Réf. : Cass. civ. 3, 18 janvier 2024, n° 22-20.995, FS-B N° Lexbase : A43452EN
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 26 Janvier 2024
► A la qualité de sous-traitant celui qui exécute, au moyen, d’un contrat d’entreprise, toute ou partie du contrat d’entreprise conclu entre le maître d’ouvrage et l’entrepreneur principal ;
le sous-traitant est considéré comme entrepreneur principal à l’égard de ses sous-traitants.
La sous-traitance est sur chaque chantier. Aussi, le législateur a mis en place un régime particulièrement favorable aux sous-traitants, pour les protéger, notamment, des défauts de paiement de l’entrepreneur principal. Mais, parfois, cette sous-traitance ne concerne pas seulement une relation à trois entre le maître d’ouvrage, l’entrepreneur et le sous-traitant. Ce dernier peut, en effet, également sous-traiter toute ou partie de ses travaux. Il s’agit alors d’un sous-traitant de second rang, qui peut, encore, sous-traiter. Cette sous-traitance en cascade pose des difficultés d’interprétation de la loi n° 75-1334, du 31 décembre 1975 N° Lexbase : L5127A8E ainsi qu’en atteste l’arrêt rapporté.
En l’espèce, un sous-traitant intervient pour des travaux de démolition et de terrassement sur quatre chantiers. Ce sous-traitant fait appel à une entreprise pour des prestations d’enlèvement, transport et traitement des terres extraites de ces quatre chantiers. Puis, le sous-traitant est placé en liquidation judiciaire. Leur reprochant de ne pas avoir mis en demeure le sous-traitant de satisfaire à ses obligations légales, cette entreprise assigne l’entreprise principale et le maître d’ouvrage en réparation de ses préjudices.
L’arrêt rapporté aborde plusieurs sujets qui ne seront pas tous traités.
La Haute juridiction revient, d’abord, sur la qualification du contrat de sous-traitance au motif que le maître d’ouvrage contestait l’existence d’une sous-traitance pour les missions confiées. Le pourvoi est rejeté. Les juges du fond ont librement pu caractériser que l’entreprise avait mis en oeuvre des compétences techniques et logistiques complexes pour réaliser des prestations qui lui avaient été dévolues, de sortes que son intervention ne pouvait être réduite à la fourniture de bennes ou à l’évacuation en déchetterie. Le visa est celui de l’article 1er de la loi précitée.
Il s’agit là d’une application large de l’article 1er définissant la sous-traitance, comme y procède d’ailleurs le juge administratif (pour exemple, CE, 17 octobre 2023, n° 465913, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A17861NH).
Ensuite, l’entreprise principale fait grief à l’arrêt d’appel de l’avoir condamnée. Elle expose que si l’entrepreneur principal est responsable à l’égard du maître d’ouvrage des fautes commises par ses sous-traitants à l’origine des désordres, il n’est pas tenu de répondre de la faute prétendument commise par le sous-traitant de premier rang en omettant de déclarer un sous-traitant occulte, lorsque celui-ci n’a aucun désordre.
Cette fois-ci, la Haute juridiction censure. Si l’entrepreneur est responsable, à l’égard du maître d’ouvrage, des manquements de son sous-traitant commis dans l’exécution des prestations sous-traitées, sans qu’il soit besoin de démontrer sa propre faute, il n’a pas à répondre, sauf stipulation contraire, des manquements de ce sous-traitant à l’égard de ses propres sous-traitants.
La solution n’est pas nouvelle (pour exemple, Cass. civ. 3, 21 janvier 2015, n° 13-18.316, FS-P+B N° Lexbase : A2640NAZ).
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