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par Sophie Cazaillet, Rédactrice en chef
le 07 Février 2014
Lexbase : Pierre-Olivier Sur, pouvez-vous nous dresser un portrait de votre carrière ?
Pierre-Olivier Sur : Ma première passion a été la littérature. Licencié ès lettres, je me suis ensuite dirigé vers des études de droit et j'ai prêté serment en 1985.
J'ai débuté ma carrière d'avocat aux côtés du pénaliste Olivier Schnerb auprès duquel j'ai notamment assuré les comparutions immédiates et les commissions d'office devant la cour d'assises. J'ai suivi, en parallèle, les cours de l'Institut d'études politiques de Paris dont j'ai obtenu le diplôme en 1986. En 1989, j'ai été désigné secrétaire de la conférence du stage et en 1997, j'ai été élu membre du conseil de l'Ordre.
J'ai rejoint le cabinet Fischer Tandeau de Marsac pour fonder en 2000 le cabinet Fischer Tandeau de Marsac Sur & Associés (FTMS) et y créer un pôle pénal.
Lexbase : Pouvez-vous faire de même, Laurent Martinet ?
Laurent Martinet : Titulaire d'un DEA de droit privé général et diplômé de Sciences Po (1989), ma première expérience professionnelle s'est faite chez Baker McKenzie. J'ai prêté serment au barreau de Paris en 1991. La même année, j'ai rejoint le cabinet Thomas & Associés, au sein duquel je suis resté douze ans, tout d'abord dans le département fusions-acquisitions, puis comme associé en charge du développement du département contentieux - droit des affaires. Dans le cadre d'une nouvelle impulsion que j'entendais donner à ma carrière, j'ai rejoint, en 2003, le cabinet Jones Day à Paris, au sein duquel je suis en charge du département contentieux - droit commercial, que j'ai créé.
Lexbase : D'où vous est venu le souhait d'occuper les fonctions qui sont aujourd'hui les vôtres ?
Pierre-Olivier Sur : Le souhait d'occuper la fonction qui est la mienne aujourd'hui trouve sa source dans le combat que j'ai mené pour obtenir le droit pour l'avocat d'être présent pendant la garde à vue. A l'époque peu de confrères soutenaient cette idée.
Les propos que j'avais tenus en 2003 dans la presse pour dénoncer le système moyenâgeux à la française de la garde à vue m'ont valu un procès en diffamation. Plus tard, le barreau a repris ce combat de façon institutionnelle et la bataille a été gagnée.
Il m'était alors apparu que, pour faire bouger les lignes, il fallait faire partie de l'institution.
En tout état de cause, être l'avocat des avocats est, pour moi, la plus belle des missions.
Laurent Martinet : A un moment donné, j'ai considéré qu'il était nécessaire de participer aux instances collectives de la profession en faisant notamment entendre la voix des avocats d'affaires, ces derniers n'étant pas assez représentés. Je me suis alors présenté au conseil de l'Ordre, dont j'ai été élu membre de 2008 à 2010. Par la suite, en 2010, sous le Bâtonnat de Jean Castelain, j'ai été désigné comme secrétaire de la Commission internationale du barreau de Paris, puis conseiller du Bâtonnier aux Affaires internationales en 2011.
Je souhaitais continuer à mettre mon énergie au service du barreau de Paris. Lorsque Pierre-Olivier Sur m'a proposé de me présenter à ses côtés, comme vice-Bâtonnier, je n'ai guère hésité.
J'ai pensé que notre tandem, très complémentaire, symbolisait la richesse et la diversité de notre barreau : il était important que le barreau d'affaires international soit représenté, ce qui n'était jamais arrivé à ce niveau de responsabilité.
Lexbase : Votre campagne pour le Bâtonnat s'est fondée sur ce mot : "ouverture". Pouvez-vous nous expliquer en quoi cette dernière consistera ?
Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet : En effet, l'ouverture représente une dimension fondamentale de notre projet.
Tout d'abord, nous allons mettre l'accent sur l'ouverture à l'international.
Plus particulièrement, cette ouverture doit permettre de conforter la place de Paris comme première place de droit et de promouvoir le droit continental au-delà des frontières.
C'est ainsi que le barreau de Paris s'est ouvert aux cabinets internationaux pour faire en sorte que l'ensemble de ses membres soit représenté, comme nous venons de l'évoquer.
Nous avons également l'ambition d'accompagner nos confrères pour exporter notre droit continental, notamment en Asie, en Afrique et en Amérique latine, dans les pays où il existe une réelle appétence pour notre système juridique. Dans cette perspective, nous proposons aux membres de notre barreau de participer à des campus internationaux qui se tiendront successivement au Cambodge, au Mali, puis au Brésil. Il s'agit de lieux de rencontres privilégiés entre la société civile, les entreprises et les avocats. L'objectif est d'aider les avocats français à se constituer un réseau international et de favoriser l'implantation de cabinets français à l'étranger.
