Réf. : Circulaire du 23 novembre 2005, NOR INTB0500105C, visant à améliorer l'intercommunalité (N° Lexbase : L7580HEH)
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le 07 Octobre 2010
La coopération intercommunale a connu une multiplication d'appréciations négatives au cours de l'année 2005. Faisant suite au rapport du Conseil économique et social présenté par Pierre-Jean Rozet, au rapport de la Commission d'enquête sur la fiscalité locale et au "Livre noir" de l'intercommunalité, présenté par des parlementaires (2), le rapport de la Cour des comptes laissait craindre un surcroît de critiques. Le premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, a présenté le rapport de manière rassurante aux maires et présidents d'EPCI lors du Congrès des maires en novembre dernier. Pour autant, son contenu est loin d'être vide d'observations sévères puisqu'il constate un indéniable inachèvement du processus et propose un certain nombre de recommandations. Le rapport constate que la coopération intercommunale n'a pas été réellement simplifiée depuis la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999, relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale (N° Lexbase : L1827ASH), et que cette réforme n'a pas permis un effet suffisant de mutualisation de moyens, d'économie d'échelles ou de nouveaux services rendus. Le rapport souligne que l'intercommunalité ne peut produire ses effets bénéfiques si la logique d'intégration n'est pas conduite à son terme pour des projets cohérents de développement et d'aménagement territorial.
Lors de ce même Congrès des maires et présidents d'EPCI, le ministre délégué aux Collectivités territoriales, Brice Hortefeux, a affirmé la volonté gouvernementale de mettre en oeuvre des solutions aux principales critiques et annoncé une circulaire aux préfets pour passer à "un nouvel âge de l'intercommunalité". La circulaire n'a guère tardé puisqu'elle fut envoyée aux représentants de l'Etat dès le 23 novembre 2005. Son contenu apparaît clairement inspiré des recommandations du rapport de la Cour des comptes dont les grandes lignes étaient connues depuis des mois.
2. La volonté de consolider l'intercommunalité
La circulaire se compose d'un document succinct de deux pages complété par des annexes : une série de huit fiches pratiques. La volonté exprimée a pour objectif de consolider la démarche intercommunale par l'amélioration du mode de constitution et de fonctionnement des EPCI. La relance de la rationalisation et de la simplification de l'intercommunalité s'appuie essentiellement sur les préfets et les moyens dont ils ont été dotés par la loi précitée du 12 juillet 1999 (loi "Chevènement"), complétée par celle du 13 août 2004 (loi n° 2004-809 du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales N° Lexbase : L0835GT4). Quatre axes prioritaires sont définis dans cet objectif : rationalisation des périmètres, définition de l'intérêt communautaire, exercice effectif des compétences transférées et clarification des relations financières entre les EPCI et les communes.
3. Le contenu de la circulaire
a. Un schéma d'orientation pour des périmètres pertinents
Les préfets ont la charge d'évaluer la pertinence de la carte intercommunale dans leur département. A cette fin, ils doivent élaborer, avant le 30 juin 2006, un schéma d'orientation de l'intercommunalité. Ce dispositif, non fondé sur une base légale, n'est pas contraignant : il est "un instrument concerté de proposition et de dialogue s'inscrivant dans une perspective d'évolution à moyen terme de la carte intercommunale". Ce schéma d'orientation est défini en association avec les élus concernés et avec l'appui de la Commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI). Ce document dresse, d'abord, un bilan de la mise en oeuvre locale de l'intercommunalité. Ensuite, dans un but de cohérence et de lisibilité, il recense les évolutions souhaitables de la carte intercommunale : propositions de fusions et élargissements de périmètres. Si le ministre délégué avait mentionné dans ses interventions l'inadéquation de communautés de communes inférieures à 5 000 habitants, la circulaire en revanche n'indique aucun seuil.
b. Des critères objectifs de définition de l'intérêt communautaire
La circulaire insiste particulièrement sur ce point puisque cette définition est nécessaire à l'exercice effectif des compétences transférées aux EPCI à fiscalité propre. La circulaire, au travers de ses trois premières fiches, contribue à donner un mode d'emploi de la définition de l'intérêt communautaire.
- Modalités de définition. L'intérêt communautaire, dans une logique de subsidiarité, permet de départager, au sein d'une compétence transférée, les actions demeurant de la compétence des communes membres de celles qui ont vocation à être mises en oeuvre par l'EPCI. La circulaire rappelle la différence de modalités de définition selon le type d'EPCI à fiscalité propre. Dans les communautés de communes, cette définition est approuvée par délibérations concordantes des conseils municipaux des communes membres. La circulaire, par souci de transparence, recommande aux préfets de prendre un arrêté pour l'intégrer aux statuts de ces EPCI. Dans les communautés d'agglomération et les communautés urbaines, cette définition relève directement du conseil communautaire, à la majorité des deux tiers de ses membres. La circulaire rappelle que cette majorité est calculée en référence à l'effectif total du conseil communautaire.
