Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 21 octobre 2024, n° 487929, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A70146BE
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par Yann Le Foll
le 24 Octobre 2024
► En cas de fraude sur l'identité du cocontractant ayant conduit au détournement des paiements de la personne publique, celle-ci ne peut se soustraire à l’obligation de payer, mais peut ensuite invoquer des fautes du cocontractant pour rechercher sa responsabilité.
Principe. Il appartient à une personne publique de procéder au paiement des sommes dues en exécution d'un contrat administratif en application des stipulations contractuelles, ce qui implique, le cas échéant, dans le cas d'une fraude tenant à l'usurpation de l'identité du cocontractant et ayant pour conséquence le détournement des paiements, que ces derniers soient renouvelés entre les mains du véritable créancier.
La personne publique ne peut ainsi utilement se prévaloir, pour contester le droit à paiement de son cocontractant sur un fondement contractuel, ni des dispositions de l'article 1342-3 du Code civil N° Lexbase : L0676KZ3 selon lesquelles « le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable », qui ne sont pas applicables aux contrats administratifs, ni des manquements qu'aurait commis son cocontractant en communiquant des informations ayant rendu possible la manœuvre frauduleuse.
En revanche, la personne publique, si elle s'y croit fondée, peut rechercher, outre la responsabilité de l'auteur de la fraude, celle de son cocontractant, en raison des fautes que celui-ci aurait commises en contribuant à la commission de la fraude, afin d'être indemnisée de tout ou partie du préjudice qu'elle a subi en versant les sommes litigieuses à une autre personne que son créancier.
Le juge peut, s'il est saisi de telles conclusions par la personne publique, procéder à la compensation partielle ou totale des créances respectives de celles-ci et de son cocontractant.
Décision CE. D'une part, la cour administrative d'appel de Bordeaux (CAA Bordeaux, 3e ch., 4 juillet 2023, n° 21BX02286 N° Lexbase : A476098S) n'a pas commis d'erreur de droit en ne recherchant pas si, en l'espèce, le grand port maritime de Bordeaux avait procédé, de bonne foi, aux paiements litigieux à un créancier apparent au sens de l'article 1342-3 du Code civil.
D'autre part, le grand port maritime de Bordeaux ne peut utilement faire valoir, s'agissant de son obligation de payer les sommes qu'il doit au titre du contrat, que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier en refusant de prendre en compte la circonstance que la personne qui a perçu indûment les paiements destinés à cette société revêtait toutes les apparences de celle-ci (sur le caractère frauduleux d’une opération d'affacturage à la suite de laquelle un établissement public a payé un tiers, v. CAA Paris, 6e ch., 10 avril 2018, n° 17PA03697 N° Lexbase : A6466XL3).
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