Réf. : Cass. civ. 3, 1er février 2024, n° 22-13.446, FS-B N° Lexbase : A01442I8
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 08 Février 2024
► Le point de départ du délai en cas de manquement à l’obligation d’information, de conseil et de mise en garde, correspond au jour où le risque s’est réalisé.
La Cour de cassation poursuit sa jurisprudence constructive sur l’uniformisation des délais de prescription et chacun s’en félicite. L’arrêt rapporté en est une nouvelle illustration.
En l’espèce , les acquéreurs ont acquis, sur la proposition d’un conseiller financier spécialisé en gestion de patrimoine et en investissement financier, un appartement ainsi qu’un emplacement de parking en l’état futur d’achèvement à titre d’investissement locatif. Pour financer cette acquisition, ils contractent un prêt. Reprochant à la banque ainsi qu’à l’organisme financier un manquement à leur obligation de conseil, ils assignent.
La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 6 décembre 2021, déclare leur action irrecevable pour être prescrite. Les conseillers estiment que le point de départ de l’action est le jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer c’est-à-dire, en l’espèce, au jour de l’acquisition.
La Haute juridiction censure. Dans une opération d’investissement immobilier locatif avec défiscalisation comportant un emprunt dont le remboursement en capital est différé à dix ans, le point de départ de l’action en responsabilité engagée par l’acquéreur contre le professionnel pour manquements à leurs obligations d’information, de conseil ou de mise en garde, est le jour où le risque s’est réalisé, c’est-à-dire celui où l’acquéreur a appris qu’il serait dans l’impossibilité de revendre le bien à un prix lui permettant de rembourser le capital emprunté.
La solution est pragmatique et adaptée à la réalité pratique.
Il y a déjà eu des précédents, notamment sur le dol (pour exemple Cass. civ. 3, 26 octobre 2022, n° 21-19.898, FS-B N° Lexbase : A01058RC, n° 21-19.900, FS-B N° Lexbase : A01078RE et n° 21-19.899, FS-D N° Lexbase : A55098RH). L’action en responsabilité, qu’elle soit contractuelle ou délictuelle, court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il s’est révélé à la victime (Cass. civ. 2, 18 mai 2017, n° 16-17.754, F-P+B N° Lexbase : A4966WDB).
La manifestation du dommage consécutif à un investissement locatif avec défiscalisation ne peut résulter que des faits susceptibles de révéler l’impossibilité d’obtenir la rentabilité prévue.
La solution est la même pour le point de départ de l’action en responsabilité initiée à l’encontre du notaire, un autre professionnel de l’immobilier (Cass. civ. 1, 9 septembre 2020, n° 18-26.390, FS-P+B N° Lexbase : A52973TD, ou encore Cass. civ. 3, 11 mai 2022, n° 20-14.371, F-D N° Lexbase : A06707SM) ou pour celle initiée sur le fondement du dol (Cass. civ. 3, 29 juin 2022, n° 21-17.502, FS-B N° Lexbase : A859178P).
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