La lettre juridique n°304 du 15 mai 2008 : Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Jurisprudence] Pour ne pas perdre l'exonération de TVA d'une livraison intracommunautaire, n'oubliez pas que le bien doit effectivement franchir la frontière !

Réf. : CAA Nancy, 3ème ch., 24 janvier 2008, n° 05NC00885, Société Marc Léon International services (N° Lexbase : A7386D4C)

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N8985BEI

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par Guy Quillévéré, Commissaire du Gouvernement près le tribunal administratif de Nantes

le 07 Octobre 2010

La cour administrative d'appel de Nancy, dans une espèce "SA Marc Léon International services (MLIS)" en date du 24 janvier 2008, où elle remet en cause l'exonération de TVA prévue par les dispositions de l'article 262 ter-I 1° (N° Lexbase : L4702HW3), rappelle l'économie générale du dispositif d'exonération des livraisons intracommunautaires et précise la pertinence des justificatifs de nature à établir la réalité d'une livraison. La cour ne retient ni la certification d'un contrôle technique, ni l'attestation établissant que les véhicules ont reçu une immatriculation et des cartes grises en Allemagne. Elle écarte ces éléments dès lors qu'ils ne requièrent pas, pour être établis, la présence des véhicules sur le territoire de l'Etat de livraison. Les faits dans cette affaire sommairement résumés sont les suivants : aux termes des dispositions de l'article 262 ter-I-1° du CGI : "sont exonérés de la TVA les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie". C'est sur ce fondement que la société SA "Marc Léon International Services (MLIS)" a facturé un certain nombre de vente de véhicules à une société allemande. Au titre de la période allant du 1er juillet 1992 au 31 décembre 1994, l'administration fiscale a refusé à la SA MLIS, le bénéfice de l'exonération de TVA prévue par les dispositions de l'article 262 ter I-1° du CGI au motif que, pour certains véhicules, la réalité des livraisons intracommunautaires n'était pas établie. La société requérante reconnaît que 127 des véhicules en litige ont été livrés en France et ne relevaient pas des dispositions de l'article 262 ter, mais elle demande le bénéfice de l'exonération pour 803 véhicules et produit différents justificatifs de sociétés allemandes que la cour de Nancy écarte.

La décision de cour administrative d'appel de Nancy, en date du 24 janvier 2008, précise les exigences de preuve en présence d'éléments produits pour établir la réalité d'une livraison ; notamment ceux de nature à établir la réalité d'un contrôle technique des véhicules sur le territoire de livraison et ceux prouvant l'immatriculation et la présence des véhicules en Allemagne. La décision de la cour administrative d'appel de Nancy semble s'éloigner de la position adoptée par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 22 janvier 2004 (CAA Bordeaux, 4ème ch., 22 janvier 2004, n° 01BX00634, Société Garage Etoile 86 N° Lexbase : A2486DBP) qui avait regardé un extrait du fichier des véhicules ou la copie de la carte grise comme des justificatifs suffisants de la présence des véhicules sur le territoire de l'Etat de livraison.

1. Le régime d'exonération de l'article 262 ter du CGI repose sur la satisfaction de quatre conditions dont le vendeur est amené de manière croissante à s'assurer qu'elles sont remplies

La décision de la cour de Nancy du 24 janvier 2008 "SA Marc Léon International Services (MLIS)" fait une application des dispositions de l'article 262 ter-I qui prévoient les conditions dans lesquelles une livraison intracommunautaire est exonérée de TVA.

1.1. L'article 262 ter-I prévoit quatre conditions qui doivent être satisfaites pour que la livraison soit exonérée

Aux termes de l'article 262 ter du CGI : "I- Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie". Cette exonération ne remet pas en cause le droit à déduction du vendeur de la taxe payée sur l'acquisition du bien ou sur les fournitures servant à sa fabrication. Sur le fondement de ces dispositions, la société MLIS a facturé un nombre important de vente de véhicules à des sociétés établies en Allemagne. Les livraisons intracommunautaires sont exonérées si certaines conditions sont remplies. Trois des quatre conditions permettant de bénéficier de l'exonération de TVA sont des conditions classiques dont la vérification ne pose pas de difficultés particulières.

La livraison doit, tout d'abord, être effectuée à titre onéreux. La doctrine administrative est venue préciser ce point (DB 3A 3211-3). Il s'agit des livraisons proprement dites répondant aux critères généraux d'assujettissement à la TVA. La livraison doit comporter une contrepartie quelles que soient sa forme et sa qualification. Le vendeur doit, ensuite, avoir la qualité d'assujetti agissant en tant que tel. Le vendeur est considéré comme un assujetti agissant en tant que tel lorsqu'il exerce d'une manière indépendante une activité de producteur, de commerçant ou de prestataire de service quels que soient son statut juridique, sa situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de son intervention. L'acquéreur de son côté doit, lui aussi, avoir la qualité d'assujetti.

