Le Quotidien du 12 mars 2024 : Actualité judiciaire

[A la une] Faux espions de Renault : les trois principaux prévenus condamnés pour avoir monté l’affaire de toutes pièces

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par Vincent Vantighem

le 11 Mars 2024

Carlos Ghosn avait présenté ses excuses. La justice a prononcé la sanction. Le tribunal judiciaire de Paris a condamné, jeudi 7 mars, les trois personnes soupçonnées d’avoir monté de toutes pièces ce qu’on a appelé « l’affaire des faux espions de Renault ». Au sommet de la pyramide de responsabilités, Dominique Gevrey, 65 ans, a été reconnu coupable d’escroquerie et condamné à trois ans de prison dont un an ferme. Cet ancien officier de la direction de la protection et de la sécurité de la défense, reconverti dans le privé avait été recruté par Renault pour assurer la protection du groupe automobile.

C’est lui qui avait lancé toute l’affaire en 2010 quand une lettre anonyme était parvenue sur le bureau de quatre hauts responsables de la firme au losange. Celle-ci dénonçait le versement de pots-de-vin à des salariés du groupe, en échange d’informations sensibles autour d’un programme de construction de voitures électriques.

Renault, dirigé alors par Carlos Ghosn, avait pris l’affaire suffisamment au sérieux pour ouvrir une enquête interne confiée à sa direction de la protection. C’est-à-dire à Dominique Gevrey. S’abritant derrière une source anonyme située, selon lui, en Belgique, celui-ci avait fini par donner à la direction le nom de trois cadres qui auraient touché de l’argent sur des comptes en Suisse ou au Liechtenstein. L’affaire avait même pris un tournant diplomatique lorsque des rumeurs avaient mis en cause la Chine qui avait alors jugé ces allégations « inacceptables ».

Les deux interviews de Carlos Ghosn à TF1

Le problème, c’est que tout était faux… Aucun des trois cadres visés n’avait été corrompu. Mais la machine était lancée. Considérés comme des salariés modèles, ils avaient été licenciés. Leur réputation, laminée… En guise de service après-vente de luxe, Carlos Ghosn s’était même rendu sur le plateau de journal de 20 h de TF1 pour expliquer que tout avait été fait pour découvrir le système d’espionnage et que les responsables avaient été mis hors d’état de nuire.

Détail troublant relevé par le parquet, la Direction centrale du renseignement extérieur a été soigneusement mise de côté. Jusqu’au moment où le licenciement des trois salariés a été rendu public. En moins d’un mois, les policiers démontraient alors que tout était faux. Qu’aucun des trois cadres concernés ne disposait d’un compte à l’étranger. Et que la prétendue affaire d’espionnage avait été montée de toutes pièces. Un peu dépité, Carlos Ghosn revenait alors sur le plateau de TF1 pour présenter des « excuses » à ces trois salariés mis injustement en cause.

L’un des salariés mis en cause injustement travaille toujours chez Renault

Le tribunal a donc considéré que toute cette affaire avait été inventée par Dominique Gevrey dans le but de récupérer de l’argent. Notamment celui qui était destiné à rémunérer sa fameuse source anonyme. Sans véritablement fournir d’explications à l’audience, il a donc été condamné comme la tête de pont de toute cette affaire. Outre la peine de prison, il devra s’acquitter de rembourser à Renault la somme de 318 000 euros, alors que 65 000 euros ont déjà été saisis sur un de ces comptes en Suisse.

Si la firme a vu son préjudice matériel reconnu, il n’en est pas de même pour son préjudice moral, le tribunal ayant considéré que Renault ne pouvait pas le réclamer après avoir payé des factures qu’il savait fausses… Dans ce dossier, deux autres prévenus ont été condamnés : Marc Tixador et Michel Luc. Jugés pour recel de violation du secret professionnel et complicité d’escroquerie, le premier a écopé d’une peine de dix-huit mois de prison avec sursis et 20 000 euros d’amende tandis que le second a écopé de dix mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende.

Les trois salariés concernés ont tous été indemnisés. Deux d’entre eux ont quitté Renault définitivement après toute cette affaire. Le dernier y travaille toujours.

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