La lettre juridique n°200 du 2 février 2006 : Fiscalité financière

[Textes] La réforme des plus-values mobilières des particuliers

Réf. : Loi n° 2005-1720, 30 décembre 2005, de finances rectificative pour 2005, art. 29 (N° Lexbase : L6430HEU)

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par S. D.

le 07 Octobre 2010

L'article 29 de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 a substantiellement modifié le régime fiscal des plus-values de cession de titres réalisées par les particuliers. Sur le modèle des plus-values réalisées en matière immobilière, cette réforme s'articule autour de deux points. Le premier point introduit des abattements en fonction de la durée de détention des valeurs mobilières au moins égal à 6 ans, avec une exonération totale au bout de huit ans. Soulignons que le choix de la durée se justifie par le fait que les entreprises, selon les dires du Gouvernement, connaissent une "crise de croissance" au bout de leur sixième année d'existence. Cette disposition est d'ordre général. En effet, elle est destinée à s'appliquer à tous les actionnaires et entrera en vigueur pour les titres enregistrés à partir du 1er janvier 2006 (1). Le second point prévoit une exonération totale de plus-values sur la cession de leur PME pour les dirigeants arrivés à l'âge de la retraite et qui ont détenu leurs actions pendant huit ans, afin de favoriser les transmissions d'entreprises (2). A cet effet, sont insérés, après l'article 150-0 D du CGI , deux nouveaux articles 150-0 D bis et 150-0 D ter. 1. L'exonération progressive de plus-values mobilières des particuliers

Les plus-values de cession de titres des sociétés, cotées et non cotées, établies dans l'espace économique européen bénéficieront, dorénavant, d'abattements progressifs, lorsque les titres cédés auront été détenus au moins six ans, et seront totalement exonérées d'impôt, lorsque cette détention sera supérieure à huit ans.

1.1. Le régime antérieur

La loi de finances pour 2000 avait fusionné les quatre régimes, antérieurement en vigueur, pour l'imposition des plus-values sur valeurs mobilières réalisées par les particuliers . De ce fait, elle a institué un régime unique d'imposition de ces plus-values. Ainsi, ces dernières sont imposées au taux de 16 %, hors prélèvements sociaux, lorsque le montant annuel des cessions excède la limite de 15 000 euros . Ce seuil d'imposition s'apprécie en totalisant l'ensemble des cessions réalisées, au cours de la même année, par l'ensemble des membres du foyer fiscal .

Sont concernés par ce régime, les plus-values réalisées par des personnes physiques, dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, à l'occasion de la cession à titre onéreux, qu'il s'agisse de négociations effectuées en bourse ou de cessions entre particuliers (ventes, apports en société, échanges, partages autres que des successions) de valeurs mobilières, droits sociaux ou titres assimilés que sont, notamment, les actions, obligations, titres participatifs, usufruit ou nue-propriété portant sur ces valeurs, droits ou titres, ou titres les représentant (SICAV et FCP).

Aux termes des dispositions de l'article 150-0 D, 1°, , les gains nets sont constitués par la différence entre le prix de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittées par le cédant et leur prix d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutations.

Concernant les moins-values résultant de telles cessions, elles d'imputent sur des gains de même nature réalisés la même année ou les dix années suivantes, à la condition, toutefois, que le seuil annuel de cession soit franchi.

Il convient de souligner, qu'à titre exceptionnel, les plus-values réalisées par des particuliers sont imposables dans la catégorie des BNC, si elles sont effectuées dans des conditions similaires à celles qui caractérisent une activité exercée par une personne se livrant à titre professionnel à ce type d'opérations. Les plus-values réalisées à titre habituel restent, donc, imposables au titre des plus-values sur valeurs mobilières.

1.2. Le régime modifié

La loi de finances rectificative pour 2005 institue un abattement progressif d'un tiers par année de détention à partir de la sixième année applicable aux gains nets de cession à titre onéreux de certaines valeurs mobilières. Ces plus-values sont, ainsi, exonérées totalement et les moins-values cessent d'être imputables au-delà de la huitième année de détention.

Le bénéfice de cet abattement est subordonné au respect de diverses conditions. Trois conditions sont relatives aux sociétés émettrices. Ces dernières doivent :

  • être passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumise sur option à cet impôt ;
  • exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités précitées. Cette condition s'apprécie de manière continue pendant les cinq années précédant la cession ;
  • avoir son siège social dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale.

Une série de sociétés sont, toutefois, exclues de ce nouveau régime. Il s'agit, notamment, des sociétés ayant pour activité la gestion des titres de participation et des titres de placement, telles que les sociétés de capital-risque (SCR), les sociétés d'investissement (SDI), les sociétés d'investissement à capital variable (SICAV), les sociétés de développement régional ou bien encore les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable et les société unipersonnelle d'investissement à risque (SUIR). S'agissant de ces dernières, l'exclusion du bénéfice de l'exonération ne s'applique que pendant les dix premières années suivant celle de sa création parce que, durant cette période, elles sont exonérées d'impôt sur les sociétés. Ce qui nous permet d'enchaîner sur la deuxième série de sociétés mises à l'écart de l'abattement. Il s'agit, en effet, des cessions qui bénéficient, déjà, d'avantages fiscaux. Ainsi, sont hors du champ d'application de l'abattement l'avantage prévu à l'article 163 bis C tiré de l'acquisition des options sur actions (stock-options), les plus-values sur les cessions de titres de SA ayant pour objet exclusif le financement d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles (SOFICA), ou de sociétés agréées pour le financement de la pêche artisanale (SOFIPECHE), ainsi qu'aux pertes consécutives à l'annulation des titres dans le cadre d'une procédure collective.

