Le Quotidien du 8 décembre 2023 : Baux commerciaux

[Brèves] Covid-19 et bail commercial : précision sur l’application des mesures de protection contre la résiliation et les voies d’exécution pour les charges et loyers impayés

Réf. : Cass. civ. 3, 30 novembre 2023, n° 22-14.594, FS-B N° Lexbase : A023417S

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[Brèves] Covid-19 et bail commercial : précision sur l’application des mesures de protection contre la résiliation et les voies d’exécution pour les charges et loyers impayés. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/102200316-breves-covid19-et-bail-commercial-precision-sur-lapplication-des-mesures-de-protection-contre-la-res
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par Vincent Téchené

le 07 Décembre 2023

► Les conditions restrictives de réouverture en salle des restaurants et débits de boissons à compter du 22 juin 2020 constituent des mesures de police affectant l’activité du locataire. Dès lors, s’il remplit les critères d'éligibilité posés l'article 14 de la loi n° 2020-1379, du 14 novembre 2020, ce dernier ne peut encourir, jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la fin de ces mesures, toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à son encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives dus.

Faits et procédure. En raison de la crise sanitaire liée au virus Covid-19 et des mesures gouvernementales interdisant la réception du public dans les restaurants, la locataire de locaux à usage de restauration, salon de thé et accessoirement vente à emporter a, le 29 avril 2020, avisé la bailleresse de la suspension du paiement du loyer du deuxième trimestre 2020.

Une ordonnance de référé du 20 janvier 2021 a constaté l'acquisition, au 19 novembre 2020, de la clause résolutoire insérée au bail et a condamné la locataire au paiement d'une certaine somme à titre de provision à valoir sur l'arriéré de loyers, charges et indemnités d'occupation, y compris le quatrième trimestre 2020.

En exécution de cette décision, la bailleresse a, le 23 février 2021, fait dresser un procès-verbal de reprise des locaux loués puis, le 12 mars 2021, a procédé à la saisie-attribution d'un compte bancaire ouvert au nom de la locataire.

Le 16 mars 2021, la locataire a assigné la bailleresse en annulation du procès-verbal de reprise des locaux loués et mainlevée de la saisie-attribution.

Elle invoquait le bénéfice des dispositions l'article 14, de la loi n° 2020-1379, du 14 novembre 2020 N° Lexbase : L6696LYN, qui prévoit que les personnes morales de droit privé exerçant une activité économique ne peuvent encourir toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était affectée par une mesure de police administrative prise en raison de la crise sanitaire de Covid-19. En effet, selon elle, l'autorisation de réouverture en salle à compter du 22 juin 2020 était subordonnée à des conditions et, compte tenu des caractéristiques et de la surface de son local d'exploitation, elle ne pouvait en aucun cas satisfaire à ces obligations, ce qui l'a contrainte à rester purement et simplement fermée au-delà de cette date.

La cour d’appel de Paris (CA Paris, 1-10, 10 février 2022, n° 21/07718 N° Lexbase : A87847MB) a rejeté les demandes de la locataire. Elle a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision.  Selon l’article 14, de la loi n° 2020-1379, du 14 novembre 2020, applicable à compter du 17 octobre 2020, jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d'être affectée par une mesure de police administrative prise en application des 2° ou 3° du I, de l'article 1er, de la loi n° 2020-856, du 9 juillet 2020 N° Lexbase : L6437LXP ou du 5°, du I, de l'article L. 3131-15 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4891L7B, les personnes morales de droit privé satisfaisant à plusieurs critères d'éligibilité ne peuvent encourir toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives dus pour une période, même antérieure au 17 octobre 2020, au cours de laquelle leur activité économique est affectée par l'une des mesures de police précitée.

Par ailleurs, l'article 40 du décret n° 2020-663, du 31 mai 2020 N° Lexbase : L2457LXB et l'article 40, du décret n° 2020-860, du 10 juillet 2020 N° Lexbase : Z058979X prévoient que les établissements recevant du public de type N, restaurants et débits de boissons, ne peuvent accueillir du public qu'à la condition que les personnes accueillies aient une place assise, qu'une même table ne regroupe que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de dix personnes, et qu'une distance minimale d'un mètre soit garantie entre les tables occupées par chaque personne ou groupe de personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, sauf si une paroi fixe ou amovible assure une séparation physique.

Selon la cour d’appel, les établissements accueillant du public ont été autorisés à reprendre leur activité sous certaines conditions qu'il appartenait à la locataire de respecter. Ainsi, une partie des loyers impayés, à savoir ceux échus du mois d'août au mois d'octobre 2020, est devenue exigible alors que l'activité de la locataire n'était pas affectée par des mesures de police, de sorte que la reprise des lieux loués et la saisie-attribution du 12 mars 2021 étaient régulières.

La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel retenant que l'obligation d'accueillir les personnes à une place assise, de ne recevoir que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de dix personnes, et de respecter une distance minimale d'un mètre entre les tables, sauf installation d'une paroi fixe ou amovible assurant une séparation physique, constituait bien une mesure de police réglementant les conditions d'accès et de présence du public.

Pour aller plus loin :

  • v. J. Prigent, Bail commercial et mesures relatives aux loyers et charges de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire, Lexbase Affaires, novembre 2020, n° 655 N° Lexbase : N5296BYS ;
  • v. ÉTUDE : L'obligation du locataire de payer le loyer du bail commercial, L'exigibilité du loyer du bail commercial en période de crise sanitaire (Covid-19), in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E504834Q.

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