Le Quotidien du 29 janvier 2024 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Soutien abusif de crédit : définition de l’« acte frauduleux »

Réf. : Cass. com., 17 janvier 2024, n° 22-18.090, F-B N° Lexbase : A43462EP

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par Vincent Téchené

le 24 Janvier 2024

► Constitue un acte frauduleux, au sens de l’article L. 650-1 du Code de commerce, celui réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu, ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive.

Faits et procédure. Une banque a consenti à une EARL entre 1998 et 2009 plusieurs concours bancaires. L'EARL a également souscrit un billet à ordre d'un montant de 440 000 euros le 14 mars 2008 qui est demeuré impayé à l'échéance du 15 avril 2008. Les 2 mai et 31 juillet 2009, la banque a consenti aux époux U. deux prêts relais respectivement de 273 000 euros et 400 000 euros dans l'attente de la vente d'un bien et en garantie desquels ils ont consenti une hypothèque.

Le 30 mai 2012, un tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire de l'EARL. La banque a déclaré sa créance le 30 mai 2012. Par un jugement du 19 janvier 2013, ce tribunal a constaté la confusion du patrimoine avec celui de M. U. et lui a étendu la procédure.

Un plan de redressement a été arrêté ; le commissaire à l'exécution du plan a assigné la banque en responsabilité du fait des concours consentis.

Arrêt d’appel. La cour d’appel de Montpellier a fait droit aux demandes du mandataire (CA Montpellier, 18 mai 2022, n° 19/02709 N° Lexbase : A43657XX). Elle retient que la banque, « en ne mettant pas le billet à ordre à l'encaissement, et en incitant M. et Mme [U.] à souscrire les deux prêts relais dont les fonds ont intégralement servi à rembourser les échéances des emprunts et qui faisaient partie d'un montage financier d'ensemble orchestré par la banque pour tenter de maintenir l'activité de l'EARL, a usé de manœuvres contraires aux lois et règlements permettant d'éluder l'application d'une loi impérative en matière de procédure collective avec la volonté caractérisée d'éluder l'application de la loi visant l'état de cessation des paiements et le principe de l'égalité des créanciers ».

La banque a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 650-1 du Code de commerce N° Lexbase : L3503ICQ.

Selon ce texte, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci.

La Haute juridiction rappelle alors que constitue un acte frauduleux, au sens de ce texte, celui réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu, ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive (v. déjà en ce sens Cass. com., 16 octobre 2012, n° 11-22.993, F-P+B N° Lexbase : A7166IUX).

Elle en conclut que la cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à caractériser une fraude commise par la banque et sans constater en quoi l'absence de réaction de la banque à l'échéance du billet à ordre était frauduleuse.

Observations. La Cour de cassation rappelle ici qu’il est essentiel de caractériser les moyens déloyaux utilisés par le pourvoyeur de crédit pour atteindre le résultat escompté. Ainsi, la seule conscience du caractère abusif du crédit que le banquier accorde à l'entreprise ne peut être assimilée à l'intention frauduleuse exigée par les textes (CA Paris, 5-6, 27 juin 2013, n° 11/19806 N° Lexbase : A0208KIK). De même, toute personne agissant dans le but de préserver ses propres intérêts aux dépens d'autrui, ne commet une fraude que si elle accomplit un acte déloyal et obtient le résultat recherché par tromperie, manœuvres, falsifications ou autres actes répréhensibles (Cass. com., 8 mars 2017, n° 15-20.288, F-D N° Lexbase : A4429T3G).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les établissements de crédit et les fournisseurs, La fraude, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E3503YPG.

 

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