n'ait pas été préalablement reconnu par un autre (C. civ., art. 320 N° Lexbase : L8822G9M).

2 - La filiation établie par la reconnaissance volontaire

Dominique Piwnica a souligné l'importance de l'obligation du père, pour le cas du couple non marié, de reconnaître son enfant pour établir la filiation. Un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation l'illustre : la simple indication de la filiation du défunt dans un acte de décès ne peut valoir reconnaissance (Cass. civ. 1, 14 janvier 2009, n° 07-11.555, FS-P+B N° Lexbase : A3382ECA).

En application de l'article 316 du Code civil (N° Lexbase : L8817G9G), la reconnaissance prénatale est valable, étant précisé que celle-ci peut intervenir même dans le cadre d'un accouchement sous X (Cass. civ. 1, 7 avril 2006, n° 05-11.285, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A9588DNG).

L'article 320 du Code civil reprend la règle de chronologie de la filiation : "tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l'établissement d'une autre filiation qui la contredirait". Le conflit de filiation positive est, quant à lui, réglé par l'article 336-1 du Code civil (N° Lexbase : L5821ICL) : "lorsqu'il détient une reconnaissance paternelle prénatale dont les énonciations relatives à son auteur sont contredites par les informations concernant le père que lui communique le déclarant, l'officier de l'état civil compétent [...] établit l'acte de naissance au vu des informations communiquées par le déclarant et en avise sans délai le procureur de la République". Celui-ci élève le conflit de paternité sur le fondement de l'article 336 (N° Lexbase : L8872G9H) (5). Ce texte vise, notamment, le cas d'une reconnaissance prénatale effectuée par une autre personne que le mari, censé bénéficier de la présomption de paternité. Le conflit sera, alors, tranché, ainsi que l'indique l'intervenante, par le jeu de l'article 332 (N° Lexbase : L8834G93), aux termes duquel, "la paternité peut être contestée en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père". La preuve consistera, ici, le plus souvent, par une expertise biologique. Celle-ci, selon la Haute juridiction, est de droit en matière de filiation (notamment, cf. Ass. plén., 23 novembre 2007, n° 05-17.975, M. Bernard Romero c/ M. Bernard Trouillet, P+B+R+I N° Lexbase : A9299DZG (6)).

3 - La filiation par possession d'état

En application de l'article 311-1 du Code civil (N° Lexbase : L8856G9U), la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir. Celle-ci doit être continue, paisible, publique et non équivoque (C. civ., art. 311-2 N° Lexbase : L8857G9W). Elle peut faire l'objet de la délivrance d'un acte de notoriété (C. civ., art. 317 N° Lexbase : L5805ICY).

La loi du 16 janvier 2009, par rapport à l'ordonnance du 4 juillet 2005, apporte deux éléments nouveaux au régime de l'acte de notoriété :
- le délai de cinq ans prévu pour la délivrance de l'acte court à compter de la cessation de la possession d'état ;
- et la possession d'état prénatale est expressément prévue.

B - Le contentieux de la filiation

L'ordonnance du 4 juillet 2005 est une véritable révolution, en ce qu'elle a, selon Dominique Piwnica -et de l'avis unanime de la doctrine-, simplifié les actions relatives à la filiation, harmonisé les régimes juridiques et sécurisé les liens. Les avantages du dispositif prévu aux articles 318 (N° Lexbase : L8819G9I) à 337 du Code civil, relatifs au contentieux de la filiation, résultent, en réalité, de la suppression de la distinction entre la filiation légitime et la filiation naturelle. La réforme, si elle touche, également, d'autres points, tels l'accouchement sous X, a laissé à la loi sur la bioéthique (loi n° 2004-800 du 6 août 2004, relative à la bioéthique N° Lexbase : L0721GTU), qui fait actuellement l'objet de travaux, le soin de régler les questions de la gestation pour autrui et de l'homoparentalité.

1 - Le dispositif mis en place par les articles 318 et suivants du Code civil

L'article 320 du Code civil, introduit par l'ordonnance du 4 juillet 2005, permet, à lui seul, de simplifier considérablement les conflits de filiation. La réduction des délais de prescription de trente ans à dix ans (C. civ., art. 321 N° Lexbase : L8823G9N) et la suppression de la plupart des fins de non-recevoir y contribuent également. Les seules fins de non-recevoir désormais permises sont celles relatives :
- à l'inceste absolu ;
- à la filiation établie antérieurement ;
- et à l'action en contestation de filiation dans le cas d'une procréation médicalement assistée.