Cette ouverture à l'international passera également par la mise à disposition, chaque année, de 500 stages rémunérés à l'étranger proposés aux élèves de l'Ecole de formation du barreau, ainsi que par la mise en place d'accords de partenariat, sur une base de réciprocité, avec d'autres grandes écoles et universités dans le monde, notamment en Chine, en Inde et aux Etats-Unis. Nous pourrons ainsi ouvrir les jeunes confrères sur l'international.
L'ouverture doit se faire aussi à l'égard des avocats de Paris. Nous souhaitons une plus grande ouverture et transparence, financière notamment, de notre Ordre quant à son fonctionnement. A cet égard, l'accent sera mis sur la communication du barreau de Paris à l'égard de ses membres.
Cette ouverture se fera, enfin, en direction de la société civile et des entités économiques. Dans cette perspective, nous organiserons, pour la première fois, une université d'été qui sera un moment de rencontre privilégiée avec les avocats de notre barreau.
Lexbase : Juste avant de quitter sa fonction, Christiane Féral-Schuhl donnait une conférence de presse, à la Maison du barreau, au cours de laquelle elle présentait un rapport sur la réforme de l'accès initial à la profession d'avocat. Quel est votre avis sur ce sujet ?
Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet : Nous sommes conscients que nos jeunes confrères cherchent des perspectives et des ouvertures dans ce marché compliqué.
Le nombre d'élèves avocats ne cesse d'augmenter. Si nous continuons sur le rythme actuel, nous serons 35 000 avocats parisiens en 2030 ! Pourtant, nous ne sommes pas favorables au numerus clausus. Nous lui préférons, là encore, une politique d'ouverture en favorisant la conquête par notre profession de nouveaux marchés nationaux et internationaux. Il s'agit, pour nous, de former les avocats au développement de nouveaux champs d'activité.
Comme nous avons eu l'occasion de l'exprimer et de le préciser lors de la rentrée de l'EFB, le 9 janvier 2014, la réponse à cette préoccupation a été de revisiter totalement la formation initiale. Nous avons veillé à ce que celle-ci soit très pratique et en phase avec les attentes de la profession et du marché. L'objectif est d'en faire une grande école, reconnue, de savoir et de savoir-faire.
L'école dont le vice-Bâtonnier assure la présidence a un nouveau directeur : Jean-Louis Scaringella, ancien directeur de HEC, de l'ESCP-EAP et de la Chambre de commerce et d'industrie Paris Ile-de-France, chargé d'insuffler une nouvelle dynamique. Par ailleurs, un comité scientifique a été instauré, composé de personnalités issues d'univers professionnels divers. Il a pour mission de définir une formation rénovée, sans redondance avec l'enseignement universitaire.
Une fondation du droit sera également créée pour regrouper les travaux scientifiques de l'école et de la profession.
A côté de cette formation initiale d'excellence et de la formation continue, nous devons promouvoir une démarche entrepreneuriale. Dans cet esprit, nous avons créé un incubateur, c'est-à-dire un groupe de réflexion de jeunes confrères ayant pour mission de proposer des solutions innovantes pour s'approprier de nouveaux marchés. Parmi les projets présentés, un prix de l'innovation sera décerné.
Nous mettons également à la disposition des jeunes collaborateurs le service du barreau entrepreneurial, c'est-à-dire un conseil gratuit pour la création de structures.
En outre, comme nous l'avons évoqué précédemment, l'ouverture à l'international permettra aux jeunes avocats d'explorer de nombreux débouchés nouveaux, les métiers de demain.
Lexbase : Quels sont les autres chantiers auxquels vous vous attaquerez pendant votre mandat ?
Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet : Pour ne citer qu'un de ces chantiers mais qui, à nos yeux, est primordial : la voix de notre profession doit être entendue et peser auprès des pouvoirs publics, des administrations, des institutions européennes et les acteurs de la société civile. Pour répondre à cet objectif, nous avons mis en place une plateforme de lobbying et créé une Direction des affaires publiques pérenne et dotée d'un budget significatif.
Cette plateforme nous conduira à être très réactifs sur les problématiques plus spécifiques au barreau de Paris et sur les grandes questions en débat, comme la réflexion sur la justice du 21ème siècle (médiation, déjudiciarisation etc.), la procédure d'action de groupe à la française pour que l'avocat puisse y avoir toute sa place, la politique pénale du Gouvernement pour permettre d'oeuvrer pour les libertés publiques fondamentales et les droits de la défense, l'aide juridictionnelle dont l'Etat cherche à se désengager, le projet de divorce par consentement mutuel sans juge, et bien d'autres encore...
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