- Eléments de définition. En l'absence de définition légale, la circulaire appelle à l'utilisation de critères objectifs : critères financiers (seuils), physiques (superficie, nombre de lots...), géographiques (définition précise de localisation) ou qualitatifs (énoncé objectif et précis). Les formulations générales et évasives sont proscrites ainsi que les listes de zones, d'équipements ou d'opérations au sein des compétences concernées. Le recours à une liste reste néanmoins envisagé en cas d'impuissance des critères objectifs à déterminer avec précision la délimitation. La distinction entre investissement et fonctionnement ne saurait constituer une ligne de partage.
- La circulaire exclut tout nouveau report de la date butoir initialement prévue par la loi du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales, et reportée au 18 août 2006. Les préfets sont invités à rappeler aux élus qu'en cas d'absence d'une telle définition, avant expiration du délai, les compétences concernées ne peuvent être exercées par l'EPCI et après expiration, les compétences seraient intégralement transférées aux EPCI et les communes ne pourraient plus intervenir. La définition de l'intérêt communautaire pouvant être modifiée tout au cours de l'existence d'un EPCI, même après la date butoir, le préfet en tire les conséquences en modifiant les statuts.
c. La clarification des relations financières entre EPCI et communes
Le volet financier de la circulaire n'apporte guère de nouveauté puisque ses annexes éclairent les finesses de la loi du 13 août 2004.
- Les modalités de révision de l'attribution de compensation. La mise en oeuvre de la taxe professionnelle unique (TPU) implique que l'EPCI qui la perçoit verse aux communes membres une attribution de compensation. Cette dernière ne peut être indexée et doit être égale pour une commune à la différence entre le produit de la taxe professionnelle qu'elle percevait l'année précédant la mise en oeuvre de la TPU et le coût net des charges transférées à l'EPCI. La circulaire prévient contre une sous-évaluation des charges transférées et prône une objectivité.
- Les modalités d'évaluation des charges transférées. Le choix de la TPU implique la création concomitante d'une Commission d'évaluation des charges transférées qui est amenée à se prononcer lors de tout nouveau transfert de charges. La circulaire rappelle les modifications apportées aux modalités d'évaluation par la loi du 13 août 2004 selon les deux types de charges distinguées : charges de fonctionnement non liées à un équipement et charges de fonctionnement liées à un équipement.
- Les conditions de versement de fonds de concours. La circulaire rappelle la possibilité pour un EPCI à fiscalité propre de verser des fonds de concours à ses communes membres pour financer la réalisation ou le fonctionnement d'un équipement (CGCT, art. L. 5214-16 N° Lexbase : L1920HBQ, L. 5215-26 N° Lexbase : L1959GU4, L. 5216-5 N° Lexbase : L1921HBR). La loi du 13 août 2004 a supprimé la notion d'utilité dépassant manifestement l'intérêt communal mais introduit une nouvelle condition qui limite le plafond des fonds de concours versés à la part autofinancée par le bénéficiaire.
d. Transferts de personnels et mises à disposition de services entre un EPCI et ses communes membres
L'article L. 5211-4-1, II, alinéa 2, du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L1923GUR) prévoit que les services d'une commune membre peuvent, en tout ou partie, être mis à disposition de l'EPCI pour l'exercice de ses compétences, lorsque cela présente un intérêt dans le cadre d'une bonne organisation des services. Cette mise à disposition ne prend pas la forme individuelle prévue par l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (N° Lexbase : L7448AGX), qui exclurait les agents stagiaires ou non titulaires. Cette interprétation ne semblait pas s'imposer dans deux réponses ministérielles du mois d'octobre mais était confirmée par le ministre délégué aux Collectivités territoriales lors de son intervention au Congrès des Maires et dans la circulaire relative à l'intercommunalité.
e. Bilan 2005 du financement des EPCI
La circulaire, dans sa dernière annexe, conclut à l'amélioration du financement par la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, de finances pour 2005, (N° Lexbase : L5203GUA). Elle a permis d'améliorer la dotation d'intercommunalité des communautés de communes au travers du rattrapage des dotations par habitants ou par la suppression de l'écrêtement. Elle a aussi renforcé la prévisibilité de cette dotation en simplifiant le CIF (coefficient d'intégration fiscale), en augmentant le poids de la dotation de base, moins instable que la dotation de péréquation, ainsi qu'au travers de la garantie en fonction d'un niveau absolu de CIF. Ces dispositions n'ont pas été modifiées par la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005, de finances pour 2006 (N° Lexbase : L6429HET).
Nicolas Wismer
Collaborateur juridique à des associations de collectivités territoriales
Chargé d'enseignement en droit public à l'IEP de Lyon
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