Réf. : Cass. com., 22 novembre 2023, n° 22-17.691, F-B N° Lexbase : A861313E
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par Vincent Téchené
le 05 Décembre 2023
► La faculté de retrait du sociétaire, en liquidation judiciaire, d'une caisse de Crédit agricole, est strictement rattachée à sa personne et ne peut être exercée que par lui, tandis que les parts sociales font partie de son patrimoine, dont le liquidateur est recevable à en demander le remboursement ;
Or, l’action en retrait et remboursement des parts d'une société en liquidation judiciaire ayant été engagée conjointement par le liquidateur et le mandataire ad hoc de la société, lequel s'est associé, dès l'origine, à la démarche et a conclu dans le même sens que le liquidateur, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité du liquidateur pour exercer cette action doit être écartée.
Faits et procédure. Une société, qui est sociétaire d’une caisse locale de Crédit agricole, a été mise en liquidation judiciaire. Un mandataire ad hoc a été nommé avec pour mission de représenter en justice la débitrice dans tous les actes autres que ceux dévolus au liquidateur judiciaire.
Le liquidateur et le mandataire ad hoc de la société ont assigné la caisse locale aux fins de retrait de la société et de remboursement de ses parts sociales. La caisse régionale, auprès de laquelle les parts sociales en question étaient en dépôt, est intervenue à l'instance.
Les juges d’appel (CA Nîmes, 3 mars 2022, n° 20/03410 N° Lexbase : A42997PW) ayant condamné la caisse locale à payer une certaine somme au titre du remboursement des parts sociales en raison du retrait de la sociétaire, les caisses ont formé un pourvoi en cassation. Elles soutenaient en substance que le liquidateur judiciaire était dépourvu de qualité à agir en remboursement des parts sociales appartenant à la débitrice dès lors que cette demande, liée à la qualité de sociétaire du débiteur, est une procédure de retrait régie par l'article L. 512-31 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L3160G9W (l’arrêt mentionne à tort l’article L. 512-31 du Code de commerce), qui relève des droits attachés à la personne du débiteur lié à sa qualité de sociétaire.
Décision. La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle retient que :
« Ayant énoncé que la faculté de retrait proprement dite est rattachée strictement à la personne du sociétaire et ne peut être exercée que par ce dernier, tandis que les parts sociales détenues par un débiteur en liquidation judiciaire font partie de son patrimoine et que le liquidateur, qui exerce toutes les actions patrimoniales du débiteur, est recevable à en demander le remboursement, puis relevé, par motifs propres et adoptés, que l'action en retrait et en remboursement des parts détenues par la société en liquidation judiciaire avait été engagée conjointement contre la caisse locale par le liquidateur et le mandataire ad hoc de la société, lequel s'était associé, dès l'origine, à la démarche et a conclu dans le même sens que le liquidateur, l'arrêt en déduit exactement que la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité du liquidateur devait être écartée ».
Observations. Cette solution s’inscrit dans la jurisprudence de la Cour de cassation qui retient habituellement que le liquidateur n'a pas qualité pour exercer les actions liées à la qualité d'associé ou de gérant du débiteur et concernant le patrimoine de la personne morale, non plus que son droit de participer aux décisions collectives (Cass. com., 18 octobre 2011, n° 10-19.647, FS-P+B N° Lexbase : A8703HYY). Mais le dessaisissement de l'associé en liquidation judiciaire ne fait pas obstacle à ce que le liquidateur obtienne le remboursement de la valeur des parts de cet associé (Cass. com., 13 décembre 2011, n° 11-11.667, F-D N° Lexbase : A4913H8H). Il en est de même de l’action en remboursement d’un compte courant d’associé (Cass. com., 23 septembre 2014, n° 12-29.262, F-P+B N° Lexbase : A3065MXS). En fait, il convient de se référer à la distinction classique opérée en droit des sociétés, entre les prérogatives de l'associé en lien avec la gestion et la direction de la personne morale, et les droits financiers ou pécuniaires résultant de sa qualité d'investisseur ou de financeur de la société.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les effets du prononcé de la liquidation judiciaire, Les actions en justice devant être exercées par le liquidateur, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E3984EU4. |
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