La lettre juridique n°184 du 6 octobre 2005 : Concurrence

[Textes] Bulletin d'actualités en droit de la concurrence n° 22 : panorama de la législation communautaire (seconde partie) - Freshfields Bruckhaus Deringer

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[Textes] Bulletin d'actualités en droit de la concurrence n° 22 : panorama de la législation communautaire (seconde partie) - Freshfields Bruckhaus Deringer. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3207618-textesbulletindactualitesendroitdelaconcurrencen22panoramadelalegislationcommunautaire
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par Freshfields Bruckhaus Deringer Paris

le 07 Octobre 2010

Tous les deux mois, le cabinet Freshfields Bruckhaus Deringer, en partenariat avec les éditions Lexbase, sélectionne l'essentiel de la législation communautaire en droit de la concurrence (cf. Bulletin d'actualités en droit de la concurrence n° 22 : panorama de la législation communautaire (première partie) - Freshfields Bruckhaus Deringer N° Lexbase : N8889AI3).
  • Publication par la Commission, le 18 juillet 2005, des orientations sur la clôture de la procédure de contrôle d'une opération de concentration après l'abandon du rapprochement par les parties

Le Règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des concentrations (N° Lexbase : L6036DNU) a introduit à l'article 6 une nouvelle disposition relative à la clôture des procédures de contrôle des concentrations sans décision finale, après que la Commission a engagé la procédure sur le fondement de l'article 6 § 1 point c), première phrase (23). Cette nouvelle disposition stipule que "sans préjudice de l'article 9, cette procédure sera close par voie de décision conformément à l'article 8 § 1 à 4, à moins que les entreprises concernées n'aient démontré, à la satisfaction de la Commission, qu'elles ont abandonné la concentration" (24). Il convient de relever que cette disposition nouvelle ne trouve pas à s'appliquer en l'absence de l'engagement d'une procédure de Phase 2.

Le 18 juillet 2005, afin de préciser les conditions requises pour la mise en oeuvre de cette disposition, la DG concurrence a publié des orientations.

À titre de principe général, les conditions requises pour établir la preuve de l'abandon de la concentration doivent correspondre à celles exigées, en termes de forme légale, de format, d'intensité, etc., pour que l'acte initial ait été considéré comme suffisant pour rendre la concentration notifiable. Dans l'hypothèse où, à partir de cet acte initial, les parties renforceraient leurs liens contractuels en concluant, par exemple, un accord contraignant après avoir notifié, sur la base de leur bonne foi, l'opération à la Commission, les conditions requises pour faire la preuve de l'abandon doivent correspondre au dernier acte en date (à savoir, un accord contraignant dans cet exemple).

Conformément à ce principe, en cas de réalisation de la concentration avant une décision de la Commission, le rétablissement du statu quo ante doit être démontré.

Dans les autres cas, le simple retrait de la notification ne saurait être considéré comme une preuve suffisante de l'abandon de la concentration au sens de l'article 6 § 1 point c). De la même manière, des modifications mineures qui seraient apportées à la concentration, par exemple en ce qui concerne la période convenue pour la réalisation de l'opération ou des modifications mineures dans la répartition du capital qui ne concernent ni un changement dans le contrôle ni la qualité de ce changement, ne sauraient être considérées comme un abandon de l'opération de concentration originelle (25).

Les orientations publiées par la Commission précisent les conditions nécessaires à la mise en oeuvre de cette nouvelle clause en présence d'un "accord contraignant", d'une "intention de conclure un accord de bonne foi", de l'"annonce publique d'une offre publique ou d'une intention de faire une offre publique" et de "concentrations réalisées" :

· Accord contraignant : la preuve de l'annulation, légalement obligatoire, de l'accord sous la forme envisagée par l'accord initial (il s'agira en principe d'un document signé par toutes les parties) sera exigée. L'expression de l'intention d'annuler l'accord ou de ne pas réaliser la concentration notifiée ainsi que les déclarations unilatérales des parties ne seront pas considérées comme suffisantes.

· Intention de conclure un accord de bonne foi : en cas de lettre d'intention ou de protocole d'accord reflétant une telle intention de bonne foi, des documents démontrant que le fondement de l'engagement de bonne foi a été annulé seront exigés. Quant aux autres formes possibles pouvant prouver l'intention de bonne foi, l'abandon de l'opération doit renverser cette intention de bonne foi et correspondre, en termes de forme et d'intensité, à l'expression initiale de l'intention.

· Annonce publique d'une offre publique ou de l'intention de faire une offre publique : une annonce publique mettant un terme à la procédure d'offre sera requise. La forme de l'annonce et le public touché par celle-ci doivent être comparables à la forme et au public touché par la publicité initiale.

· Réalisation de la concentration : dans l'hypothèse où la concentration aurait été réalisée avant une décision de la Commission, les parties devront prouver que la situation prévalant avant la réalisation de la concentration a été rétablie.

Il revient aux parties de soumettre la documentation nécessaire pour répondre à ces exigences.

Il est intéressant de rapprocher ces orientations de l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 28 septembre 2004, MCI Inc contre Commission (N° Lexbase : A4427DDC) (26).

Pour rappel, dans cette affaire, MCI avait demandé au TPICE d'annuler la décision de la Commission du 28 juin 2000, interdisant la fusion entre les entreprises américaines de télécommunications MCI (Worldcom à l'époque des faits) et Sprint.

En effet, le 27 juin 2000, les parties notifiantes avaient informé les services de la Commission de ce qu'elles n'avaient plus l'intention de mettre en oeuvre le projet de concentration sous la forme présentée dans leur notification. Pourtant, le 28 juin, la Commission adoptait une décision déclarant l'opération en cause incompatible avec le marché commun, clôturant ainsi l'enquête de Phase II (27).