Les actions en établissement de filiation sont soit fondées sur le lien biologique, soit fondées sur le lien sociologique. Les premières sont de trois sortes :
- l'action en établissement de la filiation maternelle (C. civ., art. 325 N° Lexbase : L5825ICQ), sauf à ce que la mère ait demandé, lors de l'accouchement, que son admission et son identité soient tenus secrètes (C. civ., art. 326 N° Lexbase : L8828G9T) ;
- l'action en établissement de la filiation paternelle (C. civ., art. 327 N° Lexbase : L8831G9X) ;
- et l'action en rétablissement de la présomption de paternité.

Les secondes relèvent du domaine de la possession d'état.

Les actions en contestation de la filiation sont régies par les articles 332 (N° Lexbase : L8834G93) et suivants du Code civil : la maternité peut être contestée en rapportant la preuve que la mère n'a pas accouché de l'enfant et la paternité, en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père. Lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. La prescription est de cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé ou du décès du parent dont le lien de filiation est contesté. En outre, seul le ministère public, peut contester la filiation, lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle a été faite ultérieurement. Enfin, à défaut de possession d'état conforme au titre, la prescription est ramenée à cinq ans, toute personne ayant un intérêt étant autorisée à agir.

L'action est introduite devant le tribunal de grande instance, qui statue sur la filiation et, s'il y a lieu, sur l'exercice de l'autorité parentale, la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et l'attribution du nom (C. civ., art. 331 N° Lexbase : L8833G9Z).

2 - L'accouchement sous X

La loi du 16 janvier 2009 a supprimé la fin de non-recevoir relative à l'accouchement sous X. Sous le régime antérieur, la Cour européenne des droits de l'Homme avait statué sur la conformité du dispositif français avec la Convention européenne des droits de l'Homme, notamment son article 8 (N° Lexbase : L4798AQR), relatif au respect de la vie privée (CEDH, 10 janvier 2008, Req. 35991/04, Kearns c/ France N° Lexbase : A2492D3P (7)). La Cour a, en effet, estimé que le délai de rétractation et l'information délivrée à la mère sont suffisantes. Pour autant, selon Dominique Piwnica, la France devait redouter une censure de la part de la Cour de Strasbourg, pour discrimination entre les hommes et les femmes, puisque seules ces dernières étaient "couvertes" par une fin de non recevoir.

Une telle suppression vide de sa substance la loi n° 2002-93 du 22 janvier 2002, relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'Etat (N° Lexbase : L1434AWZ), puisqu'elle risque d'inciter les personnes accouchant sous X à ne plus délivrer aucune information les concernant à destination de l'enfant en quête de ses origines.

3 - La gestation pour autrui

Dans le cadre des travaux relatifs à la loi sur la bioéthique (8), la question se pose du maintien de la prohibition de la gestation pour autrui, visée à l'article 16-7 du Code civil (N° Lexbase : L1695ABE). La conception française veut que la grossesse et l'accouchement soient l'alpha et l'oméga de la maternité, ceci même dans le cadre de la procréation médicalement assistée. La gestation pour autrui a, dès lors, toujours été censurée, que ce soit par le législateur, ou par les juges. L'Assemblée plénière de la Cour de cassation a, ainsi, jugé que cette pratique est contraire aux principes d'ordre public d'indisponibilité du corps humain et d'indisponibilité de l'état des personnes (Ass. plén., 31 mai 1991, n° 90-20.105, Procureur général près la Cour de cassation N° Lexbase : A7573AHX).

