Le Quotidien du 17 janvier 2024 : Fiscalité des entreprises

[Brèves] Déductibilité fiscale des « punitive damages » : le Conseil d’État se prononce

Réf. : CE Contentieux, 8 décembre 2023, n° 458968, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A860017N

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par Marie-Claire Sgarra

le 16 Janvier 2024

Le Conseil d’État s’est prononcé sur le traitement fiscal de dommages et intérêts infligés par une juridiction américaine.

Les faits. Une société (R), membre du groupe fiscalement intégré dont la société UT Paris était la mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a notamment remis en cause, la déduction de son résultat imposable d’une charge et d’une provision correspondant toutes deux à des dommages et intérêts punitifs qu'elle avait été condamnée par le tribunal fédéral du district du Kansas à verser à la société américaine ICE Corporation dans le cadre d'un litige l'opposant à cette dernière.

Procédure. Le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la société UT Paris tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie en conséquence de cette rectification. La cour administrative d'appel de Versailles revoit la somme et a remis à la charge de la société Alder Paris Holdings, venue aux droits de la société UT Paris, la différence entre ces deux sommes, puis a rejeté le surplus des conclusions de l'appel formé par le ministre de l'Économie (CAA Versailles, 5 octobre 2021, n° 20VE00034 N° Lexbase : A518073A).

Principe (CGI, art. 39, 2 N° Lexbase : L4100MGX). Les sanctions pécuniaires et pénalités de toute nature mises à la charge des contrevenants à des obligations légales ne sont pas admises en déduction des bénéfices soumis à l'impôt.

Solution du Conseil d’État. Les dispositions de l’article 39 du CGI précité font obstacle à la déduction de toute somme d’argent mise, aux fins de prévention et de répression, à la charge d’un contribuable qui a méconnu une obligation légale.

N’est ainsi pas déductible la sanction pécuniaire prononcée par une autorité étrangère à raison de la méconnaissance d’une obligation légale étrangère, sauf si cette sanction a été prononcée en contrariété avec la conception française de l’ordre public international.

Pour juger que les dommages et intérêts punitifs en litige devaient être regardés, non comme des sanctions pécuniaires mais comme un complément d'indemnité accordé à la victime, déductible du bénéfice imposable, la cour administrative d'appel de Versailles s'est fondée sur la circonstance qu'ils avaient été prononcés dans le cadre d'un litige commercial pour la satisfaction d'intérêts privés et versés à la victime.

En statuant ainsi, alors qu'il ressortait des énonciations de son arrêt que ces dommages et intérêts punitifs visaient à dissuader la réitération de faits similaires à celui à l'origine du dommage et s'ajoutaient aux dommages et intérêts compensatoires versés par ailleurs pour réparer le préjudice subi, ce qui leur conférait le caractère d'une sanction pécuniaire, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce.

Les articles 3 et 4 de l'arrêt du 5 octobre 2021 de la cour administrative d'appel de Versailles sont annulés.

À noter. Le Conseil d’État prévoit une exception : « n’est ainsi pas déductible la sanction pécuniaire prononcée par une autorité étrangère à raison de la méconnaissance d’une obligation légale étrangère, sauf si cette sanction a été prononcée en contrariété avec la conception française de l’ordre public international ».

Précisions. La Cour de cassation a par un arrêt en date du 1er décembre 2012 jugé que « si le principe d’une condamnation à des dommages et intérêts punitifs, n’est pas, en soi, contraire à l’ordre public, il en est autrement lorsque le montant alloué est disproportionné au regard du préjudice subi et des manquements aux obligations contractuelles du débiteur» (Cass. civ. 1, 1er décembre 2010, n° 09-13.303, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4103GMW).

Lire en ce sens, J. Sagot-Duvauroux, Le sort des dommages-intérêts punitifs devant le juge français, Lexbase Privé, janvier 2011, n° 425 N° Lexbase : N1682BRQ.

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