Par la suite, Worldcom a donc introduit un recours en annulation devant le TPICE contre la décision de la Commission, estimant notamment que la déclaration des parties du 27 juin constituait "un retrait formel de l'accord de fusion" notifié à la Commission.

La Commission a refusé de considérer la déclaration des parties notifiantes du 27 juin 2000 comme constitutive d'un retrait formel de l'accord de fusion notifié et a estimé que ces dernières se réservaient "la possibilité de fusionner leurs activités sous une autre forme à l'avenir". Pour sa part, le TPICE a considéré que le retrait de la notification ne concernait que l'accord décrit et identifié dans le plan de fusion, à l'exclusion de toute autre opération de concentration.

En revanche, les positions du TPICE et de la Commission divergent quant à la portée de ce retrait sur l'opération : alors que la Commission considère que, dans la mesure où les parties restaient libres de réaliser la fusion sous une autre forme, le dossier restait toujours ouvert, le Tribunal a opté pour un respect plus strict de l'autonomie des procédures, en soulignant qu'une déclaration pouvait valoir retrait de la notification, quand bien même les entreprises concernées poursuivraient leurs négociations en vue de la conclusion d'un accord sous une autre forme (lequel ferait, le cas échéant, l'objet d'une nouvelle notification à la Commission).

Par conséquent, il semble que l'adoption de la nouvelle disposition de l'article 6 du Règlement 139/2004, qui précise que les parties doivent démontrer, "à la satisfaction de la Commission, qu'elles ont abandonné la concentration", vient mettre un terme aux débats de l'arrêt du TPICE et rend la jurisprudence MCI caduque. En outre, il apparaît désormais clair qu'un simple retrait de l'opération de concentration par les parties ne suffira plus. Ces dernières devront en effet respecter le parallélisme des formes et se conformer aux exigences de la Commission telles qu'exprimées dans les lignes d'orientation précité

Texte des orientations de la Commission (en anglais)

Jacques-Philippe Gunther : jacques-philippe.gunther@freshfields.com
Jérôme Philippe : jerome.philippe@freshfields.com
Mathilde Mason : mathilde.mason@freshfields.com


(1) Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le Règlement (CE) n° 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil ("directive sur les pratiques commerciales déloyales"), JOUE du 11 juin 2005, L. 149/22.
(2) Le consommateur moyen est une personne normalement informée et raisonnablement attentive et avisée, compte tenu des facteurs sociaux, culturels et linguistiques.
(3) Articles 6 et 7.(4) Articles 8 et 9.
(5) Article 5.
(6) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/680.
(7) A cet égard, la Commission devrait adopter, dans le courant de l'année 2005, une communication sur les aides d'Etat et l'innovation. Voir également Bulletin n° 19 .
(8) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/937.
(9) Voir article ci-dessous intitulé La Commission assure une meilleure sécurité juridique pour le financement des services d'intérêt économique et général.
(10) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/716.
(11) JO L 1, 4 janvier 2003.
(12) - Opérateurs du secteur de l'électricité : producteurs, négociants en électricité ou en droits d'accès (ou en leurs dérivés financiers), propriétaires et exploitants de réseaux de transmission et de distribution, bourses d'électricité, exploitants des interconnecteurs "marchands", grossistes et agrégateurs, sociétés de vente au détail.- Opérateurs du secteur du gaz : producteurs de gaz (dont certains sont en dehors de l'Union européenne), importateurs, négociants en gaz ou en droits d'accès (ou en leurs dérivés financiers), propriétaires et exploitants de systèmes de transmission à haute pression et de distribution à basse pression, exploitants d'interconnecteurs "marchands" et agrégateurs, exploitants de stockage, intermédiaires, sociétés de vente au détail.
(13) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/719.
(14) Voir supra.
(15) Dans sa première phase, l'enquête porte uniquement sur les cartes de paiement. La deuxième étape de l'enquête pourrait intervenir à l'automne et concerner les services de la banque de détail.
(16) L'enquête sur ce secteur concernera la fourniture de produits et services d'assurance (dont la réassurance aux entreprises).
(17) Livre Vert de la Commission du 3 mai 2005 faisant partie d'un plan d'action sur les services financiers.
(18) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/527.
(19) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/937.
(20) Voir communiqué de presse de la Commission IP/04/638.
(21) Voir communiqué de presse de la Commission IP/05/680.
(22) Affaire C 280/00 du 24 juillet 2003 (N° Lexbase : A2343C9N).
(23) Pour rappel, le texte relatif à l'article 6 § 1 pt c), première phrase, sur l'ouverture d'une procédure de phase 2 relative à une enquête approfondie de l'opération, stipule : "sans préjudice du paragraphe 2, si la Commission constate que la concentration notifiée relève du présent Règlement et soulève des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun, elle décide d'engager la procédure".
(24) Article 6 § 1 pt c) deuxième phrase.
(25) La qualification de modification "mineure" au sens de ce paragraphe ne préjuge pas du point de savoir si la modification en cause constitue des informations nouvelles devant être portées à la connaissance de la Commission en vertu l'article 5 (3) du Règlement n° 802/2004 (N° Lexbase : L1967DYI).
(26) Affaire T-310/00 - Voir le Bulletin d'actualités en droit de la concurrence n° 19 section "Jurisprudence communautaire - TPICE", p. 22.
(27) Décision de la Commission 2003/790/CE du 28 juin 2000.

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