Le droit exclusif que l'article L. 621-39 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juin 1994 (
N° Lexbase : L6891AI3), confère au représentant des créanciers pour agir au nom et dans l'intérêt de ceux-ci ne fait pas obstacle à ce qu'un créancier exerce la tierce-opposition ouverte par l'article 1447 du Code civil (
N° Lexbase : L1599ABT) contre le jugement qui prononce la séparation des biens des époux, s'il a été porté atteinte à ses droits. Ainsi, la procédure collective ouverte à l'égard d'un époux ne prive pas le liquidateur d'une société et la banque, créancière de l'époux débiteur, de leur qualité de créanciers, seule exigée pour former tierce-opposition. Telle est la solution énoncée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 19 mars 2014 (Cass. civ. 1, 19 mars 2014, n° 11-22.194, FS-P+B
N° Lexbase : A7506MHH). En l'espèce, à la demande de la femme, agissant sur le fondement des articles 1443 (
N° Lexbase : L1594ABN) et suivants du Code civil, la séparation de ses biens avec son époux a été prononcée et la liquidation de leur communauté ordonnée par jugement du 14 septembre 2000. Le liquidateur judiciaire de la société dirigée par le mari et une banque ont formé, le 22 janvier 2002, tierce-opposition à ce jugement en application de l'article 1447 du Code civil, soutenant que, le partage de communauté attribuant la quasi-totalité des biens des époux à la femme, les biens communs se trouvent soustraits aux poursuites des créanciers. Le mari ayant lui-même été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 6 février et 7 mai 2004, son liquidateur a été assigné en intervention forcée, ainsi que le mandataire
ad hoc. La cour d'appel a notamment déclaré recevables les tierces-oppositions du liquidateur de la société et de la banque. L'épouse a alors formé un pourvoi en cassation, au soutien duquel elle faisait notamment valoir que les créanciers d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective ne peuvent exercer une action individuelle tant qu'ils ne démontrent pas l'existence d'un préjudice personnel distinct de celui de la collectivité des créanciers, y compris lorsqu'il s'agit de former tierce-opposition. Or, en considérant qu'il importait peu que, du fait de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire du mari, le droit de poursuite individuelle de ses créanciers ait été suspendu et que cette procédure collective ne les privait pas de leur qualité de créancier, la cour d'appel aurait méconnu le monopole reconnu aux organes de la procédure collective. Mais énonçant la solution précitée, qui doit être reconduite sous l'empire des dispositions actuelles (C. com., art. L. 622-20
N° Lexbase : L3879HBB), la Cour régulatrice rejette ce moyen (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté"
N° Lexbase : E5035EUZ). Elle casse, néanmoins, l'arrêt d'appel sur la charge de la preuve du caractère frauduleux de l'acte de partage (lire
N° Lexbase : N1525BUZ).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable