Réf. : Cass. com., 27 septembre 2005, n° 03-20.665, M. Claude Gros c/ Directeur des services fiscaux de Paris Ouest, FS-P+B (N° Lexbase : A5807DKB)
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N9633AIM
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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris
le 07 Octobre 2010
On sait que, conformément aux dispositions de l'article 885 O quater du CGI , les parts ou actions de sociétés ayant pour activité la gestion de leur patrimoine mobilier (société de gestion de portefeuille notamment) ou immobilier (société ayant pour objet de gérer des immeubles nus) ne sont pas considérées comme des biens professionnels. En ce qui concerne les sociétés dont l'actif est principalement composé de participations financières, il y a lieu, au regard de l'ISF, de distinguer entre celles qui ne font qu'exercer les prérogatives usuelles d'un actionnaire et celles qui sont animatrices de leur groupe. Dans cette seconde hypothèse, les parts ou actions peuvent être exonérées si le redevable y exerce l'une des fonctions de direction énumérées par la loi et détient 25 % au moins du capital ou si sa participation représente 50 % de son patrimoine taxable.
Cette notion de "holding animatrice" est, également, d'importance, d'une part, en matière de paiement différé et fractionné prévu pour la transmission d'entreprises et codifié à l'article 397 A de l'annexe III au CGI , d'autre part, s'agissant de l'exonération partielle de droits de mutation prévue à l'article 787 C du CGI . La holding sera considérée comme animatrice effective du groupe si elle participe activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales et si elle rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services d'ordres juridiques, administratifs, comptables financiers ou immobiliers. Ces sociétés utilisent, ainsi, leur participation dans le cadre d'une activité industrielle ou commerciale qui mobilise des moyens spécifiques (Doc. adm. 7 S 3323, 1er octobre 1999, n° 16). Cette dérogation ne s'étend pas à une holding animatrice qui détient à son actif uniquement des parts de sociétés civiles immobilières ayant elles même pour activité principale la gestion de leur patrimoine mobilier ou immobilier (QE n° 9030 de M. Pierre Ducourt, JOANQ, 23 décembre 2002, p. 5076, min. Eco., réponse publ. 19 mai 2003, p. 3885, 12ème législature N° Lexbase : L4438BHT). Autrement dit, selon l'administration, l'interposition d'une holding animatrice ne saurait avoir pour effet de contourner la loi qui exclut de l'exonération des biens professionnels de telles sociétés. On remarquera que la définition de holding animatrice retenue pour l'ISF ne recouvre pas totalement celle mentionnée dans la doctrine relative au paiement différé. En effet, selon cette dernière, les sociétés holdings admises au régime de faveur sont celles qui, outre la gestion d'un portefeuille de participation, assurent la gestion de la trésorerie du groupe, effectuent au profit des sociétés du groupe des prestations de services correspondant à des fonctions de direction, de gestion de coordination ou de contrôle et se livrent, le cas échéant, à des activités de recherches et de développement au profit du groupe (Doc. adm., 7 A 4322, 10 septembre 1996, n° 13). En revanche, l'instruction administrative concernant l'exonération partielle afférente aux transmissions d'entreprise reprend mot pour mot la définition retenue en matière d'ISF (instruction du 18 juillet 2001, BOI n° 7 G-6-01 N° Lexbase : X5901AAS). Il serait, néanmoins, souhaitable que l'administration adopte une définition uniforme pour l'ensemble des impôts et dispositifs de faveur concernés.
2. ...à l'épreuve de la jurisprudence
C'est un faisceau d'indices qui permet à l'administration, sous le contrôle du juge, de valider ou non la qualification retenue par le redevable de l'ISF. Ainsi, la preuve du rôle d'animation effective de la société holding résulte essentiellement d'une appréciation au cas par cas même si certains indices peuvent être décelés. Certaines des décisions rendues donnent des précisions relatives aux critères négatifs. En effet, si, au regard de la notion de groupe, il apparaît que l'existence de deux sociétés, mère et fille, ne permet pas d'écarter l'exonération, il a été jugé, s'agissant de la notion d'animation, que cette preuve n'était pas apportée lorsque la holding détenait la presque totalité du capital de filiale et que la direction des deux sociétés était exercée par des membres de la même famille (Cass. com., 8 juillet 1997, n° 95-14.084, Mme Josephine Bedrossian c/ M. le Directeur général des impôts N° Lexbase : A2328APW ; CA Dijon, 14 février 2003, n° 01-1955, Elias c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie). D'autres concernent les critères positifs. Ainsi, la Haute juridiction a pu déduire du fait qu'une holding détenait plus de 50 % de sa filiale et disposait de droit de vote double son caractère de holding animatrice dans la mesure où elle était, ainsi, nécessairement amenée à contrôler, gérer et animer sa filiale (Cass. com., 2 juin 1992, n° 90-14.613, Directeur général des impôts c/ M Mantelet N° Lexbase : A4183ABK). En conséquence, la preuve qu'une holding est animatrice effective de son groupe résulte de la constatation de son influence réelle sur la politique, l'activité ou le fonctionnement de ses filiales.
Concrètement, à l'examen de la jurisprudence, la reconnaissance de la qualité d'animatrice passe par une réponse positive à deux questions. En premier lieu, la holding dispose-t-elle de la majorité du capital de ses filiales ? A défaut, même si, par ailleurs, l'associé de la holding détient directement une partie du capital de la filiale, elle ne peut être considérée comme animatrice (Cass. com., 7 décembre 1993, n° 1957 P : au cas particulier, la holding détenait 39,53 % du capital de sa filiale et son associé directement 36,16 %). En effet, seule cette détention majoritaire lui permet, d'une part, de pouvoir participer activement à la politique du groupe et, d'autre part, de contrôler les filiales. En second lieu, la holding effectue-t-elle des tâches qui permettent de justifier de la réalité et de l'effectivité de son rôle d'animation ? S'agissant de cette fourniture de services spécifiques, le juge vient de décider, dans un arrêt en date du 27 septembre "Claude Gros", qu'il n'exigeait pas qu'ils soient rendus de manière habituelle. Au cas particulier, il était démontré, par les comptes rendus des conseils d'administration et les rapports des commissaires aux comptes, que la holding effectuait des prestations de services consistant à étudier et conseiller les investissements assurant, ainsi, la croissance externe du groupe et ses réorientations stratégiques. Par ailleurs, il résultait des constatations des juges du fonds que la holding, par l'intermédiaire de son PDG assurait un contrôle effectif des filiales en nommant les administrateurs de ces dernières, proposant des augmentations de capital, embauchant les cadres supérieurs et en intervenant sur les contrats commerciaux importants. Dans la même décision, la Haute cour judiciaire nous précise qu'il importait peu que la holding ne dispose pas, pour réaliser l'animation du groupe, de structures importantes. En effet, le personnel de la société était réduit à un PDG et une secrétaire. Néanmoins, la société exerçait une influence directe sur celle du groupe et qui allait au-delà de la seule gestion de participations.
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