La lettre juridique n°990 du 4 juillet 2024 : Fiscalité du patrimoine

[Focus] L’administration fiscale met à jour sa doctrine concernant l’application du pacte Dutreil à la transmission de l’entreprise individuelle !

Réf. : BOFiP, actualité, 30 mai 2024

Lecture: 4 min

N9808BZB

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Focus] L’administration fiscale met à jour sa doctrine concernant l’application du pacte Dutreil à la transmission de l’entreprise individuelle !. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/109547103-focus-ladministration-fiscale-met-a-jour-sa-doctrine-concernant-lapplication-du-pacte-dutreil-a-la-t
Copier

par Jérôme Mazeres, Fiscaliste - Diplômé en gestion de patrimoine, Les fourmis du patrimoine

le 02 Juillet 2024

Mots-clés : pacte Dutreil • transmissions • entreprise individuelle • droits de mutation à titre gratuit • administration fiscale


 

1.- L’article 787 C du Code général des impôts N° Lexbase : L0728MLK permet de bénéficier d’un abattement de 75 % sur la valeur de l’entreprise individuelle transmise et soumise aux droits de mutation à titre gratuit.

L’application de ce régime nécessite de remplir plusieurs conditions cumulatives :

  • transmission de l’ensemble des éléments affectés à l’entreprise ;
  • si l’entreprise transmise a été acquise préalablement à titre onéreux, elle doit avoir été détenue préalablement depuis au moins deux ans ;
  • chacun des héritiers, donataires, ou légataires doit prendre l’engagement de conserver l’ensemble des biens affectés à l’exploitation de l’entreprise pendant une durée de quatre ans à compter de la transmission ;
  • l’un des héritiers, donataires ou légataires prenant l’engagement de conservation doit poursuivre l’activité de l’entreprise durant une période de trois ans à compter de la transmission ;

2.- Jusqu’à présent, la doctrine administrative [1] apportait plusieurs précisions :

  • Concernant l’affectation des biens à l'exploitation, il était indiqué qu’il s’agissait des biens nécessaires à l'exercice de la profession. « Ce critère est donc indépendant de la présence du bien à l'actif du bilan de l'entreprise » pour l’administration fiscale.
  • L’exonération partielle ne s’appliquait pas au fonds de commerce donné en location-gérance ;
  • L’administration fiscale exigeait que les héritiers, donataires ou légataires poursuivent l’activité à titre habituel et principal au sein de l’entreprise.

3.- Le 30 mai 2024, l’administration fiscale a mis à jour sa doctrine administrative [2], suite à la loi de finances pour 2024, les retours de la consultation publique et l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 9 février 2022 [3].

4.- Parmi les nouveautés, la nouvelle rédaction de la doctrine administrative introduit l’exigence d’une activité opérationnelle exercée à titre principale. Il s’agit ici d’une précision sur le champ d’application du dispositif, et non sur sa portée.

5.- Autre élément, la décision de la Cour de cassation du 9 février 2022 précisait : « Si, en ce qui concerne les entreprises individuelles, l'inscription des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels au bilan, ou leur mention sur le document en tenant lieu, en font présumer le caractère affecté à l'exploitation de l'entreprise, l'administration a la faculté de rapporter la preuve qu'ils ne sont pas nécessairement et effectivement affectés à celle-ci […] ».

L’arrêt portait notamment sur la possibilité d’appliquer l’article 787 C du CGI à des liquidités. Il était notamment relevé que celles-ci apparaissaient supérieures aux charges courantes d’exploitation de l’entreprise, par rapport à la moyenne des besoins de trésorerie de l’entreprise sur les trois derniers exercices.

La nouvelle rédaction du paragraphe 10 du BOI-ENR-DMTG10-20-40-40 reprend la position de la Cour de cassation. Cette nouvelle rédaction ne lève pas nécessairement toute ambiguïté sur la position à tenir, au vu des commentaires passés de certains auteurs, sur la situation des éléments affectés à l’activité mais hors bilan.

6.- Parmi les éléments significatifs, on relèvera la disparition à l’exigence de poursuite de l’activité professionnelle à titre habituel et principal des héritiers, légataires ou donataires.

Cette exigence pouvait sembler contra legem au vu de la rédaction de l’article 787 C du Code général des impôts qui ne fait jamais référence à une telle condition.

En outre, les cours d’appel de Pau [4] et de Grenoble [5] avaient déjà eu l’occasion de mettre à mal cette exigence doctrinale.

 

[1] BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40, en vigueur jusqu’au 30 mai 2024 [en ligne]

[2] BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40, en vigueur depuis le 30 mai 2024 [en ligne].

[3] Cass. com., 9 février 2022, n° 20-10.753, F-D N° Lexbase : A09707NA.

[4] CA Pau, 10 janvier 2013, n° 13/70 N° Lexbase : A9372IZ7.

[5] CA Grenoble, 8 septembre 2015, n° 13/00609 N° Lexbase : A6648NNK.

newsid:489808