Le Quotidien du 23 novembre 2023 : Baux commerciaux

[Brèves] Application du réputé non écrit aux baux en cours… même si la prescription de l'action en nullité des clauses était antérieurement acquise

Réf. : Cass. civ. 3, 16 novembre 2023, n° 22-14.091, F-B N° Lexbase : A58941ZC

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par Vincent Téchené

le 23 Novembre 2023

► La loi « Pinel » en ce qu’elle a substitué, à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec au droit au renouvellement, leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours et l'action tendant à voir réputée non écrite une clause du bail n'est pas soumise à prescription ;

Dès lors, quand bien même la prescription de l'action en nullité des clauses était antérieurement acquise, la sanction du réputé non écrit est applicable aux baux en cours.

Faits et procédure. Le 10 décembre 2002, des propriétaires ont donné une villa à bail commercial à l'exploitante d’une résidence de tourisme pour une durée de neuf années à compter du lendemain de l'achèvement de l'immeuble. Le bail commercial comprenait une clause de renonciation de la locataire à son droit à une indemnité d'éviction.

Le 23 septembre 2014, les propriétaires ont délivré à la locataire un congé avec refus de renouvellement, à effet au 31 mars 2015, sans offre d'une indemnité d'éviction. Le 7 décembre 2015, la locataire a assigné les propriétaires en annulation du congé, indemnisation du préjudice résultant de sa dépossession et restitution des locaux loués ou, subsidiairement, en paiement d'une indemnité d'éviction.

Les propriétaires ont assigné en garantie le promoteur et le notaire.

C’est dans ces conditions que la cour d’appel a notamment réputé non écrite la clause de renonciation à l'indemnité d'éviction et retenu que le notaire avait manqué à son devoir de conseil en omettant d'informer les propriétaires de la nullité de la clause de renonciation à l'indemnité d'éviction.

Les propriétaires ont donc formé un pourvoi en cassation contestant le premier point. Le notaire a quant à lui formé un pourvoi incident.

Décision. La Cour de cassation répond aux deux pourvois.

  • Sur l’application du réputé non écrit aux baux en cours

La Cour de cassation rappelle que la loi « Pinel » (loi n° 2014-626, du 18 juin 2014 N° Lexbase : L4967I3D), qui, en ce qu'elle a modifié l'article L. 145-15 du Code de commerce N° Lexbase : L5032I3R, a substitué, à la nullité des clauses ayant pour effet de faire échec au droit au renouvellement, leur caractère réputé non écrit, est applicable aux baux en cours et l'action tendant à voir réputée non écrite une clause du bail n'est pas soumise à prescription (v. dans le même sens, Cass. civ. 3, 19 novembre 2020, n° 19-20.405, FS-P+B+I N° Lexbase : A9460347 ; Cass. civ. 3, 8 avril 2021, n° 19-23.183, F-D N° Lexbase : A12164PQ ; Cass. civ. 3, 21 avril 2022, n° 21-10.375, F-D N° Lexbase : A48737UZ, M.-L. Besson, Lexbase Affaires, mai 2022, n° 717 N° Lexbase : N1491BZA).

La Haute Cour apporte ici une précision : quand bien même la prescription de l'action en nullité des clauses susvisées était antérieurement acquise, la sanction du réputé non écrit est applicable aux baux en cours (v. également un arrêt du même jour énonçant la même solution, Cass. civ. 3, 16 novembre 2023, n° 22-14.046, F-D N° Lexbase : A024513H).

Ainsi, le bail s'étant tacitement prorogé et le congé ayant été valablement délivré par les propriétaires le 23 septembre 2014, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi « Pinel », la cour d'appel en a exactement déduit que l'action tendant à voir réputer non écrite la clause de renonciation à l'indemnité d'éviction n'était pas soumise à la prescription biennale et était recevable.

Dans un autre arrêt rendu le même jour (Cass. civ. 3, 16 novembre 2023, n° 22-14.089, F-D N° Lexbase : A0371137), dans une affaire similaire, la Cour de cassation rappelle toutefois que le réputé non écrit de l’article L. 145-15 du Code de commerce n'est pas applicable aux baux ayant pris fin avant l'entrée en vigueur de cette loi sans ouvrir de droit au renouvellement du locataire. Cette affaire concernait identiquement une villa donnée à bail dans une résidence de tourisme, le bail stipulant une clause de renonciation du locataire à son droit au renouvellement. Ainsi, le congé délivré par les bailleurs sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction ayant mis fin au bail le 31 décembre 2013, la cour d'appel a exactement retenu que la situation juridique s'était éteinte à cette date, soit avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 juin 2014 et que cette loi n'était pas applicable.

  • Sur le manquement du notaire à son obligation de conseil

Sur la question de la responsabilité du notaire, l’arrêt rapporté (et également Cass. civ. 3, 16 novembre 2023, n° 22-14.046, F-D, préc.) apporte une précision intéressante. Ainsi, si le notaire est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il prête son concours, selon la Cour, il n’est pas tenu d'une obligation de conseil concernant l'opportunité économique d'un bail commercial conclu par les acquéreurs sans son concours, ni de les mettre en garde sur le risque d'annulation d'une clause de ce bail qui est sans incidence sur la validité et l'efficacité de l'acte de vente qu'il instrumente.

Elle censure donc sur ce point l’arrêt d’appel qui avait retenu la responsabilité du notaire pour avoir manqué à son obligation de conseil.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les délais encadrant les actions relatives au bail commercial, La prescription biennale de l'action en nullité fondée sur une disposition du statut, in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E5936AEL.

 

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