Réf. : Cass. civ. 3, 14 septembre 2023, n° 22-16.623, F-D N° Lexbase : A00311HM
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par Juliette Mel, Docteur en droit Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 25 Septembre 2023
► Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même ; les juges tiennent compte de la qualité de professionnel ou de profane de l’acquéreur.
La distinction entre vice caché et vice apparent suscite toujours des difficultés : qu’est-ce qu’un vice caché ? Quand devient-il apparent et pour quel acquéreur le devient-il ? Telles étaient les questions qui se posaient ici à la Cour de cassation.
Dans cette affaire, les particuliers vendent à d’autres particuliers une maison avec piscine. Ayant constaté l’apparition de fissures sur les murs et les façades de leur maison ainsi que sur la piscine, les acquéreurs ont, après expertise judiciaire, assigné les vendeurs aux fins d’indemnisation de leurs préjudices sur le fondement de la garantie des vices cachés.
La cour d’appel de Nîmes, dans un arrêt du 3 mars 2022, condamne les vendeurs qui forment un pourvoi en cassation (CA Nîmes, 3 mars 2022, n° 20/03396 N° Lexbase : A37217PI). Ils exposent, notamment, que les fissures étaient apparentes lors de la vente. Ce n’était pas exactement la motivation des conseillers. Les fissures affectant les murs porteurs, les cloisons, les carrelages et les plafonds ont pour origine l’inadaptation des fondations au sol d’assise et présentent un caractère évolutif. Ils ont, en outre, relevés que si les acquéreurs avaient constaté, lors de visites préalables à la vente, la présence de traces de fissures, ils ne pouvaient, n’étant ni des professionnels du bâtiment ni tenus de se faire accompagner par un homme de l’art, se convaincre du vice dans son ampleur et ses conséquences.
Le vice ne présentait donc pas un caractère apparent.
La qualité de professionnel ou de profane de l’acheteur n’est, évidemment, pas indifférente pour savoir si un vice est ou non susceptible d’être décelé par lui. Naturellement, la jurisprudence est davantage encline à admettre le caractère occulte du vice lorsqu’il est invoqué par un acheteur profane. La jurisprudence ne parait exiger que l’examen et les vérifications auxquelles procèderaient tout homme de diligence moyenne, c’est-à-dire tout acheteur sérieux.
La question de savoir si l’acquéreur doit se faire accompagner par un homme de l’art est ancienne (pour exemple, « Notion de vice apparent dans une vente d’immeuble », O. Tournafond, D. 1990, p. 117) et les juges considèrent, à juste titre, que cela serait rajouter au texte une condition qu’il ne prévoit pas (Cass. civ. 3, 3 mai 1989, n° 87-18.908 N° Lexbase : A3139AHQ).
La jurisprudence est, depuis, sans cesse confirmée (pour exemple, Cass. civ. 3, 4 février 2004, n° 02-18.029, FS-P+B N° Lexbase : A2373DBI).
L’autre intérêt de cet arrêt concerne le caractère évolutif des désordres. Même en voyant les fissures lors de la vente, l’acquéreur, parce qu’il est profane, ne pouvait pas savoir qu’elles allaient s’aggraver.
Là encore, cet arrêt reprend une solution classique selon laquelle le vice n’est pas apparent au sens de l’article 1642 du Code civil N° Lexbase : L1744AB9 lorsque l’acheteur, bien qu’il ait pu en connaître l’existence, n’était pas en mesure d’en estimer l’ampleur et les conséquences (pour exemple, Cass. civ. 3, 14 mars 2012, n° 11-10.861, FS-P+B N° Lexbase : A8791IEC).
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