La lettre juridique n°200 du 2 février 2006 : Fiscalité des particuliers

[Textes] L'actualité des donations

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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris

le 07 Octobre 2010

Le 17 janvier 2006, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie est monté à la tribune de l'Assemblée Nationale, afin de préciser, à maintes reprises, le régime fiscal des donations. Lexbase Hebdo - éditions fiscale vous en propose une synthèse commentée. 1. Présents d'usage

L'administration vient de préciser qu'il était admis, "compte tenu, notamment, du montant maximum des sommes pouvant être placées par des parents sur un plan d'épargne logement (PEL) ouvert au nom de leur enfant, que ce placement financier puisse être qualifié de présent d'usage" (QE n° 63526 de M. Chartier Jérôme, JOANQ, 26 avril 2005 p. 4159, min. Eco., réponse publ. 17 janvier 2006 p. 504, 12ème législature N° Lexbase : L5607HGR). Autrement dit, elle admet que les dispositions de l'article 784 du CGI , qui imposent le rappel des donations, ne soient pas opposées aux parties, lorsque des parents alimentent un PEL, dont le titulaire est l'un de leurs enfants. Le don, ainsi, réalisé est et reste non taxable. Cette position de l'administration peut étonner. En effet, l'ouverture d'un PEL s'accompagne d'un versement initial minimum de 225 euros et, chaque année, il doit être versé 540 euros. Mais, le montant maximum pouvant être placé est de 61 200 euros !

On sait que si l'article 784 du CGI impose, sur le plan fiscal, le rapport de toutes les donations de moins de six ans, lors d'une nouvelle mutation à titre gratuit entre les mêmes personnes, ces dispositions ne s'appliquent pas aux présents d'usage (Doc. adm. 7 G 3162, 20 décembre 1996, n° 2). Deux conditions doivent être réunies pour que soit reconnue la qualification de présent d'usage : l'usage et la modicité du présent. L'article 852 du Code civil (N° Lexbase : L3493ABY) l'énonce sans ambages : la condition de l'absence de rapport, civil comme, par conséquence, fiscal, est lié à un usage. Tel est le cas du cadeau réalisé à l'occasion de certains évènements marquants de la vie, comme un anniversaire, les étrennes, la réussite à un examen ou encore le mariage. Certains auteurs proposent, ce qui n'a pas été validé par les juges, d'étendre cette notion aux hypothèses où des parents aident leurs enfants, comme lors de l'acquisition d'un bien immobilier ou lors de l'installation dans la vie professionnelle. La modicité du présent est, elle, appréciée au regard de la situation financière du "donateur" et de sa générosité. Ainsi, ne relèvent pas des dispositions des articles 784 du CGI et 852 du Code civil des chèques d'un montant total de 30 500 euros remis à deux enfants par une personne disposant d'un patrimoine de 1 250 000 euros (CA Paris, 1ère, B, 11 avril 2002, n° 2001/03791, M. Le directeur des services fiscaux de Paris Ouest c/ Madame Dalloz-Furet N° Lexbase : A5521AY7 ; lire Fabien Girard de Barros, Succession : la non réintégration des présents d'usage, Lexbase Hebdo,  n° 22 du 7 mai 2002 - édition fiscale N° Lexbase : N2810AAC).

2. Dons exceptionnels de sommes d'argent

Nul n'ignore que, jusqu'au 31 décembre 2005, les dons de sommes d'argent consentis en pleine propriété étaient exonérés de droits de mutation à titre gratuit à hauteur de 30 000 euros.