L'article 16-7 du Code civil prohibe toute convention portant sur la création ou la gestation pour le compte d'autrui, mais ne vise pas la reconnaissance de la filiation. Celle-ci n'est, toutefois, pas permise non plus. La Cour de cassation (Cass. civ. 1, 17 décembre 2008, n° 07-20.468, FS-P+B+I N° Lexbase : A8646EBT (9) et lire A. Gouttenoire, Enfant issu d'une convention de mère porteuse : ordre public : 1 - intérêt de l'enfant : 0, Lexbase Hebdo n° 346 du 16 avril 2009 - édition privée générale N° Lexbase : N0216BK9) a eu à trancher le cas d'époux partis en Californie pour recourir à la gestation pour autrui. Ceux-ci ont demandé au consulat français l'inscription de la filiation sur les registres d'état civil français, l'acte étranger de filiation faisant foi. Ils se sont vu opposer un refus du consulat, jugé légitime par les magistrats, qui soulignent que la demande d'inscription résultait d'une convention de mère porteuse. Cette décision a récemment été confirmée par la cour d'appel de renvoi, dans un arrêt du 26 février 2009 (CA Paris, 1ère ch., sect. C, 26 février 2009, n° 07/18559, M. William Ajzner et autres c/ Ministère public N° Lexbase : A6272EDN (10)).

4 - L'homoparentalité

La Cour de cassation refuse, dans le cadre de l'homoparentalité, la possibilité pour la compagne de la mère de l'enfant, qui n'a pas de filiation établie à l'égard du père, de procéder à une adoption simple, car celle-ci aurait pour effet de priver la mère naturelle de son autorité parentale (Cass. civ. 1, 20 février 2007, n° 04-15.676, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A2536DUH (11) et lire N. Baillon-Wirtz, Le couple homosexuel et l'homoparentalité à l'épreuve de la jurisprudence, Lexbase Hebdo n° 254 du 28 mars 2007 - édition privée générale N° Lexbase : N3857BA4). En effet, l'exception prévue par l'article 365 du Code civil (N° Lexbase : L2884ABG) n'est possible que pour les personnes mariées. En outre, la délégation ou le partage de l'autorité parentale est antinomique et contradictoire avec l'adoption demandée, qui a pour effet de conférer l'autorité parentale au seul adoptant.

II - La filiation appréhendée sous l'angle du droit international privé

Face à un contentieux présentant des aspects internationaux, l'avocat doit, selon Frédérique Bozzi, se poser deux questions préalables :
- quelle est la compétence internationale ? (A) ;
- et quelle est la loi applicable au fond du litige ? (B).

A - Détermination de la compétence internationale

Pour savoir quel juge est compétent, il faut se reporter aux dispositions de l'article 42 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2654ADN), selon lesquelles la juridiction compétente est celle du lieu du domicile du défendeur ou, à défaut, du lieu de sa résidence. L'application de ce texte ne sera écartée, que si l'avocat revendique les dispositions de l'article 14 du Code civil (N° Lexbase : L3308AB7) (12) ou de l'article 15 (N° Lexbase : L3310AB9) du Code civil (13).

B - Détermination de la loi applicable au fond du litige

Il s'agit, ici, comme l'indique Frédérique Bozzi, de déterminer la règle de conflit applicable, qui, elle-même, désignera la loi permettant de trancher le fond du litige, sauf à ce que celle-ci ne soit pas compatible avec la conception française de l'ordre public international.

1 - Règle de conflit et droit applicable au fond du litige

La règle de conflit applicable est celle édictée à l'article 311-14 du Code civil (N° Lexbase : L8858G9X) : la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l'enfant ou, si la mère n'est pas connue, par la loi personnelle de l'enfant.

Ce principe connaît, toutefois, quelques tempéraments, concernant, notamment, le cas de la mère réfugiée (la loi nationale de la mère cesse de s'appliquer à compter de la demande de dépôt du statut, dès lors que cette demande est acceptée) ou celui de la mère qui a changé de nationalité (s'applique, alors, la loi de l'état dont la mère a la nationalité au jour de la naissance de l'enfant). En outre, l'article 311-15 du Code civil (N° Lexbase : L8859G9Y) soumet à la loi française tout litige ayant trait à la possession d'état. Enfin, les dispositions de l'article 317 de ce code (N° Lexbase : L8860G9Z) demeurent d'application : "la reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle a été faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l'enfant". Le système est, ici, alternatif. La contestation portant sur une filiation établie par reconnaissance doit pouvoir être fondée sur la loi de son auteur et sur celle de l'enfant (qui sera, la plupart du temps, la loi de la mère).

Une fois la loi étrangère déterminée, il faut, encore, apporter la preuve de son contenu, mission qui appartient au juge, avec la collaboration des parties.

Enfin, il faut garder à l'esprit que le domaine de la loi étrangère ne s'étend pas à toutes les questions à la périphérie de la filiation, telles la nature et la forme de la procédure, l'admission de la preuve, l'aide juridictionnelle ou encore, le déroulement de la procédure.

