Réf. : Cass. civ.3, 16 janvier 2025, n° 23-17.265, FS-B N° Lexbase : A51776QS
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J AVOCATS, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 28 Janvier 2025
L’entrepreneur, responsable des désordres de construction, ne peut imposer à la victime la forme de la réparation.
Même si l’entrepreneur propose une réparation en nature, le maître d’ouvrage peut préférer une réparation par équivalent.
Le principe est celui de la réparation intégrale du préjudice, conformément au droit commun. Pour autant, il y a plusieurs façons de réparer ce préjudice : en nature ou par équivalent. Le maître d’ouvrage a le choix, c’est lui la victime. Il ne peut lui être imposé une réparation en nature, même si le lecteur, naïf, pourrait croire que la victime cherche toujours une remise en état des dommages causés à son ouvrage ou son élément d’équipement. L’arrêt rapporté, publié au bulletin, en est une parfaite illustration.
En l’espèce, un maître d’ouvrage a confié l’installation d’une centrale photovoltaïque en toiture de bâtiment agricole à un entrepreneur. Se plaignant de désordres, le maître d’ouvrage assigne l’entreprise et son assureur de responsabilité civile décennale en réparation.
Dans un arrêt rendu le 28 février 2023 (CA Reims, 28 février 2023, n° 22/00566 N° Lexbase : A85419GG), la cour d’appel de Reims considère, d’une part, que le désordre n’est pas de nature décennale – mais ce n’est pas sur ce point que l’arrêt mérite une attention particulière – et, d’autre part, condamne l’entreprise à faire poser le kit de réparation de panneaux photovoltaïques dans un délai de 3 mois afin de mettre fin aux infiltrations en toiture.
La Haute juridiction censure au motif que le maître d’ouvrage ne souhaitait pas d’une réparation en nature.
Au visa de l’article 1792 du Code civil N° Lexbase : L1920ABQ, la Haute juridiction rappelle que l’entrepreneur, responsable des désordres de construction, ne peut imposer à la victime la réparation en nature du préjudice subi par celle-ci (Cass. civ. 3, 28 septembre 2005, n° 04-14.586 N° Lexbase : A5925DKN).
Même si le droit n’entretient pas forcément de lien avec la morale, il aurait été tentant de penser que lorsque le constructeur propose une remise en état, le maître d’ouvrage y voit une solution idéale : son dommage est réparé, de la façon la plus rapide possible et, parfois, une autre garantie décennale court sur les travaux de réparation.
Il peut donc paraître surprenant que des maîtres d’ouvrage favorisent une solution par équivalent, d’autant que, au contraire des obligations de faire les travaux de reprise pesant sur eux en cas de versement d’une indemnité par l’assureur dommages-ouvrage, ils sont libres de ne pas faire les travaux de reprise, en cas d’indemnisation par le constructeur et/ou son assureur de responsabilité civile décennale.
Le principe de la réparation intégrale devrait, en effet, conduire à replacer la victime dans l’état exact où elle se serait trouvée si le dommage n’était pas survenu.
Il en ressort assez logiquement que le bien endommagé doit être remis en état, sans que la victime ait à supporter une part du coût des travaux de réparation (Cass. civ. 3, 20 avril 2017, n° 16-13.307 N° Lexbase : A8431WYW).
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