2.1. Insertion d'une obligation d'emploi dans un acte notarié de donation

Cette disposition temporaire, dénommé "dons exceptionnels", avait pour objectif, selon les termes du projet de loi, d'encourager les jeunes générations à consommer. En raison de cette finalité, l'administration fiscale vient de préciser que, dans l'hypothèse où, dans l'acte de donation constatant une telle donation, il aurait été inséré une obligation d'emploi, comme, par exemple, dans l'acquisition de la nue-propriété d'un bien donné, cette clause serait de nature à remettre en cause l'application du régime d'exonération (QE n° 77708 de M. Mariani Thierry, JOANQ, 8 novembre 2005, p. 10271, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 511, 12ème législature N° Lexbase : L5610HGU). L'administration justifie cette position, au motif qu'une telle clause est de nature à écarter toute possibilité pour le bénéficiaire d'acheter et d'utiliser pleinement des biens ou services avec les sommes reçues, en contradiction avec le but poursuivi par le loi incitative. Cette précision soulève des interrogations. En effet, cette exigence de consommation par le donataire, bien que reprise dans la présentation de l'instruction administrative commentant ce dispositif, n'avait pas été explicitée dans le texte même. Devant le Sénat, lors de la discussion du texte, le Ministre avait déclaré : "nous avons voulu laisser totalement libre d'utilisation ces 20 000 euros [le montant initialement fixé à 20 000 euros a été ultérieurement porté à 30 000 euros]. Une tentative de lister certains produits a tourné court : il fallait permettre à la solidarité entre les générations de s'exprimer, mais ne surtout pas se préoccuper de ce qui serait acheté ! Ce n'est pas notre rôle". L'usage fait par le bénéficiaire semblait, donc, indifférent jusqu'à la récente réponse ministérielle.

2.2. Rappel des donations antérieures

L'article 784 du CGI impose de prendre en compte les donations antérieures pour déterminer les droits dus, lors d'une nouvelle transmission à titre gratuit entre les mêmes personnes. Cependant, seules sont rapportables les donations consenties depuis moins de six ans. Dans un récente réponse ministérielle, il vient d'être confirmé que cette règle ne s'applique pas aux dons exceptionnels, lors de la succession du donateur (QE n° 72118 de M. Lachaud Yvan, JOANQ, 9 août 2005, p. 7621, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 504, 12ème législature N° Lexbase : L5609HGT). On remarquera que le fait que les dons exceptionnels ne soient pas pris en compte pour la liquidation des droits dus à raison de mutations à titre gratuit consenties postérieurement entre les mêmes personnes ne permet pas toujours une totale transparence de ces derniers lors de la succession du donateur. En effet, les règles civiles peuvent conduire à la "reprise" partielle de cette exonération. Ainsi, dans l'hypothèse d'une personne, mariée sous un régime de communauté, qui aurait donnée seule 30 000 euros à son fils, sans l'accord de son conjoint, au mépris de l'article 1422 du Code civil (N° Lexbase : L1551AB3), le droit des régimes matrimoniaux lui impose, au jour de son décès, de rapporter à la communauté une récompense d'égale montant à la somme donnée. Par suite, sa succession incluant la moitié de l'actif de cette communauté, l'équivalent de la moitié du don est soumis aux droits de mutation par décès.

3. Application de l'article 784 du CGI

Deux règles viennent en application du principe, selon lequel les donations consenties par une personne et sa succession sont reliées les unes aux autres de telle sorte que les biens transmis fassent, en principe, l'objet d'une liquidation unique des droits. La première est la règle du rappel civil qui conduit à prendre en compte les donations antérieures pour vérifier si la réserve de chaque successible est respectée. La seconde règle est celle du rapport fiscal, codifiée à l'article 784 du CGI, qui impose de prendre en compte les donations antérieures pour déterminer les droits dus lors d'une nouvelle transmission à titre gratuit. Cette règle du rapport, qui se limite, depuis le 1er janvier 2006, aux donations consenties depuis six ans, induit un effet de seuil important selon que la nouvelle transmission se situe quelques jours avant ou après ce délai. Pour cette raison, il a été demandé au ministre de l'Economie s'il était envisageable d'introduire un barème d'abattements applicable proportionnellement aux années écoulées entre les deux transmission à titre gratuit. La réponse est négative (QE n° 69250 de M. Masdeu-Arus Jacques, JOANQ, 5 juillet 2005, p. 6534, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 505, 12ème législature N° Lexbase : L5608HGS). Le motif du refus est double : selon l'administration, cette manière de procéder n'apparaît pas adéquate avec les mécanismes des donations, qui sont assimilées à une ouverture partielle et anticipée de la succession, mais surtout, la mesure aurait un coût élevé ! Voilà une motivation pour le moins franche.

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