Pour que la livraison intracommunautaire puisse être exonérée, il faut que l'acquéreur soit un assujetti ou une personne morale non assujettie qui ne bénéficie pas, dans son Etat membre, du régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la TVA ses acquisitions intracommunautaires. Cette condition est mise en oeuvre de manière simple. Elle est satisfaite dès lors que l'acquéreur fournit son numéro d'identification à la TVA dans un autre Etat membre La doctrine administrative prévoit que l'assujettissement de l'acquéreur sera prouvé par la seule production de son numéro d'identification à la TVA dans un autre Etat membre (instruction du 28 mars 1997, BOI 3 A-3-97 N° Lexbase : X7145ABA). La cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt en date du 28 novembre 2007 (CAA Paris, 2ème ch., 28 novembre 2007, n° 05PA03246, Minefi c/ Société Abacus Equipement Electronique N° Lexbase : A9162D3Q), a jugé, pour l'application de cette condition, que le fournisseur qui n'a pas vérifié la validité du numéro d'identification à la TVA de son client, alors qu'il pouvait facilement procéder à cette vérification, n'a pas pris toute mesure pouvant raisonnablement être exigée de lui pour s'assurer que ses livraisons n'étaient pas impliquées dans une fraude, alors même qu'au moment des livraisons en cause il ne disposait, comme le relève elle-même la cour, d'aucun élément de présomption de fraude à l'encontre de ce client. La cour de Paris subordonne l'exonération à une condition non expressément prévue par l'article 138 de la Directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 (N° Lexbase : L7664HTZ) que transpose l'article 262 ter du CGI.

La quatrième condition qui doit être satisfaite pour que le régime de l'exonération trouve à s'appliquer est celle qui suscite, à titre principal, les contentieux et, notamment, celui de la cour administrative d'appel de Nancy du 24 janvier 2008 "SA MLIS". Le bien expédié ou transporté hors de France doit l'être vers un autre Etat membre. Le bien étant expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou pour leur compte à destination d'un autre Etat membre de l'UE. La difficulté est de s'assurer de la livraison effective des véhicules dans le pays de destination et, notamment, lorsque le transport est effectué par l'acquéreur ou par un intermédiaire. C'est l'ensemble des mentions portées sur les documents commerciaux usuels qui doivent alors permettre en principe au vendeur d'apporter la preuve pour chaque livraison, de l'existence de l'expédition ou du transport (CAA Paris, 2ème ch., 28 novembre 2007, n° 05PA03246, précité).

C'est essentiellement sur le terrain de la quatrième condition que l'exception d'exonération est mise en oeuvre lorsqu'il est démontré, notamment, que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle. Les dispositions de l'article 262 ter ne s'appliquent donc pas lorsqu'il est démontré que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle.

1.2. Certaines obligations pèsent plus particulièrement sur le vendeur

En matière de preuve de l'effectivité de l'expédition ou du transport de biens dans un autre Etat membre, le régime de la preuve est celui de la preuve objective. Il appartient, donc, au redevable d'apporter tous les éléments que lui seul est en mesure de fournir selon une logique civiliste qui avait été retenue un temps en matière de déductibilité de charges par l'arrêt du Conseil d'Etat (CE 8° s-s, 20 juin 2003, n° 232832, Société établissements Lebreton-Comptoir général de peintures et annexes c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A0626C93). Toutefois, et c'est le cas dans l'affaire "SA Marc Léon International Services (MILS)", l'administration peut remettre en cause les éléments fournis ; il appartient alors au service d'apporter des indices sérieux de leur caractère fictif.

Les obligations du vendeur diffèrent selon que l'acquéreur a effectué l'expédition ou le transport par ses propres moyens. En effet, si l'expédition est effectué par l'acquéreur, il est difficile pour le vendeur de disposer des éléments à l'origine lui permettant d'établir la réalité de la livraison dans le pays de destination. La doctrine administrative précise, cependant, que, si l'expédition se place dans le cadre de relations commerciales régulières avec l'acquéreur, le vendeur doit recueillir, pour chaque livraison, les pièces justificatives lui permettant d'établir a posteriori la réalité du transport des marchandises hors du territoire français (DB 3A 3211-8 et 9). Si l'opération est conclue avec un client occasionnel, le vendeur doit prendre a priori auprès de l'acquéreur toutes précautions qui lui semblent nécessaires pour prouver la réalité de l'opération. La doctrine administrative est donc souple : le vendeur peut justifier par tous moyens de la réalité de l'expédition ou du transport des biens hors de France. Les moyens de preuve peuvent, en outre, être directs ou indirects.

