Le Quotidien du 17 janvier 2024 : Consommation

[Brèves] Le strict formalisme du bordereau de rétractation dans les contrats hors établissement

Réf. : Cass. civ. 1, 20 décembre 2023, n° 21-16.491, FS-B N° Lexbase : A847119M

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[Brèves] Le strict formalisme du bordereau de rétractation dans les contrats hors établissement. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/104095192-0
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par Hélène Nasom-Tissandier, Maître de conférences HDR, Université Paris Dauphine-PSL, CR2D

le 16 Janvier 2024

► De la faculté offerte au consommateur d'exercer son droit de rétractation au moyen d'un formulaire obligatoirement fourni par le professionnel, il se déduit que l'emploi de ce formulaire ne doit pas avoir pour effet de porter atteinte à l'intégrité du contrat que le consommateur doit pouvoir conserver ; ayant constaté que le formulaire de rétractation figurant au verso du bon de commande comportait, d'un côté, sur une seule page, l'adresse à laquelle il devait être expédié ainsi que les références de la commande, la date et la signature du consommateur et, de l'autre côté, l'emplacement permettant à celui-ci de signer le contrat ainsi que les éléments d'identification du vendeur, une cour d'appel en déduit exactement que le contrat de vente devait être annulé.

L’une des questions posées est inédite : quelle est, sous l’empire du droit en vigueur depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 2014-344, du 17 mars 2014, relative à la consommation N° Lexbase : L7504IZX, la teneur exacte du formalisme du bordereau de rétractation dans les contrats conclus hors établissement ? Le formalisme strict qui prévalait n’a pas été repris par les nouvelles dispositions règlementaires. À la différence des textes relatifs au crédit à la consommation (C. consom., art. R. 312-9 N° Lexbase : L1627K8R), elles ne comportent pas l’existence de détachabilité du formulaire ni ne prévoient que celui-ci ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du professionnel. Est-il possible de faire figurer au verso du bordereau certaines mentions du contrat ?

Faits et procédure. Un acquéreur a conclu avec la société Media Système un contrat de fourniture, d'installation et de mise en service de quatre panneaux photovoltaïques avec micro-onduleurs et d'un chauffe-eau au prix de 10 800 euros, financé par un crédit souscrit le même jour avec son épouse auprès d’une banque. Invoquant l'irrégularité du bon de commande, les époux ont assigné le vendeur et la banque en nullité des contrats de vente et de crédit affecté. Les juges du fond accueillent la demande (CA Nîmes, 18 mars 2021, n° 19/02900).

La société forme un pourvoi en cassation. Le premier moyen soutient qu’il ne résulte pas des articles L. 221-5 N° Lexbase : L1253MAN, L. 221-9 N° Lexbase : L1255MAQ, L. 242-1 N° Lexbase : L1270MAB, R. 221-1 N° Lexbase : L1603MCD et R. 221-3 N° Lexbase : L1605MCG du Code de la consommation qu’à peine de nullité du contrat conclu hors établissement, le formulaire de rétraction ne peut comprendre que les mentions prescrites par la loi à l’exclusion de toute autre mention et en particulier celle relative à la signature du consommateur. Le second moyen énonce que la restitution du prix consécutive à l’annulation d'un contrat de vente n’est pas un préjudice réparable. En confirmant la condamnation de la société Media Système au paiement de la somme de 10 800 euros « à titre de dommages-intérêts pour le préjudice financier subi » par les époux après avoir jugé que cette somme correspondait à la restitution du prix de vente du contrat annulé et que les préjudices allégués étaient inexistants, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant, ce faisant, l’article 1178 du Code civil N° Lexbase : L0900KZD.

Solution. La Cour de cassation rend un arrêt de cassation. Seul le second moyen encourt la cassation : « la restitution à laquelle un contractant est condamné à la suite de l'annulation d'un contrat ne constitue pas, par elle-même, un préjudice indemnisable ».

En revanche, le premier moyen est rejeté. La jurisprudence antérieure était stricte : le formulaire détachable, destiné à faciliter l’exercice par le client démarché de sa faculté de rétractation, doit, à peine de nullité du contrat, répondre aux exigences des articles R. 121-4 à R. 121-6 du Code de la consommation (Cass. civ. 1, 21 novembre 2006, n° 05-20.706  F+B+P N° Lexbase : A5386DSB : « le formulaire détachable destiné à faciliter pour le client la faculté de rétractation doit comporter sur une face, l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé et sur l’autre face, les modalités d’annulation de la commande, aucune autre mention que celles visées par ces textes ne pouvant figurer sur le formulaire »).

Désormais, « selon l'article L. 221-9 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5. À peine de nullité prévue à l'article L. 242-1 du même code, il est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5 ». Il n’est donc pas exclu que figurent sur l’une ou l’autre face du formulaire de rétractation des mentions étrangères à la rétractation, le formulaire n’étant qu’un simple modèle destiné à aider le consommateur.

Dans le silence des textes, est-il permis de faire figurer sur le verso des formulaires de rétractation certaines mentions du contrat, qui seront nécessairement supprimées de l’exemplaire remis au consommateur, lors de l’exercice du droit de rétractation ?

La Cour de cassation maintient un strict formalisme en énonçant que « de la faculté offerte au consommateur d'exercer son droit de rétractation au moyen d'un formulaire obligatoirement fourni par le professionnel, il se déduit que l'emploi de ce formulaire ne doit pas avoir pour effet de porter atteinte à l'intégrité du contrat que le consommateur doit pouvoir conserver ». En l’espèce, le formulaire de rétractation figurant au verso du bon de commande comportait, sur une seule page, l’adresse d’expédition et les références de la commande et de l’autre côté l’emplacement de signature et les éléments d’identification du vendeur.

La Cour en conclut que la nullité était encourue en application de la loi, même si elle suggère que pourrait être examinée la conformité « à un principe général de proportionnalité et à l'article 24 de la Directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs N° Lexbase : L2807IRE ». En effet, la Cour de justice de l’Union européenne ne s’est pas prononcée sur cette question.

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