2 - Exclusion des règles étrangères incompatibles avec la conception française de l'ordre public international

Il arrive que la teneur de la loi étrangère ne soit pas compatible avec la conception française de l'ordre public international. Dans cette matière, trois idées fortes dominent :
- l'accès de l'enfant à la vérité sur sa filiation ;
- la protection de la stabilité du lien familial ;
- le respect du corps humain et des droits de la personne.

L'ordre public international de la filiation reste en construction, la Cour européenne des droits de l'Homme jouant un rôle essentiel dans la détermination de son contenu. Celle-ci n'est, comme sur bien d'autres sujets, pas toujours en accord avec les décisions rendues par le juge français (notamment, sur la question de l'exhumation aux fins de procéder à une expertise biologique).

Seront considérées comme contraires à l'ordre public, concernant les actions en contestation des liens de filiation, les lois qui interdisent purement et simplement aux personnes de contester ou qui les restreignent au point d'empêcher l'enfant d'accéder à la vérité sur ses origines. Il en ira ainsi des lois qui dispensent le père de rapporter la preuve de sa non-paternité (cas de certains pays du Moyen-Orient). Concernant les actions en rétablissement des liens de filiation, seront, notamment, contraires à l'ordre public, celles qui interdisent la recherche en maternité ou en paternité ou celles qui interdisent la reconnaissance de l'enfant adultérin.


(1) Ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005, portant réforme de la filiation (N° Lexbase : L8392G9P).
(2) Loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009, ratifiant l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et modifiant ou abrogeant diverses dispositions relatives à la filiation (N° Lexbase : L5763ICG) ; lire les obs. d'A. Gouttenoire, La ratification de l'ordonnance relative à la filiation : une réforme de la réforme..., Lexbase Hebdo n° 334 du 22 janvier 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N3634BIG).
(3) CEDH, 13 juin 1979, Req. 6833/74, Marckx c/ Belgique (N° Lexbase : A8858DMZ).
(4) Cette présomption n'a pas été étendue au PACS, malgré l'obligation de toit commun et la quasi-obligation (posée par la jurisprudence) de fidélité.
(5) C. civ., art. 336 : "La filiation légalement établie peut être contestée par le ministère public si des indices tirés des actes eux-mêmes la rendent invraisemblable ou en cas de fraude à la loi".
(6) Lire les obs. de D. Bakouche, L'expertise biologique est de droit en matière de filiation, Lexbase Hebdo n° 284 du 6 décembre 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N3591BDD), et les obs. d'E. Vergès, in La chronique de procédure civile d'Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble II , Lexbase Hebdo n° 284 du 6 décembre 2007- édition privée générale (N° Lexbase : N3670BDB).
(7) Lire les obs. d'A. Gouttenoire, Le consentement de la femme qui accouche sous X doit être libre et éclairé, Lexbase Hebdo n° 297 du 20 mars 2008 - édition privée générale (N° Lexbase : N4397BEL).
(8) Lire les obs. d'Anne-Laure Blouet Patin, Révision de la loi de bioéthique : les points qui font débat, Lexbase Hebedo n° 349 du 7 mai 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N0586BKW).
(9) Lire les obs. d'A. Gouttenoire, Mère porteuse : la Cour de cassation soutient l'action du ministère public, Lexbase Hebdo n° 332 du 8 janvier 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N2211BIQ).
(10) Lire les obs. d'A. Gouttenoire, Enfant issu d'une convention de mère porteuse : ordre public : 1 - intérêt de l'enfant : 0, Lexbase Hebdo n° 346 du 16 avril 2009 - édition privée générale (N° Lexbase : N0216BK9).
(11) Lire les obs. de N. Baillon-Wirtz, Le couple homosexuel et l'homoparentalité à l'épreuve de la jurisprudence, Lexbase Hebdo n° 254 du 28 mars 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N3857BA4).
(12) C. civ., art. 14 (N° Lexbase : L3308AB7) : "L'étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l'exécution des obligations par lui contractées en France avec un français et il pourra être traduit devant les tribunaux de France, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des français".
(13) C. civ., art. 15 (N° Lexbase : L3310AB9) : "Un français pourra être traduit devant un tribunal de France, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un étranger".

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