Par un arrêt rendu le 17 avril 2014, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné la Slovénie à la suite de la prononciation de dommages-intérêts contre un éditeur qui a publié un article jugé injurieux sur un parlementaire, dans le cadre d'un débat parlementaire portant sur la reconnaissance légale des relations homosexuelles (CEDH, 17 avril 2014, Req.
20981/10). L'article en question relatait, notamment, le comportement du parlementaire lors des débats, mimant par des gestes efféminés des parents homosexuels allant chercher leur enfant à l'école. Il qualifiait l'élu de "
décérébré" qui, dans un pays où le manque de main-d'oeuvre aurait été moins criant, n'aurait même pas pu obtenir un emploi d'homme d'entretien. Les juges nationaux avaient considéré que le qualificatif "
décérébré" constituait une attaque personnelle et, par suite, condamné l'éditeur pour insulte. La Cour souligne, tout d'abord, que les limites de la critique admissible sont plus larges à l'égard d'un homme politique, surtout si celui-ci a lui-même fait des déclarations publiques controversées, que d'un simple particulier. Elle reproche ensuite aux juges slovènes de n'avoir pas suffisamment pris en compte le contexte dans lequel l'article a été rédigé (un débat politique intense) et le style utilisé dans l'article (qui répondait aux propres remarques et comportement du parlementaire). Elle en conclut que l'article ne constituait pas une attaque personnelle gratuite contre le parlementaire, mais une réplique aux propres remarques publiques et, en particulier, au comportement de celui-ci, qui visait à tourner les homosexuels en ridicule et à promouvoir des stéréotypes négatifs. Dès lors, les tribunaux internes n'ont pas ménagé un juste équilibre entre les intérêts concurrents en jeu, à savoir la protection de la réputation ou des droits du parlementaire et le droit à la liberté d'expression de l'éditeur.
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