La jurisprudence récente de la Cour de justice des Communautés européennes est, toutefois, venue préciser qu'en matière de livraisons intracommunautaires, l'exonération d'une livraison impliquée dans un circuit de fraude ne peut être maintenue qu'à une triple condition : le fournisseur doit être de bonne foi ; il doit avoir présenté des preuves justifiant, à première vue, son droit à l'exonération ; il doit avoir pris toute mesure raisonnable en son pouvoir pour s'assurer que sa livraison intracommunautaire ne le conduit pas à participer à la fraude (CJCE 27 septembre 2007, aff. C-409/04, Teleos plc c/ Commissioners of Customs & Excise N° Lexbase : A5702DYT : RJF, 12/07, n° 1511). Ce faisant, la CJCE semble alourdir les sujétions imposées au vendeur et retenues à ce jour par le juge national. Sans doute faut-il patienter pour comprendre ce qu'il faut exactement entendre par mesures raisonnables. En effet, postérieurement à la décision de la cour administrative d'appel de Paris du 28 novembre 2007, qui s'est placée dans le prolongement de la position de la CJCE du 27 septembre 2007, et en décalage avec la position du juge national précisée dans un arrêt du 27 juillet 2005 (CE 3° et 8° s-s-r., 27 juillet 2005, n° 273619 et n° 276620, Société Fauba France N° Lexbase : A1510DK7), l'administration, dans ses commentaires sur les nouvelles dispositions destinées à lutter contre la fraude à la TVA, n'a pas cité l'absence de vérification de la validité du numéro de TVA du client au nombre des critères ou des indices lui permettant de remettre en cause l'exonération (instruction du 30 novembre 2007, BOI 3 A-7-07 N° Lexbase : X9964ADE).

Reste que cette notion de "mesures raisonnables" n'est pas nouvelle et a été précisée en ce qui concerne le droit à déduction dans deux arrêts de 2006 (CJCE, 12 janvier 2006, aff. C-354/03, C-355/03 et C-484/03, Optigen Ltd, Fulcrum Electronics Ltd, Bond House Systems Ltd N° Lexbase : A3277DMC et CJCE, 6 juillet 2006, aff. C-439/04 et 440/04, Axel Kittel et Recolta Recycling Sprl N° Lexbase : A2718DQQ). Il est vrai que l'enjeu en matière de TVA n'est pas mince et que les livraisons intracommunautaires sont un lieu de fraude de grande ampleur. C'est sans doute pourquoi la présomption de livraison peut être remise en cause et les justificatifs produits écartés (CAA Bordeaux, 5ème ch., 4 décembre 2006, n° 03BX01261, SA Chantiers Amel N° Lexbase : A9839DS9).

2. La fraude, exception à l'exonération des livraisons intracommunautaires

L'exonération des livraisons intracommunautaires ne s'applique pas lorsque l'administration peut démontrer que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle (CGI, art. 262 ter-I-1°, al. 2).

2.1. L'exception d'exonération née de la fraude

Les conditions de cette remise en cause ont été précisées par le Conseil d'Etat, dans un arrêt du 27 juillet 2005 (CE 3° et 8° s-s-r., 27 juillet 2005, n° 273619 et 273620, Société Fauba France, précité) qui admet la remise en cause de l'exonération d'une livraison intracommunautaire dès lors que l'administration est en mesure de démontrer que le fournisseur a sciemment participé à un mécanisme de fraude à la TVA.

Le redevable ne bénéficie que d'une présomption pouvant être combattue par l'administration qui a toute latitude pour démontrer que le redevable a participé à un mécanisme frauduleux. Cette démonstration est effectuée au cas par cas et s'appuie sur un faisceau d'indices. Elle peut relever, comme dans la décision de la cour administrative d'appel de Nancy, d'une remise en cause des justifications apportées qui sont regardées comme insuffisantes pour établir la présence des véhicules dans le pays de destination. Tout comme pour les trois premières conditions de l'article 262 ter du CGI, les modes de preuve sont divers et doivent être appréciés par l'administration au cas par cas pour apprécier la réalité d'une livraison (TA Versailles, 24 avril 2003, n° 98-4609 et 99-2157, Société Fauba France).

II appartient au redevable de la TVA d'apporter la preuve, par tous moyens, que les biens ont été effectivement expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne. Cette preuve est appréciée au cas par cas et peut résulter de différents documents constituant un faisceau d'indices de la réalité de la livraison. En revanche, les mentions à porter sur les factures de vente ne sauraient à elles seules constituer les justifications exigées. La décision de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 24 janvier 2008 écarte les factures, dès lors qu'elles n'établissent pas que le transfert des véhicules ait été effectif.