S'agissant de la durée de détention, celle-ci est, en principe, décomptée à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition ou de souscription des titres ou droits ou à partir du 1er janvier 2006, s'ils ont été acquis ou souscrits antérieurement, le fait générateur variant en fonction des situations. Ainsi, par exemple, en cas de cession de titres ou droits effectuée par une personne interposée, le fait générateur faisant courir le délai de détention est la date d'acquisition ou de souscription des titres par cette dernière.

Cet abattement du tiers est déduit du montant de la plus-value, constituée par la différence entre le prix de cession des titres et leur prix d'acquisition.

Il convient de souligner la mise en place de la règle du "premier entré, premier sorti" pour le calcul des plus-values en cas de cession de titres ou de droits appartenant à une série de titres ou droits de même nature, mais acquis ou souscrits à des dates différentes. Dans cette hypothèse, la cession est réputée porter sur les titres ou droits acquis ou souscrits aux dates les plus anciennes.

Le montant de l'abattement, ainsi calculé, doit être déclaré par le bénéficiaire dans sa déclaration de revenus n° 2042. Toutefois, il n'est pas pris en compte pour la calcul de l'assiette de la CSG et de la CRDS. En revanche, il est à ajouter au montant des revenus et plus-values retenu pour le calcul du revenu de référence.

Mais attention, étant donné les modalités de décompte de la durée de détention, l'abattement ne s'appliquera qu'aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2012, à moins que celles-ci soient effectuées par des dirigeants de PME partant à la retraite. 

2. Le cas particulier des dirigeants de PME partant à la retraite

Les dirigeants de PME qui cèdent les titres ou droits, qu'ils ont acquis ou souscrit avant le 1er janvier 2006, de la société dans laquelle ils exercent leur fonction pour partir à la retraite peuvent bénéficier de l'exonération des plus-values, dès l'imposition des revenus 2006.

A cette fin, certaines conditions, là encore, doivent être réunies. Elles concernent, essentiellement, le dirigeant.

Aussi, celui-ci doit :

  • avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession l'une des fonctions mentionnées au 1° de l'article 885 O bis du CGI , à savoir, soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit associé en nom d'une société de personnes, soit président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions. Ces fonctions doivent être effectivement exercées et donner lieu à une rémunération normale. Celle-ci doit représenter plus de la moitié des revenus, à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du CGI .
  • avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et soeurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ;
  • et, enfin, dans l'année suivant la cession, cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite.

Par ailleurs, la cession doit porter sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société, dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l'usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société.

Enfin, la société dont les titres ou les droits sont cédés doit répondre à certains critères qui correspondent à la définition communautaire d'une PME :

  • elle doit employer moins de deux cent cinquante salariés au 31 décembre de l'année précédant celle de la cession ou, à défaut, au 31 décembre de la deuxième ou de la troisième année précédant celle de la cession ;
  • elle doit réaliser un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros au cours du dernier exercice clos ou a un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros à la clôture du dernier exercice ;
  • enfin, son capital ou ses droits de vote ne doivent pas être détenus à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions de nombre de salariés et chiffre d'affaire ou de bilan), de manière continue au cours du dernier exercice clos. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations de sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de développement régional, des sociétés financières d'innovation et des sociétés unipersonnelles d'investissement à risque ne sont pas prises en compte, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 du CGI entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. Cette condition s'apprécie, aussi, de manière continue au cours du dernier exercice clos.

Enfin, en cas de cession des titres ou droits à une entreprise, le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement, de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire. En cas de non-respect de cette condition, à un moment quelconque au cours des trois années qui suivent la cession des titres ou droits, l'abattement est remis en cause au titre de cette année.

La principale différence avec le régime général concernent les dispositions relatives au calcul de la durée de détention. En effet, celle-ci est décomptée, en principe, à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition ou de souscription des titres ou des droits cédés, à moins qu'interviennent des événements particuliers. Dans cette hypothèse, la durée de détention est calculée à partir du 1er janvier de l'année au cours de laquelle il est intervenu.

Quant aux plus-values, elles aussi bénéficient de la règle du "premier entré, premier sorti". En outre, en cas de cessions antérieures de titres ou droits de la société concernée pour lesquelles le gain net a été déterminé en retenant un prix d'acquisition calculé suivant la règle de la valeur moyenne pondérée d'acquisition, le nombre de titres ou droits cédés antérieurement est réputé avoir été prélevé en priorité sur les titres ou droits acquis ou souscrits aux dates les plus anciennes.

Surtout, ces dispositions s'appliquent aux cessions réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2013 de titres ou de droits ou souscrits avant le 1er janvier 2006.

Cette réforme à deux vitesses essuie, actuellement, de nombreuses critiques, parmi lesquelles l'acquisition trop tardive de l'exonération totale et l'exclusion de l'abattement de l'assiette des prélèvements sociaux. Toutefois, ne soyons pas trop exigeants, cette promesse présidentielle attendue par les entreprises est particulièrement favorable à l'investissement à long terme des particuliers dans les actions tout en assurant les fonds propres des entreprises.

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