Le Quotidien du 6 février 2024 : Successions - Libéralités

[Brèves] Dettes dues par un héritier à la succession versus créances d’un héritier contre la succession : pas le même régime de prescription !

Réf. : Cass. civ. 1, 24 janvier 2024, n° 23-40.015, FS-P, QPC autres N° Lexbase : A71242GX

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 05 Février 2024

► Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée à l’encontre des dispositions des articles 1476, 864 et 865 du Code civil, qui prévoient un mécanisme particulier pour le règlement de la dette d'un copartageant à l'égard de la succession sauf si elle est relative au bien indivis, dont le paiement n'est pas exigible avant la clôture des opérations de partage, et qui ne régissent pas, selon l'interprétation qui en est faite par la Cour de cassation, la créance détenue par un copartageant sur la succession, laquelle relève, en principe, de la prescription de droit commun édictée à l'article 2224 du Code civil.

La question prioritaire de constitutionnalité était formulée ainsi : « en matière de créances entre époux, les dispositions des articles 1476 N° Lexbase : L1613ABD, 864 N° Lexbase : L0006HPW et 865 N° Lexbase : L0007HPX du Code civil – qui n'édictent aucun délai d'action pour le créancier de la succession – et leur interprétation par la Cour de cassation dans son arrêt du 28 mars 2018 (n° 17-14.104 N° Lexbase : A8719XIR) déclarant l'action du créancier de la succession soumise à la prescription quinquennale de l'article 2236 du Code civil (lire 2224 N° Lexbase : L7184IAC du Code civil), constituent-elles une violation du principe d'égalité des droits résultant des articles 1er et 6 de la Déclaration de 1789 et de l'article 1er de la Constitution de 1958 du fait de la différence de traitement qu'elles instituent entre le délai d'action, de droit commun, du copartageant sur la succession et le délai d'action de la succession sur le copartageant jusqu'à la clôture des opérations de partage, cette différence de traitement découlant du seul aléa du décès de l'époux créancier ou du décès de l'époux débiteur ? ».

Pour bien comprendre la question, il convient de se reporter aux dispositions des articles 864 et 865 du Code civil, qui se rapportent à la seule hypothèse où la succession détient une créance à l’encontre d’un copartageant, et qui prévoit une « suspension » de la prescription en précisant que « la créance n’est pas exigible avant la clôture des opérations de partage ».

Comme l’explique la Cour de cassation, afin d'assurer l'égalité effective du partage en plaçant les cohéritiers du débiteur de la succession à l'abri du risque d'insolvabilité de celui-ci, le législateur a prévu qu'il soit alloti de la créance que la succession détient contre lui, s'il ne s'en est acquitté volontairement avant le partage, afin d'en permettre le règlement par confusion entre ce qu'il doit à la succession et ce qui lui revient au titre du partage, les cohéritiers du débiteur ne pouvant, le cas échéant, agir en paiement du reliquat de dette qu'après la réalisation des opérations de partage.

Ce mode de paiement des dettes du copartageant, qui constitue une opération de partage, induit donc, avec la suspension de l'exigibilité des dettes, celle de la prescription, et apparaît conforme à l'objet de la loi qui l'établit.

En outre, un tel mécanisme de règlement par confusion avec les droits de l'héritier dans la masse successorale, qui suppose des créances réciproques, n'est pas envisageable pour le règlement des dettes de la succession à l'égard d'un copartageant.

Enfin, l'héritier créancier de la succession, comme tout créancier de l'indivision, peut être payé par prélèvement sur l'actif avant le partage. Le règlement de sa créance ne constitue donc pas une opération de partage, dont elle ne peut, dès lors, remettre en cause l'égalité.

C’est ainsi que la Cour suprême estime que la question soulevée ne présente pas un caractère sérieux, en ce que les dispositions en cause, qui prévoient un mécanisme particulier pour le règlement de la dette d'un copartageant à l'égard de la succession sauf si elle est relative au bien indivis, dont le paiement n'est pas exigible avant la clôture des opérations de partage, et qui ne régissent pas, selon l'interprétation qui en est faite par la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 28 mars 2018, n° 17-14.104, F-P+B N° Lexbase : A8719XIR ; v. J. Casey, obs. n° 10 in Sommaires d’actualité de droit des successions et libéralités (janvier - juillet 2018) - Première partie, Lexbase Droit privé, octobre 2018, n° 756 N° Lexbase : N5784BXI), la créance détenue par un copartageant sur la succession, laquelle relève, en principe, de la prescription de droit commun édictée à l'article 2224 du Code civil, ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant la loi, dès lors que la différence de traitement qu'elles instaurent entre la succession, créancière du conjoint survivant copartageant et le conjoint survivant copartageant, créancier de la succession, qui est fondée sur une différence de situation, est en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

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