Doivent alors être regardées comme un faisceau d'indices apportant la preuve de l'expédition ou du transport d'un véhicule dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, la copie du chèque remis en paiement et tiré sur une banque dudit Etat membre, la copie de la carte d'identité de l'acquéreur délivrée par cet Etat membre et l'attestation d'inscription de l'acquéreur au registre des contributions de cet Etat (CAA Bordeaux, 4ème ch., 22 janvier 2004, n° 01BX00634, précité : RJF, 5/04, n° 467)

La production d'attestations rédigées par les clients eux-mêmes plusieurs années après la dates de l'opération alléguée de la réalisation de l'opération n'est pas de nature à établir la réalité de l'expédition (CAA Douai, 2ème ch., 27 juin 2006, n° 05DA00311, Société Métro cash et Carry France N° Lexbase : A7559DQZ). De même, la production de certificats d'immatriculation de bateaux n'apporte pas la preuve de leur expédition dans un autre Etat membre, dès lors que la délivrance de ce certificat n'est pas conditionné au stationnement du bateau dans l'Etat de délivrance du certificat d'immatriculation (CAA Bordeaux, 5ème ch., 4 décembre 2006, n° 03BX01261, précité, et CAA Versailles, 3ème ch., 11 juillet 2006, n° 04VE03355, Société Magma France N° Lexbase : A2822DRX).

2.2. La décision de la cour administrative d'appel de Nancy écarte deux justifications de la réalité de la livraison ordinairement retenues

La preuve de l'expédition ou du transport d'un véhicule dans un autre Etat membre de la Communauté européenne est établie par l'immatriculation du véhicule dans cet autre Etat membre, postérieurement à sa vente, à condition que cette immatriculation, qui peut être justifiée par un extrait du fichier des véhicules ou par la copie de la carte grise, soit intervenue dans un délai rapproché de la date de facturation (CAA Bordeaux, 4ème ch., 22 janvier 2004, n° 01BX00634, précité). De même, l'immatriculation d'un véhicule dans un autre Etat membre fait partie des exemples de justificatifs cités par la doctrine administrative (instruction du 31 juillet 1992, BOI 3 CA-92 N° Lexbase : X0530AAU et instruction du 28 mars 1997, BOI 3 A-3-97 N° Lexbase : X7145ABA), permettant d'apporter la preuve de l'expédition ou du transport du véhicule dans cet autre Etat membre. La liste établie par la doctrine n'a d'ailleurs qu'une valeur indicative et n'est pas limitative (TA Versailles, 24 avril 2003, n° 98-4609 et 99-2157 précités).

Sur ce point, et s'agissant des justificatifs pertinents établissant la réalité de la livraison, la cour administrative d'appel de Nancy se montre particulièrement exigeante. La cour écarte la certification établie par les services de la préfecture de l'Etat de Rhein-Neckar-Kreis, attestant que les 837 véhicules avaient reçu une carte grise et une immatriculation allemande. La cour juge que ces formalités pouvaient être effectuées sans que les véhicules soient présents sur le territoire allemand. De même, la cour écarte l'attestation produite par la SA Marc Leon International Services par laquelle la société allemande chargée du contrôle technique certifie que ses employés auraient contrôlé les véhicules en cause en 1993 et 1994 dans les locaux de l'intermédiaire allemand avec lequel la SA Marc Leon était en relation. Il est vrai que le document fourni ne porte pas mention du détail des contrôles, des lieux et dates où ils ont été effectués et cela alors même que les pièces jointes faisaient état de la possibilité pour le dirigeant de faire procéder aux contrôles des véhicules sur le territoire français. C'est là, sans doute, un exemple des exigences croissantes qui semblent devoir peser sur le fournisseur dans le cadre de la lutte contre la fraude à la TVA.

Notons, enfin, que la décision de la cour administrative d'appel de Nancy, si elle précise les éléments qui permettent à l'administration de remettre en cause une livraison, ne nous permet pas, cependant, de savoir si le service a tiré toutes les conséquences de l'absence de livraison des véhicules en Allemagne et a regardé l'intermédiaire avec lequel traitait la SA Marc Léon International Service comme un intermédiaire opaque disposant éventuellement d'un établissement stable sur le sol français. La disposition de l'article 262 ter amenant à s'interroger sur les exigences qui pèsent sur le vendeur au moment de la vente, doit-il s'en tenir aux apparences de la livraison pour se placer sous le régime de l'article 262 ter I-1°) du CGI ou doit-il exiger de l'acquéreur des éléments qui indubitablement lui permettent de s'assurer de la réalité de la livraison dans le pays de destination ? C'est un débat ouvert entre le juge national et le juge communautaire. La loi de finances pour 2007 a tranché pour partie le débat en codifiant l'alinéa suivant, sous l'article 262 ter du CGI : "l'exonération ne s'applique pas lorsqu'il est démontré que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle".

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