Constitue un manquement au principe de délicatesse le fait pour un avocat de prendre connaissance de messages provenant d'une messagerie électronique mise à la disposition du personnel par le cabinet, en dépit du caractère privé de cette boîte aux lettres électronique, nonobstant le fait que l'accès au serveur de l'opérateur internet sur lequel se trouvent stockés les messages en cause s'effectue par le moyen de l'ordinateur professionnel. Tel est le rappel opéré par la cour d'appel de Paris, dans un arrêt rendu le 22 janvier 2015 (CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 22 janvier 2015, n° 14/01680
N° Lexbase : A9097M9S). Dans cette affaire, après avoir pris connaissance de
mails échangés entre ses deux collaboratrices sur leurs messageries électroniques privées, un avocat a mis fin à leurs contrats de collaboration libérale. Celles-ci se sont adressées à la commission d'arbitrage et, dans le cadre de cette instance, l'avocate de l'une d'entre elles a saisi la commission de déontologie à propos de la production de ces
mails effectuée par l'avocat lors de la phase de conciliation. La commission de déontologie a émis un avis en demandant le retrait des correspondances en cause. L'autorité de poursuite a décidé d'ouvrir une procédure disciplinaire en ce que l'avocat aurait manqué aux principes essentiels de la profession d'avocat par violation du secret des correspondances privées et utilisation de celles-ci et en ce qu'il n'aurait pas respecté l'avis de la commission de déontologie en maintenant les courriers litigieux dans le cadre de l'instance d'arbitrage. La cour confirme l'atteinte au principe de délicatesse et rappelle, d'abord, que la communication des
mails litigieux pendant la phase de conciliation préalable suffit à constituer une utilisation et il n'est donc pas nécessaire de connaître la suite donnée au recours formé contre la sentence arbitrale pour statuer sur le grief relatif à l'utilisation de correspondances privées. La cour énonce, ensuite, que si l'avocat estimait qu'il avait un intérêt légitime à connaître un message stocké dans cette boîte aux lettres, en ce qu'il aurait présenté un caractère professionnel, il lui appartenait de solliciter l'autorisation du juge, selon les règles de l'article 145 du Code de procédure civile (
N° Lexbase : L1497H49). Par ailleurs, le droit à la preuve n'est pas un droit absolu et il suppose que celle-ci soit obtenue loyalement (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E6573ETM).
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