Le Quotidien du 31 mai 2024 : Conventions et accords collectifs

[Brèves] Transfert d’entreprise : un accord de substitution peut-il avoir un effet rétroactif ?

Réf. : Cass. soc., 15 mai 2024, n° 22-17.195, FS-B N° Lexbase : A49295B8

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N9403BZB

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par Lisa Poinsot

le 30 Mai 2024

Un accord de substitution peut prévoir des dispositions rétroactives à la date de la mise en cause de la convention ou de l’accord antérieur dès lors que ces dispositions ne privent pas un salarié des droits qu’il tient de la loi ou du principe d’égalité de traitement pour une période antérieure à l’entrée en vigueur de l’accord de substitution.

Faits et procédure. Un accord de substitution met un terme de manière rétroactive à une grille de rémunération issue d’un accord collectif mis en cause.

Un salarié, dont le contrat de travail a été transféré, saisit la juridiction prud’homale en contestant cette application rétroactive. Il demande ainsi un rappel de salaires au titre de la modification unilatérale de sa rémunération par son employeur et un rappel de salaires au titre de la prime de productivité et de dommages et intérêts pour violation des stipulations conventionnelles.

La cour d’appel (CA Grenoble, 1er février 2022, n° 19/02659 N° Lexbase : A03937L7) analyse le contenu de l’accord de substitution pour débouter le salarié de ses demandes.

Le salarié forme dès lors un pourvoi en cassation en soutenant que :

  • son contrat de travail a été transféré ;
  • le statut conventionnel déterminant les grilles de rémunérations a été mis en cause ;
  • l’accord collectif n’a pas d’effet rétroactif et ne peut pas être invoqué pour les périodes antérieures à sa conclusion ;
  • la rémunération ne peut être modifiée ni dans son montant ni dans sa structure.

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi sur le fondement de l’article L. 2261-14 du Code du travail N° Lexbase : L1464LKG.

Après avoir rappelé sa jurisprudence constante (Cass. soc., 13 janvier 2021, n° 19-20.736, FS-P+R+I N° Lexbase : A23084CH ; Cass. soc., 28 novembre 2018, n° 17-20.007 et n° 17-20.008, FP-P+B N° Lexbase : A9263YNE ; Cass. soc., 24 janvier 2007, n° 04-45.585, FS-P+B N° Lexbase : A6756DTE ; Cass. soc., 11 juillet 2000, n° 98-40.696 N° Lexbase : A9169AGP), la Haute juridiction pose les conditions de validité de l’effet rétroactif d’un accord de substitution. 

En l’espèce, l'accord de substitution n'a pas modifié le montant de la rémunération de base et la structure de la rémunération résultant des dispositions conventionnelles mises en cause et applicables au sein de l’entreprise. Le salarié n’a pas été privé des droits qu’il tient des dispositions de l’article L. 2261-14, alinéa 1, du Code du travail. Les effets des dispositions conventionnelles antérieures à l’égard du salarié ont perduré durant la période litigieuse. L’exception d’illégalité de l’article 1.2 de l’accord prévoyant son application rétroactive est rejetée.

Pour aller plus loin :

  • lire J. Paubel et K. Bouleau, Transfert d'entreprise et normes collectives, Lexbase Social, novembre 2018, n° 763 N° Lexbase : N6552BXX ;
  • lire Q. Chatelier, Droit du travail - Le maintien de la rémunération perçue, Lexbase Social, décembre 2021, n° 886 N° Lexbase : N9622BYZ ;
  • v. ÉTUDE : L’application des conventions collectives, La mise en cause des conventions et accords collectifs de travail, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2254ETN.

 

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