Réf. : Cass. civ. 2, 18 janvier 2024, n° 23-12.483, FS-B N° Lexbase : A43442EM
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par Laïla Bedja
le 24 Janvier 2024
► Les faits prévus et sanctionnés par les articles L. 114-17 du Code de la Sécurité sociale et 441-6 du Code pénal doivent être regardés comme susceptibles de faire l'objet de sanctions de nature différente, de sorte qu'il ne saurait être sérieusement soutenu que les dispositions contestées méconnaissent le principe de nécessité des peines ; partant, la QPC qui conteste ces dispositions n’a pas lieu d’être renvoyée au Conseil constitutionnel.
Les faits et procédure. Une plainte a été déposée par la caisse d’allocations familiales contre une allocataire, pour fausse déclaration en vue d’obtenir une prestation. Par jugement du 17 mars 2021, le tribunal correctionnel l’a déclarée coupable des faits reprochés et l’a condamnée à une amende de 1 000 euros assortie d’un sursis.
Après cette condamnation, la caisse d’allocations familiales a infligé une pénalité financière de 200 euros à l’allocataire, sur le fondement de l’article L. 114-7 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2822MGM en raison de déclarations inexactes, et lui a signifié une contrainte de 220 euros correspondant à la pénalité financière majorée de 10 %, contre laquelle l’allocataire a formé opposition.
À l’occasion de son pourvoi contre le jugement du tribunal judiciaire, l’allocataire a formulé la question prioritaire de constitutionnalité suivante :
« L'article L. 114-17 du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de l'article 35 de l'ordonnance n° 2019-964, du 18 septembre 2019 N° Lexbase : L4046LSN, en ce qu'il tend à réprimer les mêmes faits susceptibles de faire l'objet de sanctions de même nature pour la protection des mêmes intérêts sociaux que l'article 441-6, alinéa 2, du Code pénal N° Lexbase : L0848IZG, est-il contraire au principe de la nécessité des délits et des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 N° Lexbase : L1372A9P ainsi qu'au principe de proportionnalité en découlant ? ».
La décision. Concluant à la solution précitée, la Haute juridiction décide de ne pas renvoyer la question devant le Conseil constitutionnel.
En premier lieu, il résulte d'une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel que le principe de nécessité des délits et des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l'objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature différente en application de corps de règles distincts (Cons. const., décision n° 2021-942 QPC, du 21 octobre 2021 N° Lexbase : A788549W).
La Cour relève ainsi que les peines prévues par les articles L. 114-7 et 441-6 sont de nature différente. Le premier prévoit uniquement une pénalité financière, notamment en cas d’inexactitudes ou d’omissions relevées dans une déclaration pour le service des prestations et le second prévoit une peine d’amende et une peine d’emprisonnement en cas de fausse déclaration ou de déclaration incomplète.
La Cour ajoute que dans l’éventualité d’un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique que le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues et qu'il appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de veiller au respect de cette exigence (décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989 N° Lexbase : A8202ACR). Dès lors qu'il appartient au juge chargé du contentieux de la Sécurité sociale, comme au juge pénal, de veiller à ce que le montant global des sanctions prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé prévu par l'article 441-6 du Code pénal ou par l'article L. 114-17 du Code de la Sécurité sociale, il ne saurait être sérieusement invoqué une méconnaissance du principe de proportionnalité des peines.
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